Fatal error

31 3 1
                                    

Cinq heures et demi.

Le soleil commence doucement à se lever, on distingue difficilement la frêle silhouette d'Emma. Elle a laissé un mot sur la table de la cuisine à l'attention de ses parents, pour qu'ils ne s'inquiètent pas de son absence.

Elle a simplement besoin d'air.

Réveillée en pleine nuit par un cauchemar monstrueux, elle a l'impression de suffoquer. Ses plus grandes peurs refont surface. Elle branche ses écouteurs, recherche Eminem. Ça y est, elle est lancée. Elle marche, de plus en plus vite, comme si elle pouvait fuir ses tourments de cette manière. Mais ce n'est pas comme ça que ça marche.

Huit kilomètres plus tard, elle s'arrête enfin, arrivée au sommet de la petite colline qu'elle affectionne depuis sa tendre enfance. Elle observe le ciel, la campagne environnante. Longtemps. Tellement qu'elle en perd la notion du temps. Son cerveau tourne à plein régime.

Comment savoir si ses choix sont les bons? Une petite voix dans sa tête lui murmure qu'elle va droit dans le mur, qu'elle va à nouveau se planter. L'envie de pleurer la prend, elle se retient. Elle est plus forte que ça. Pourtant, elle est rongée par les doutes.

Les mots, les gestes, les regards. Sa mémoire lui balance tout en vrac, à Emma de se débrouiller pour faire le tri. Pour savoir quoi garder, quoi jeter.

Sept heures et quart. Elle regarde son téléphone, tombe sur la photo de son copain. Vide d'émotion, elle observe le visage malicieux qui s'offre à elle, visage qui la hante à chaque instant, pour le meilleur et pour le pire. Il est sa plus grande folie, elle le sait. Elle est parvenue à mettre de côté ses réticences envers l'amour le temps d'un soir, d'un baiser. A envoyer voler tout ce qu'elle s'est imposé durant un an. Pas de sérieux, que du jeu, de la tension, de la séduction, voilà ses règles. Règles qui ont fondu comme neige au soleil face au regard de celui qui a fissuré son cœur de pierre.

Elle remonte ses manches. Passe son pouce sur ses cicatrices. La pulpe de son doigt la brûlerait presque tant ses poignets sont sensibles. Elle a la nausée en repensant au sang qu'elle a fait couler. Au sang qu'il continuera à faire couler toute sa vie. Aux nuits qu'elle passe à craindre pour lui, à se demander si il lui enverra un message le lendemain matin ou si il ne verra pas le soleil se lever ce jour-là. A sa froideur, à la distance qu'il met entre eux certains jours où la peur le domine.

Elle se sent comme une funambule, proche de la chute à chaque instant.

Le moindre faux-pas sera fatal.



RegardOù les histoires vivent. Découvrez maintenant