2. Escort, chaussettes et pizza

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Enfin rentrée à la maison, j'appelle Forza Pizza et commande une pizza avec des lardons bien gras, des petits oignons, du reblochon qui pue et de la crème qui dégueule. La meilleure ! Toute façon, il n'y a personne qui va venir se plaindre de ma mauvaise haleine ou de ma façon de me nourrir alors je m'en tape le coquillard ! Envoyez le fromage qui fouette !

Ma livraison arrivera dans une heure, ce qui me laisse le temps d'aller prendre une bonne douche. Mais avant, je vire mes talons d'un geste gracieux et sensuel : lancé de jambe à la perpendiculaire. Atterrissage de la chaussure en toute discrétion : badaboum contre la table, lampe qui tombe, strike. Ah bah je suis peut-être douée en maths depuis le collège, mais il faut bien se l'avouer, le sport, ce n'est pas vraiment ma came. J'ai toujours été une catastrophe dans ces machins-là, alors ce n'est pas à vingt sept balais que ça va changer. Faut rester réaliste. Oui et la grace ce n'est pas non plus mon fort en y pensant.

Je sors de la salle de bain plusieurs minutes plus tard, une serviette enroulée dans mes cheveux bruns, un masque noir sur la face et un peignoir rose méga sexy sur le dos. Toute façon, comme j'ai dit, je n'ai pas de mec et personne n'ira me dire que j'ai une dégaine à  chier. Ah oui ! J'ai oublié de préciser que j'avais aussi mis mes grosses chaussettes montantes de Noël. So sexy ! La tenue parfaite d'une célibataire qui va passer la soirée toute seule devant l'ordi avec sa pauvre pizza.

Mais j'aime bien le célibat. Personne pour me faire chier à la maison, j'ai largement ma dose au boulot. Personne qui ronfle et qui m’empêche de dormir. Personne pour se plaindre de ma tenue, de ma façon de cuisiner, ou même de ma mère. Pas de matchs de foot de merde à supporter, ni de soirées bières entre couilles. J'ai essayé hein. Mais il n'y a rien à  faire. Je ne suis jamais tombée sur LE mec parfait qui vous fait rêver toute la vie. Alors je me fais rêver toute seule quoi. Escort, chaussettes et pizza.

Sentant ma tronche brûler un instant plus tard, je me souviens alors que j'ai toujours mon masque sur le visage. J'ai plutôt intérêt à aller le retirer vite fait si je ne veux pas avoir la gueule cramée au troisième degré. La moitié du masque enlevé, on sonne à la porte. Merde la pizza ! Je me regarde dans le miroir  avec un côté noir et un côté un peu rosi, signe avant coureur de ma brûlure imminente. Oh et puis merde ! Je sors de la salle de bain avec ma tête bicolore et pars ouvrir la porte. Au point où j'en suis…

— Bonsoir ! dis-je gaiement après avoir ouvert.

— Bon… soir… fait le livreur sûrement choqué que je l'accueille ainsi.

— Tenez, quinze euros, gardez tout, annoncé-je en lui tendant les billets d'une main et m’emparant de la pizza qui se trouve dans la sienne ensuite. Bonne soirée ! dis-je avec un grand  sourire en deux teintes.

— Bonne… soirée, répond-il alors que je ferme la porte.

Bon bah ça aurait pu être pire non ? Ouais d'accord il a buggé. Mais je n'ai pas eu à le ramasser par terre ni un truc du genre. Il a dû en voir d'autre le petit livreur.  Allez ! À moi la pizza !

Je fonce à la cuisine pour couper mes huit parts de bonheur quand je vois mon reflet dans le four. Merde mon masque ! Je termine mon découpage et retourne à la salle de bain pour effacer les traces du crime qui ont ravagé ma façade.

Une fois installée dans le canapé, mon ordi portable sur les genoux, ma pizza à ma droite, mon verre de Fanta sur la table basse et Joséphine à la télé, je me lance enfin.

Allez c'est parti ! Mission réservation !

L'imposture 3Où les histoires vivent. Découvrez maintenant