L'imposture 3

48. Le Perroquet, le retour

Ca fait plusieurs jours que nous sommes là maintenant, et franchement, à part faire les larves en plein cagnard, on n’a pas fait grand chose. Même les soirées, on les passe devant l’ordinateur à se taper des films de filles ou à se faire des parties de UNO, alors quand ma copine propose un plan sympa, on saute sur l’occasion.

— Hé les meufs ? Ca vous dit un karaoké ? demande Morgane.

— Oh ouais ! J’en connais un ici justement ! dis-je enjouée.  

Evidemment que j’en connais un, et je dois dire que je ne suis pas prête de l’oublier celui-là. Quelle soirée ! J’ai presque envie de rougir quand j’y repense d’ailleurs...

Et nous voilà parties au Perroquet après le dîner. Robes légères, petites chaussures compensées ouvertes et hop hop hop ! Ca va nous faire du bien et nous défouler un coup.  Le karaoké, il n’y a rien de mieux pour se vider l’esprit. Oui, bon, les galipettes aussi, j’avoue. Mais là, je suis un peu à court de mec, donc pour la gymnastique, c’est un peu mort.

L’endroit n’a pas changé, hormis le panneau “SOIRÉE SPÉCIALE - C’est ma tournée !” qui trône sur la devanture. Cool ! En plus, on va boire une conso à l’oeil ! Nous nous installons toutes les trois à une table dans le fond. Tu parles ! Avec la soirée spéciale, toutes les places devant sont prises. Je regarde, nostalgique, la table où nous étions placés l’an dernier et souris comme une heureuse idiote en repensant à toutes nos prestations. Je revois Duval bousiller Johnny et Vanessa faire sa Madonna. Je me marre ensuite alors qu’une chanson de Stromae débute à l’instant et je ne peux m’empêcher de m’imaginer Eliott Mancini onduler sur moi en murmurant “doucement”. La nuit qui s’en ait suivie était merveilleuse, et les jours suivants l’étaient bien plus encore. Elle était magique cette semaine.

Une fois installées toutes les trois à une table, je décide d’aller nous chercher à boire alors que mes copines partent nous inscrire sur la liste des participants à la poussée de chansonnette. J’espère ne pas passer trop tôt, j’aimerais avoir le temps de picoler un peu avant. Ca m’aide à me dérider en cas de stresse.

Oh ça va hein ! On ne juge pas !

Tous les barmans s’activent, jonglent avec leurs shakers et tout le tralala. Les gens dansent ou essaie de danser - suivant la dose d’alcool qu’ils ont dans le sang - et les barmans sont enjoués, sexy et, putain de merde !

J’ai envie de me frotter les yeux pour vérifier qu’ils soient bien ouverts, mais je vais bousiller mon mascara si je le fais. Si je vois bien ce que je vois, hors de question d’avoir la face d’un bébé panda !

— Eliott ? dis-je choquée, bloquée devant mon ex faux mec.

— Oh mais en voilà une bonne surprise… Princesse Milah est de retour, lance-t-il le sourire toujours aussi radieux sur son visage.

— Qu’est-ce que tu fais ici ? demandé-je, encore sous le choc.

Alors soit, j’ai déjà trop bu et j’ai perdu la boule. Soit, Alex a foutu un truc dans mon verre au dîner. Oui elle aime bien les machins qui font planer. Soit, je débloque totalement. Ou Eliott est vraiment là, face à moi, avec ses fossettes, son sourire ravageur et sa torride attitude !

— Bah je bosse comme tu vois. Mais profite, c’est mon dernier soir ! C’est pour ça la soirée spéciale. Je paie ta première conso ma belle !

— Pourquoi ici ? continué-je sans vraiment réaliser qu’il est là.

— Pourquoi pas ? J’y ai passé de bons moments, fait-il avec un clin d’oeil. Mais je repars à Paris dans quelques jours pour bosser dans la boîte de mon oncle. Je vais devenir menuisier, annonce-t-il fièrement. Et puis je vais faire comme toi… Attendre que mon moment arrive, en espérant qu’il ne soit pas déjà passé...