2. Le grand jour

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Je regarde ma montre, il est neuf heure et demi. Encore trente minutes environ et ils sont ici. Je saute de ma chaise et ferme mon carnet où j'y écris des musiques tout les jours. Je me dépêche de sortir et de prendre mon vélo. Je pars, pars pour éviter de le rencontrer. J'irai chez Marzia au village.
— Où vas-tu comme ça, Elio ?
Je regarde derrière moi et vois ma mère avec un pot remplie de fleurs dans les mains.
— Me promener un peu.
— Reviens vite, Oliver arrive dans peu de temps.
Et elle repart. Pas question que je reviens avant la tombée de la nuit !
Je commence à pédaler vers le village.
J'aime ça. Le vent qui ébouriffe mes cheveux, les oiseaux qui passe par-dessus ma tête, les petites maisons qui défile devant mes yeux, j'aime tout ça.
Je ferme les yeux. L'air frais remplis mes narines, la senteur de l'été.
Soudainement, un klaxon me fait réaliser que je suis en plein milieu de la route. Un taxi me fonce droit dessus. Je donne un coup brusque à mon volant et je me retrouve sur le sol et mon vélo à quelques mètres plus loin. Un crissement fort se fait entendre. Je me lève lentement et remarque que mes genoux saignent.
Putain.
— Elio ?
Je me retourne. Oliver.
Le conducteur sort de la voiture.
— Come stai ? Non sei ferito ? (Ça va ? Tu n'es pas blessé ?)
— Oh mon dieu ! crie une femme qui s'agrippe au bras d'Oliver. J'en conclus que c'est elle, "sa" femme.
Je détourne le regard, saisis mon vélo et prends mes jambes à mon cou en pédalant comme un fou sans regarder derrière moi. C'est comme ça que Dieu voulait que je le revoie ?
Des larmes se mettent à coulé sur mes pommettes. "Je me rappelle d'absolument tout" me disait-il. Quel mensonge. Je n'étais qu'un pauvre gamin qu'il utilisait comme bouche-trou. Au fond, je n'étais rien pour lui, et je ne le suis toujours pas.
Le chagrin qui était toujours au fond de moi rejette toute la peine qu'il a enduré pendant tout ces mois où je pensais à lui, comment il m'a abandonné comme si j'était qu'un déchet.
Je m'arrête de fatigue sur le bord de la route et pleure encore pendant de longues minutes. Je regarde où je suis : à quelques mètres du champ où moi et Oliver nous sommes embrassé pour la première fois. Je laisse traîner mon vélo, descends la petite pente de gazon et m'assois sur le sol. Je le vois. Je le vois, étaler sur l'herbe, prêt à m'embrasser de ses lèvres parfaites qui me faisait frissonner juste en les regardant. Je le vois, lui et moi, quand j'ai osé toucher sa partie intime. C'était si excitant... Je reste un bon moment à regarder les plaines, écouter le champ des oiseaux et les quelques voitures qui passent sur le chemin, mais désormais, je devrais rentrer. De toute façon, il est trop tard pour l'éviter, nous nous sommes déjà rencontrer. Rencontrer de la façon la plus horrible qui soit.
Je me lève et repart avec mon vélo.
Arrivé à destination, je passe par la porte arrière. Je monte les escaliers et entre dans ma nouvelle. Je me dirige vers la porte qui sépare cette chambre de la chambre d'Oliver et remarque par la petite craque de la porte qu'il est avec elle en train de ranger leur bagage. Au même moment, sans crier gare, ma mère entre dans la chambre. Je sursaute et fais comme si de rien était.
— Elio ? Tu es là ?
Elle se précipite vers moi, paniqué.
— Oliver m'a dit ce qui s'est passé, tout va bien ?
Elle me regarde de haut en bas.
— Tes genoux ! Laisse-moi aller te chercher des pansements !
— Maman ! Ça va ! Je suis plus un bébé.
— Ou peut-être bien que si, dis une voix arrogante.
Oliver. Je regarde par-dessus l'épaule de ma mère et le vois, accompagné de sa femme.
— Ça va ? me dit la femme. J'espère que tu n'as pas trop été blessé. Moi, c'est Marlène.
— Elio, je sors d'un ton dur.
Elle me regarde bizarrement, je crois qu'elle a saisie que nous ne serons pas bons amis.
— Bon, je vous laisse entre jeune, me dit ma mère en me faisant un clin d'œil.
— Moi, je vais continuer à ranger les valises, dit Marlène en donnant un baiser sur la joue d'Oliver. Quelle garce.
Les deux partent et nous nous retrouvons que deux, moi et lui. Je peux enfin admirer ses yeux bleu océan, ses lèvres parfaites, ses cheveux que je pourrais caresser pendant de nombreuses heures, sa mâchoire que je remplirais de baiser, la petite fente de sa chemise qu'il laisse voir un peu de son torse. Tout ce que j'ai envie, c'est d'embrasser tout les partie de son corps.
Je prends mon livre qui est sur mon petit bureau et commence à le feuilleter comme s'il n'était pas dans ma chambre.
— Tu vas continuer à m'ignorer comme ça ?
— Qui sait, je réponds froidement.
Le silence est assistant pendant quelques instants avant qu'Oliver le brise :
— Tu ne m'as toujours pas répondu.
— À quoi, je demande en le regardant enfin.
— Si tu m'en voulais ?
Il est idiot ou quoi ? N'a-t-il dont pas remarqué que j'ai évité touts ses appels ?
Je reste silencieux.
— D'accord.
Et il part.
J'aurais voulu qu'il reste, qu'il ne parte pas, qu'il me rassure.
Non.
Si.
Non.
Soupire. Quel con je suis.

Marzia me tient compagnie. Nous sommes les deux sur le patio en train d'admirer les étoiles.
— Dis, Elio.
Je me retourne vers elle.
— Tu es bizarre ce soir. Ça a un rapport avec l'arrivée d'Oliver ?
— T'inquiètes pas.
Nous restons silencieux un bon moment.
— Je vais y aller, il se fait tard, déclare-t-elle enfin.
— D'accord, bonne nuit.
Elle m'embrasse sur la joue. Je la regarde droit dans les yeux. Son visage illuminé par la lune est plus jolie que jamais. Je mets ma main derrière sa nuque et approche mes lèvres des siennes, puis s'en suivis un long baiser. Ses lèvres parcourent les miennes. Après plusieurs secondes, elle y met fin, me caresse les cheveux puis repart. Je la regarde s'éloigner et me retourne vers les étoiles qui brillent.
Je vois Marzia s'éloigner quelques instants plus tard avec son vélo. Je lui cris un "bonne nuit" une deuxième fois et elle fait de même.
— Je ne dérange pas trop, j'espère ?
Je me retourne et Oliver est devant moi. Il me rejoint, regardant lui aussi les étoiles.
— Je dois te parler, Elio.
Qu'il ne m'appelle pas par son nom me blesse énormément, comme s'il déchirait une partie de moi. Je baisse la tête.
— Quoi, "Oliver", je dis en prenant un ton ironique.
— Je... Je ne suis pas venu ici pour recommencer à zéro avec toi si c'est ce que tu imaginais.
Silence. Je ne réagis pas.
— J'ai maintenant une femme, j'habite avec elle et je vis le parfait bonheur, donc s'il te plaît, ne fais pas de chose déplacée. Elle n'en sait rien de nous deux. Ne gâche rien.
Ma poitrine me fait terriblement mal. "Ne gâche rien". C'est comme si je venais de recevoir une centaine de coups de couteau dans le dos. Comment peut-il être sans-cœur à ce point ?
Une larme coule discrètement sur ma joue.
— Tu m'as manqué, sans blague.
Menteur.
— Ouais, c'est ça.
De sa bouche sort un rire nerveux, puis il revient sérieux.
— Elio, crois-moi sur parole...
Tu te fiches de moi, admet-le.
— Je suis sincère.
Je le regarde, le fusillant du regard :
— Tu m'as abandonné, tu m'as caché ta relation entre toi et elle et maintenant tu es en train de dire que je pourrais tout gâcher ? Dans ce cas, va te faire foutre et ne me parle plus.
Et je m'en vais. Mes yeux sont brillants de larmes. Mon été est gâché, totalement gâché. Je m'enferme dans ma nouvelle chambre et me laisse glisser sur le dos de la porte. Je remonte mes genoux en dessous de mon menton et pleure en silence.
J'entends des bruits provenir derrière la porte.
— Oliver, dit Oliver d'un ton bas à la fois sensuel et érotique à travers la fissure de la porte.
— Elio, je chuchote en sanglot.
Traitre.
Traitre...

Again, Please, Call Me by Your Name [TERMINÉ]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant