Différente - T1

Cinquième Chapitre - Réécrit

Lorsque j'ouvre les yeux, il fait nuit. Je ne suis pas chez moi. Je suis allongée, sur une table métallique gelée. Je m'assieds brusquement et observe tout autour de moi, sur la défensive. Je me trouve dans une pièce sombre, avec plusieurs cartons empilés contre le mur en face de moi. La table sur laquelle j'étais se trouve au plein milieu. Il fait extrêmement froid. Je frissonne et frotte mes mains contre mes bras pour me réchauffer. Mes mains touchent un tissu rugueux, et fin. Certainement pas mes vêtements. Je baisse les yeux, je suis pieds nus et ai pour seul vêtement un vieux tee-shirt gris et usé qui m'arrive un peu au dessus des cuisses. Je pose les pieds par terre et un spasme me parcourt tout le corps, comme un coup de jus violent. L'espace d'une seconde, je ferme les yeux pour reprendre mes esprits, et quand je les rouvre, un miroir aussi haut que le mur se trouve en face de moi, à l'endroit où les cartons étaient avant. Je sursaute, et m'observe un moment, sans me reconnaître. Mes cheveux sont détachés et en batailles, mon visage s'est creusé et j'ai un teint presque cadavérique. J'ai aussi l'air d'avoir maigri, beaucoup. Ce n'est pas moi... Je tends la main vers ce miroir aux coins fissurés, et au moment où je pose les doigts dessus, une ombre passe derrière moi. Je me retourne, retirant brusquement ma main du miroir. Je déglutis, et avance d'un pas hésitant dans la pièce, cherchant une quelconque possibilité de sortir. Rien. Je suis enfermée, seule et frigorifiée. Et pourtant, je ne suis pas effrayée, pas du tout, même.

Soudain, j'entends comme un courant d'air siffler derrière moi, et pivote en un sursaut. Mon cœur rate un battement lorsque je me retrouve face à une femme inconnue, et je sens mon souffle se couper un instant. Grande, mince et magnifique, elle semble avoir la quarantaine. Elle arbore une chevelure bouclée d'un noir profond, et des yeux bleus d'une couleur incroyable. Pas d'un bleu comme on peut le voir chez certaines personnes, mais d'une sorte de turquoise éclatant et hypnotisant, déguisant ses iris comme des pierres précieuses. Je recule d'un pas, la respiration saccadée sans trop d'explication, et la femme papillonne des cils en me scrutant avec une émotion étrange, entrouvrant ses lèvres charnues.

— Heaven... fait-elle alors, sa voix cristalline tremblant inexplicablement.

Je frissonne à l'entente de mon nom, et suis paralysée. Comment connaît-elle mon nom, et qui est-elle ?

Les yeux brillants, elle tend sa main vers moi, lentement, semblant tenir quelque chose entre ses doigts. Je suis clouée au sol, incapable de faire un seul mouvement. Elle me fait signe de prendre ce qu'elle me tend, et je m'exécute sans pouvoir riposter. Je ne parviens pas à voir ce qu'elle dépose dans la paume de ma main, mais je sens le contact froid d'un minuscule objet. Lorsque je baisse les yeux vers ma main, il n'y a plus rien. Je fronce les sourcils, et relève les yeux vers la femme, toujours silencieuse et me dévisageant avec insistance. Je ne comprends rien, mais n'essaie même pas de comprendre.

Soudain, son visage se peint d'une émotion indescriptible, et je fais un pas en arrière en la voyant disparaître petit à petit. Elle s'évapore en quelques secondes, et seuls ses yeux d'un bleu inoubliable persistent avant de disparaître à leur tour. Je reste tétanisée, sans pouvoir bouger et reprenant mes esprits avec difficulté. La panique fait enfin surface, et je ne parviens toujours pas à bouger. Mais qu'est-ce qu'il se passe ?

J'ouvre brusquement les yeux, et me relève en un mouvement, le souffle saccadé et le cœur prêt à exploser. Je m'agrippe à mon canapé, pour bien me persuader que je suis chez moi. C'était un rêve. Je respire lentement, tentant de me calmer, et pose la main sur ma poitrine. Je tremble encore, brûlante. Ça avait l'air si réel... Je fixe un instant la paume de ma main, imaginant avec naïveté y trouver le petit objet que la femme m'a tendu. Qui était-elle ? Une pensée complètement folle passe dans mon esprit, mais je la chasse en secouant la tête. Non.