Chapitre 4 - Début

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Point de vue de Lucas

- Bonjour Lucas.

- Bonjour Franck. Quel bon vent t'amène? grommelais-je.

- Je vois qu'on est de bonne humeur. Je suis venu voir si tu voulais participer ou au moins assister à la séance de l'après-midi.

- J'ai pas envie de parler.

- Et ben, qu'est-ce qui ne va pas?

- Tu me poses vraiment la question? Franchement qu'est-ce qui va? Je suis coincé dans un lit sans savoir me servir de mes jambes au lieu d'être sur le terrain à me rendre utile. J'en ai marre.

Ma seule envie pour l'instant est d'abattre mon poing contre le mur. Une telle colère réside en moi que ma respiration est saccadée, mes dents sont serrées et mes poings empoignent convulsivement les draps.

- Tu sais ce qui pose vraiment problème? Tu restes seul ici et tu rumines tes idées noires. Tu crois que ça me plaît d'être dans ce fauteuil? Je me suis battu toute ma vie pour défendre les autres et du jour au lendemain je pouvais à peine m'occuper de moi. Au début, je réagissais comme toi jusqu'à ce qu'on me fasse comprendre qu'il fallait que j'avance et que je m'ouvre. Les gens ici sont vraiment super mais il faut leur laisser une chance. Je vais te dire encore une chose: si je commence à sortir de ce tas de ferraille sur roulettes, c'est grâce au soutien de toutes les personnes présentes, qu'elles fassent partie des patients ou du personnel.

- Si tu le dis, lui répondis-je du bout des lèvres.

- Viens jeter un coup d'œil, ça ne coûte rien et tu constateras par toi-même à quel point ça peut faire du bien. Si tu ne te plais pas, les infirmiers te ramèneront dans ta chambre.

- Pourquoi tu fais ça pour moi?

- Parce que si personne ne l'avait fait pour moi, je ne serais plus là pour en parler.

- Je vais y réfléchir.

- Je ne te demande que ça. Je te laisse mais j'espère te voir tout à l'heure.

Il s'en va me laissant seul avec mes pensées négatives. Je balance un des oreillers qui se trouvent à mes pieds avec une telle force que la taie s'ouvre ne calmant ma rage que partiellement. Me défouler m'est impossible depuis ce lit. Avant, la course à pied ou la boxe m'aurait servi d'exutoire mais j'ai beau me creuser la cervelle, aucune solution n'apparaît comme par magie. Même la télévision avec ses programmes débiles ne parvient pas à me changer les idées et pourtant qu'est-ce qu'on peut trouver comme conneries à l'heure actuelle! Mes réflexions se perdent jusqu'à en venir à la visite de Julien. Il m'a expliqué ce qu'était le projet «Correspondance» en long et en large tout en insistant sur les choses positives que cela devrait m'apporter. Il m'a également précisé que je pouvais toujours refuser de répondre. Je ne sais pas si je dois y participer ou non. D'un côté, ce n'est pas ma tasse de thé d'écrire mais d'un autre, le fait de pouvoir discuter avec un inconnu peut me faire le plus grand bien. Il sera encore temps d'aviser à la réception de la première lettre.

Pour le moment, un autre choix se pose: aller ou non à cette séance de «paroles». Je ne peux pas être dans un état pire que maintenant et comme me l'a dit Franck, il n'y a aucune obligation d'y participer. Toujours sur les nerfs, j'appuie sur le bouton d'appel. Cinq minutes plus tard, l'infirmière de service arrive.

- Vous avez besoin de quelque chose Lucas?

- Je t'ai déjà dit de me tutoyer Rose.

- Je sais mais je n'y arrive pas. Je vais faire un effort promis, me dit-elle en souriant. Alors, pourquoi m'as-tu appelée?

Lettres inavouablesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant