CHAPITRE 9 : REFLET

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2600 après-JC,

Lorsque les voyageurs émergèrent du portail, le prince de Zodiac en tête de file, ils se retrouvèrent face à une scène déroutante. Devant eux, des dizaines de miroirs étaient dressés en rangs serrés, leurs surfaces polies renvoyant une myriade de reflets. Ces miroirs formaient un labyrinthe de glace scintillante, un passage entre les mondes où chaque surface semblait vibrer d'une énergie étrange et inquiétante. Les couloirs interplanétaires contenaient souvent des pièces comme celle-ci, où la réalité elle-même semblait se distordre. À ce moment précis, tous les miroirs reflétaient une seule et même silhouette.

C'était la même figure que Lorelëy avait déjà rencontrée lors de sa première confrontation avec le miroir, ce reflet troublant qui n'était pas vraiment elle, mais une version d'elle-même transformée par des forces qu'elle ne comprenait pas encore. Les autres membres du groupe passèrent à côté des miroirs sans prêter attention, mais Lorelëy fut captivée, comme ensorcelée par ce reflet qui semblait avoir sa propre volonté.

Cette salle n'était pas ordinaire. C'était une galerie réservée aux entrées spéciales, conçue pour offrir une discrétion totale à ceux qui devaient passer inaperçus. Les miroirs servaient de gardiens silencieux, scrutant et évaluant chaque âme qui osait franchir leur seuil. Cependant, quelque chose d'inquiétant se produisait. Le reflet de Lorelëy ne se contentait pas de la renvoyer son image. Il la fixait intensément, ses yeux brillants d'une lueur étrange, presque malveillante. Ce n'était pas un simple jeu de lumière ou d'illusion. Ce reflet avait une vie propre.

Soudain, le reflet fit un geste, levant une main spectrale et l'invitant à s'approcher. "Viens à moi, Lorelëy," murmura-t-il d'une voix à la fois douce et dure, résonnant dans l'esprit de la jeune femme. Il ne s'agissait plus d'un simple écho de ses pensées. C'était un appel, un ordre masqué sous une invitation. Le ton était à la fois séduisant et impérieux, comme si une force cachée cherchait à la tirer de l'autre côté, dans un endroit où les règles de la réalité étaient différentes.

Les autres n'avaient rien remarqué. Gaël continuait d'avancer, indifférent à la lutte intérieure qui tourmentait Lorelëy. Layla, plus sensible à l'aura de sa compagne, s'arrêta un instant, sentant le changement dans l'air, mais ne put percevoir l'ampleur de ce qui se passait. La tension montait, palpable, alors que Lorelëy sentait une pression invisible sur ses épaules, l'incitant à obéir à cet appel irrésistible.

La blonde, ignorant toujours qu'elle était Lorelëy et se croyant être Mina, sentit une attraction irrésistible vers la glace scintillante devant elle. C'était une force qu'elle ne pouvait expliquer, un appel profond au-delà des souvenirs qu'elle possédait. Chaque pas qu'elle faisait en direction du miroir semblait la rapprocher d'une vérité cachée, d'un passé qu'elle avait enterré si profondément qu'il en était devenu étranger. Pourtant, malgré l'amnésie qui la rongeait, quelque chose en elle savait. Une partie d'elle, encore endormie, reconnaissait ce lieu, cette sensation.

Avec une étrange assurance, presque mécanique, Mina—ou plutôt Lorelëy—posa sa main sur la surface glacée du miroir, là où son reflet l'attendait, immobile, mais vivant. Le contact, froid et familier, déclencha une réaction immédiate. Une douleur perçante, semblable à des aiguilles enfoncées sous sa peau, surgit dans tout son corps. Elle porta instinctivement ses mains à ses tempes, comme si cela pouvait apaiser l'intense pression qui montait dans son crâne.

C'est alors que les visions commencèrent. D'abord floues, presque des impressions plus que des images, elles devinrent rapidement plus nettes, plus claires. Des fragments de souvenirs se déversaient en elle comme une inondation incontrôlable : des hurlements stridents perçaient l'air, des voix aiguës d'enfants ou de créatures terrifiées, le clapotement visqueux du sang se répandant sur des surfaces glacées. Elle voyait des éclats de glace partout, un palais majestueux en ruines, dévasté par des forces qu'elle ne comprenait pas encore. Ce chaos, ce désastre, semblait l'appeler, lui rappeler une identité qu'elle avait perdue. Tout était trop intense, trop soudain. Son souffle devint erratique, saccadé, chaque inspiration semblant lui échapper comme si l'air lui-même refusait de pénétrer ses poumons.

LORELËYOù les histoires vivent. Découvrez maintenant