ACT2 CHAPITRE 7 : COMPASSION

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2600 après-JC,

Une odeur de décomposition et de brûlé flottait dans l'air, s'accrochant aux vêtements des voyageurs comme une étreinte glaciale et oppressante. L'atmosphère, saturée de salissure et de miasmes, semblait presque tangible, une texture souillée qui s'immisçait dans chaque respiration et chaque mouvement.

La nuit calme, autrefois douce et sereine, se transformait désormais en une scène de cauchemar. Les silhouettes vacillantes des corps pendus, les visages déformés par l'agonie et l'indifférence de la mort, rendaient le paysage particulièrement lugubre. Les voyageurs, ébranlés par ce spectacle, se trouvaient confrontés à une réalité aussi brutale que désespérée. Leur querelle sur la destination finale avait été instantanément balayée par cette vision atroce, et les discussions furent rapidement étouffées par l'horreur collective.

Lorelëy, secouée par des frissons incontrôlables, croisa les bras sur sa poitrine dans une tentative désespérée de se réchauffer. Malgré la fraîcheur mordante de la nuit, elle savait que l'odeur de bois brûlé, perceptible au loin, n'était pas le fruit de son imagination. La présence d'un feu, quelque part dans le village, représentait une opportunité précieuse pour réchauffer leurs corps et repousser le froid pénétrant. Cependant, la peur persistante que ce feu puisse être utilisé comme un instrument de cruauté, pour incinérer d'autres Hybrides en fuite, plongeait Lorelëy dans une angoisse encore plus profonde.

Les humains, par nature, éprouvent une aversion instinctive envers tout ce qui déroge à l'ordinaire. Ils rejettent les différences, que ce soit sous la forme d'autres espèces, races ou ethnies. Les Hybrides en sont un exemple flagrant : porteurs de mélanges d'ADN variés, incluant ceux des premiers Aliens, dont la cruauté avait causé la mort d'innombrables humains.

« La petite Lorelëy a froid. Nous devrions chercher une auberge ici. » déclara le prince de Zodiac avec une expression de neutralité calculée.

Le prince de Tershia et Lorelëy se tournèrent immédiatement vers lui, leurs visages trahissant à la fois l'étonnement et l'incompréhension. L'intervention de « la petite », habituellement d'un calme glacial, ajoutait à la tension palpable.

« Premièrement, veuillez cesser d'utiliser le terme "petite" pour me désigner ! » Lorelëy ponctua ses paroles d'un geste emphatique, levant d'abord son pouce puis son index. « Deuxièmement, nous ne pouvons pas simplement nous imposer chez des humains de cette manière ! Et troisièmement, si nous ne faisons pas attention, nous risquons de nous faire exterminer sans même avoir le temps de nous défendre. »

Gabriel, tout en partageant le même sentiment de désaccord, choisit de garder le silence, conscient que toute tentative de contre-argumentation serait vaine.

Visiblement exaspérée, Lorelëy maintint son majeur levé en direction de Gaël, son geste chargé de défi et de frustration. Gaël, quant à lui, se raidit sous l'irritation croissante, déconcerté par l'attitude imprévue de la deux-centenaire, qui osait remettre en question ses décisions et ses intentions. Avec une calme détermination, Gaël posa doucement sa main sur celle de Lorelëy, dégageant son geste intrusif de devant son visage. Il regarda la jeune femme d'un air parfaitement imperturbable, avant de se lancer dans une imitation qui mêlait sarcasme et exagération :

« Primo : j'exerce ma liberté d'expression, tout comme "Il" m'en a fait usage. » Sa voix, imitant celle de Lorelëy, résonnait avec une précision moqueuse, tandis qu'il mimait ses gestes avec une emphase dramatique. Ses doigts se levaient et s'agitaient dans les airs, chaque mouvement accentué pour souligner l'ironie de la situation.

Il poursuivit avec une gestuelle théâtrale, exagérant chaque mot :

« Deuzio : je ne m'impose pas, je ne m'invite pas, puisqu'Ardigan et toute sa composition en est notre possession. » Il tourna légèrement la tête et leva les yeux au ciel, comme s'il se moquait ouvertement des objections. Ses mains décrivaient des cercles en l'air, comme pour balayer les arguments de Lorelëy.

LORELËYOù les histoires vivent. Découvrez maintenant