Chapitre 15

680 62 79
                                    

Mardi, 28 mars 2017

Je réponds au sms de Lola qui m'insurge de visionner le dernier épisode de Outlander.

Elle l'a regardé sans moi, alors que nous nous sommes juré de regarder la série ensemble. Elle raffole de l'adaptation de la saga littéraire autant que moi, mais croit que tous les Écossais sont aussi sexy que le personnage principal masculin, Jamie Fraser. Elle serait déçue si elle m'accompagnait un jour en Écosse. Les grands roux musclés ne courent pas les rues !

Après avoir fourré mon téléphone dans ma poche, je relève la tête et surprends Mrs Styles. Fidèle au poste, elle est coincée un peu plus loin dans le compartiment, entre des enfants qui hurlent plus qu'ils ne parlent.

Je lui fais signe de la main, mais elle me rend mon geste avec un certain agacement. Elle perd finalement patience et demande à la mère de calmer ses enfants. Je ne sais pas ce que cette dernière leur donne au petit-déjeuner. En tout cas, ils sont plein d'énergie. Le plus jeune grimpe à l'une des barres comme un petit ouistiti, et je rêve à l'instant qu'il s'étale par terre ! La mère est aussi mal éduquée. Elle répond de manière agressive à Mrs Styles.

Notre calvaire ne fait que débuter. Je me sens serrée au milieu des corps qui se faufilent tandis que les portes du métro se referment. Pour couronner le tout, une personne me marche — ou plutôt, m'écrase — le pied.

— Excusez-moi, Jo.

Je fais volte-face et remarque Chris qui se presse dans mon dos. Il se tient à la barre au-dessus de nos têtes, le torse penché sur moi. Il me domine légèrement de son mètre soixante-quinze.

Je me retourne pour être face à lui. Il arbore une expression contrariée.

— On dirait que tout le monde s'est levé en retard !

Il ne fait qu'acquiescer et essaie de regarder ailleurs, mais il jette quelques coups d'œil en contrebas. Sur moi. La rame freine d'un coup sec, et pour ne pas perdre l'équilibre, je m'accroche à son torse. Il est doublement gêné lorsque mes mains glissent sur ses épaules.

— Pardon, lui chuchoté-je.

— Ce n'est rien. Vous n'avez pas à vous excuser de votre maladresse.

— Pardon ?

Il pouffe, satisfait par ma réaction piquée au vif, alors que son regard s'ancre au mien. Hypnotisée par la lueur qui se reflète dans ses iris, je réponds à son sourire taquin. 

Il se moque de moi. Depuis le début, il ne fait que me taquiner.

— Vous avez terminé votre livre ?

Il hoche la tête, pas plus bavard qu'en général.

Je repense au soir du match durant lequel il me parlait sans barrière. Il blaguait avec moi et n'était pas aussi coincé. C'est ce qui m'a incitée à poser mes lèvres sur les siennes... Je pensais qu'il n'y avait plus rien qui nous séparait, mais je m'étais trompée.

Cet homme a besoin de temps pour être apprivoisé. Il doit être travaillé au corps.

— Il vous a plu ?

Le sourire qu'il m'adresse dévoile ses fossettes asymétriques. Celle de droite est plus marquée que celle de gauche.

— Oui, beaucoup.

— Étrange ! Je n'aurais pas cru ça de vous.

Il me porte enfin toute son attention.

Nos regards ne se quittent pas. De l'extérieur, on pourrait croire que nous flirtons. Nos bustes se frôlent à chaque respiration, et chaque personne qui nous bouscule pour sortir nous rapproche un peu plus. 

Victoria Line (T1 de Thistly Heart)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant