dix-sept

3K 343 43
                                    

Je ne savais toujours pas où se trouvait mon livre, celui que je lisais dès que j'avais du temps. Ça faisait quelques semaines que je n'avais plus le temps de lire et comme en cet après-midi, je n'avais rien à faire et personne à voir, j'ai repensé à cet ouvrage qui me captivait tant. Il avait une couverture noire et bleue, je m'en souvenais bien et la frustration me gagnait au fur et à mesure que je fouillais sans pouvoir mettre la main dessus. J'étais ridicule, à enchaîner les jurons  rampant sous mon lit en espérant le déterrer de sous tous mes vêtements qui s'entassaient dessous.
Qui a dit que j'étais ordonné? J'en donnais justement l'illusion en cachant mes fringues sous mon lit.

Il n'y était pas non plus. Et pour une fois, je mis tous mes vêtements accumulés dans la machine à laver, sans manquer de jurer évidemment. Ça allait me prendre une éternité à étendre et plier mais au moins, j'y verrai plus clair. Je me mis sur la pointe des pieds pour atteindre l'étagère où se trouvait la lessive et à côté de cette dernière...

-J'y crois pas... Quel imbécile...

Mon bouquin à cause duquel j'ai entièrement retourné ma chambre était vraiment dans cette foutue buanderie. J'aurais dû me souvenir que je passais mon temps sur cette chaise à lire pendant que la machine tournait. Je me maudissais et faisais démarrer la machine avant de ranger en intégralité ma chambre, chose que j'étais capable de faire uniquement lorsque j'en avais la volonté.

Une fois dans le salon, je m'effondrai lourdement sur le canapé en laissant échapper un soupir d'aise extrêmement bruyant, au point où j'étais embarrassé.
Peu importe, je pris le livre, reprenant là où je m'étais arrêté, et me remémorai immédiatement l'histoire. Je m'y étais replongé, visulalisant à la perfection chacune des scènes dépeintes par l'auteure, immergé dans chacune des émotions éprouvées. Je m'abreuvais des magnifiques chapitres que je laissais me dépasser, engloutissant ces lignes, mes propres réactions se faisaient entendre entre ces murs de silence. J'étais muet, j'étais immobile, mais toute la vie était dans mon esprit, naissant en son cœur telle une jonquille bleue; fictive mais splendide, dont les pétales se bousculaient tout comme mes sentiments.

On sonna à la porte. Je posai le livre sur la table basse. Qu'est-ce qu'il faisait ici? On avait pourtant convenu qu'on ne se verrait pas aujourd'hui puisqu'il n'y avait rien à faire excepté les révisions. Mais j'en doutais fort.

J'atteignis la porte et l'ouvris.
C'était Renjun. Sourire aux lèvres. Il entra, pour une raison que j'ignorais encore, toujours avec ce sourire satisfait. Il s'installa dans le canapé.

-T'as des choses à me raconter. affirma-t-il.

Cette phrase aussi effrayante que le "Il faut que je te parle" qu'il arrivait à ma mère de m'envoyer.

-Quoi? demandai-je, complètement perdu, m'asseyant également sur le canapé.

Au moment où ses yeux se levèrent au ciel, je craignis le pire. C'était la première fois qu'il venait à l'improviste chez moi mais je ne pouvais pas lui en vouloir; je l'ai toujours connu compulsif et ça ne sera probablement pas la dernière fois. Après tout, je n'avais pas touché mon portable depuis que j'étais rentré du lycée, je ne pouvais pas savoir s'il avait annoncé sa venue ou non.

-Bah, ça se passe bien avec l'autre Lee ou est-ce que vous passez votre vie à vous taper dessus?

J'expirai bruyamment, les yeux fermés avant de retenir un juron.
Je crois que j'ai beaucoup trop juré aujourd'hui.

-Pourquoi tu m'as pas juste appelé pour me dire ça? J'vais être obligé de te proposer à boire maintenant... me plaignis-je dans un faux cynisme.

Il éclata de rire, retira ses chaussures et s'assit en tailleur confortablement adossé en biais.

-Oh oui je veux bien un truc à boire, c'est trop gentil de proposer! plaisanta-t-il. J'veux bien une bière!

Alors que je soupirais en me dirigeant vers la cuisine, je me retournai à mi-chemin, scandalisé.

-J'ai une gueule à boire de l'alcool?! m'offusquai-je, puis je me souviens qu'il devait très certainement plaisanter. J'vais te servir un sirop de fraise, s'pèce d'ivrogne!

Fulminant tandis que cet imbécile se tordait de rire, je dosai le sirop avant de compléter le verre avec de l'eau glacée. Il me remercia avant d'en déguster quelques gorgées.

-En vrai j'ai essayé six fois de t'appeler mais t'as pas décroché une fois alors tu me laissais pas le choix.

-Si, t'aurais juste pu attendre jeudi puisqu'on a éco ensemble. dis-je en lui piquant une gorgée.

Il haussa les épaules avant de me reprendre le verre des mains et de continuer de siroter tranquillement mon sirop favori.

-Du coup, t'as pas répondu, ça se passe comment?

J'inspirai silencieusement. Je ne devais pas en dire trop et je le savais. Il allait falloir que j'improvise et que je dise les choses telles qu'elles étaient, une collaboration ordinaire; il n'avait ni besoin de connaître le sujet de nos discussions, ni besoin de savoir ce que je pensais de tout ça.

-Y'a pas grand chose à dire. On bosse, c'est tout. Je lui ai déjà expliqué quelques trucs, on s'est fait réciter l'anglais. Après la seule fois où on a discuté, c'est quand on a fini plus tôt, on est sortis marcher et on a parlé un peu.

Il a fait une expression excessivement surprise, comme s'il était étonné d'apprendre qu'il savait parler. En même temps, il était vrai qu'il ne l'avait jamais vu ne serait-ce qu'ouvrir la bouche.

-Eh c'est un gars tout le monde. mentis-je. Il a une langue et il parle.

-Il parle plus que moi?? demanda-t-il en pointant un doigt scandalisé vers sa poitrine.

J'éclatai de rire, décalant mon livre pour étendre mes jambes sur la table basse.

-Personne ne parle plus que toi. le rassurai-je.

À peine un quart d'heure plus tard, il reçut un message de sa mère qui l'attendait devant et il dût partir, me laissant seul avec mon livre que j'avais complètement oublié durant ces grosses dizaines de minutes. Cette fois-ci, je le rangeai à sa place sur une étagère.

Vingt minutes, Renjun m'envoya un message expliquant qu'il s'était fait engueuler par sa mère parce qu'il était parti de chez lui sans prévenir mais qu'en apprenant que c'était chez moi qu'il était allé, elle avait immédiatement arrêté de lui en vouloir. Je riais, surtout en lisant sa conclusion hilarante.

"En gros, le jour où je fugue, c'est chez toi que je viens"

Je lui répondis: "Oui mais ta mère te retrouverait immédiatement du coup"

Qu'est-ce je m'ennuirais sans Renjun, honnêtement.

__________

Ma rentrée étant le 17 septembre, je ne serai plus capable de publier un chapitre par semaine, mais j'essaierai quand même de publier le plus possible: deux chapitres ou un si vraiment j'ai énormément de travail (par semaine)

Merci à tous ceux qui lisent votent et commentent je vous aime <3

(My children)

Last Row || nominOù les histoires vivent. Découvrez maintenant