trente

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Finalement, on avait fini par terminer ce satané programme de maths, dans la bonne humeur et en s'apportant l'aide dont chacun avait besoin.
Il faisait assez froid chez lui et frileux comme j'étais, j'ai rapidement commencé à frissonner. Or, même en tentant d'ignorer la sensation, mes poils s'hérissant sur mes avant-bras ne pouvaient évidemment pas passer inaperçus.

Il leva les yeux, et je fis comme si de rien n'était, remplissant calmement les lignes de mon algorithme afin de le faire tourner convenablement. J'étais une bille en programmation, mais c'était du cours alors je recrachais juste ce que j'avais appris par cœur. Le lycée, c'était ce système déplorable là; du bourrage de crâne récompensé par un diplôme rassurant, mais inutile.

-T'as froid? demanda-t-il sans la moindre délicatesse.

Ce à quoi je n'osais bien évidemment pas répondre, faisant même semblant de ne pas avoir entendu la question alors que sur moi persistait son regard impatient.
Il me restait trois lignes à écrire dans mon algorithme et ce dernier serait achevé ainsi que tout le reste de ce programme de révision pour le devoir de Mercredi.

Est-ce que j'appréhendais l'accueil de ma mère à mon retour? Sûrement pas.
Elle pourrait réagir comme elle le voulait, me retourner la tête en me donnant la plus grande torgnole de l'histoire tout en sachant qu'elle n'avait jamais levé la main sur moi depuis ma naissance. Ça m'était égal, une simple gifle n'allait pas m'arracher une larme alors qu'une fracture n'a rien fait d'autre que de provoquer mon rire.

-Attends, je peux te passer un sweat s'tu veux, bouge pas.

Il avait déjà disparu dans le couloir sans m'avoir laissé une chance de répliquer et c'était malin de sa part pour arriver à ses fins puisqu'il connaissait à l'avance ma réponse s'il m'avait laissé la donner.
Je n'eus même pas le temps de bégayer un "pas besoin".

Il réapparut un instant plus tard avec un sweatshirt blanc sur l'épaule qu'il m'envoya en s'approchant de la table. Instinctivement, je tentai de l'attraper au vol mais étant doté d'autant d'instinct qu'un citadin à l'océan, le vêtement se retrouva aussitôt recouvrant mon visage. Ce qui le fit évidemment rire.

-Merci. marmonnai-je en retirant l'habit, imprégné de sa senteur.

Il avait fallu que je vienne en t-shirt comme un imbécile et maintenant je me retrouvais dans une situation infiniment embarrassante. J'enfilai le vêtement, remarquant une inscription blanche dans un rectangle rouge au niveau de la poitrine. Une inscription, une langue étrangère que ni lui ni moi ne saurions lire.

Au lieu de se rasseoir, il se dirigea vers les fenêtres de la salle de séjour ainsi que celles du salon qu'il referma une à une. Puis il revint se poser sur sa chaise, mon sourire ne pouvant plus rester invisible envers ces attentions. J'étais... J'ignorais comment je me sentais... Gratifié? Sous un regard bienveillant.

-J'ouvre tout le matin, c'est pour ça qu'il fait froid.

Qu'est-ce que je devais écrire à l'avant dernière ligne de mon algorithme déjà? J'avais complètement oublié et pourtant j'avais appris le schéma par coeur. Néanmoins, je posai la pointe de mon stylo sur la feuille pour relever le visage vers lui. Ça n'avait pas d'importance de toute façon. Je maîtrisais.

Il était le seul responsable de mes pertes de mémoire et d'assurance, de toute façon.

-Pourquoi tu fais tout ça pour moi. dis-je, un sourire qui avait du mal à disparaître sur les lèvres.

Ce n'était même pas un un ton interrogatif, et la force de poser des questions s'était volatilisée pour une raison que j'ignorais. Et pourtant ma tête en était remplie.
Il reprit sa calculatrice dont l'écran était chargé de formules interminables que je lui avais appris à rentrer  dans l'option programmation de l'appareil. Cela lui permettrait d'omettre sa mémorisation parfaite pour l'examen.

Last Row || nominOù les histoires vivent. Découvrez maintenant