Il est des moments dans la vie où tout se bouscule et les certitudes s'effondrent. Né d'un sentiment de sécurité et d'un projet d'avenir, le désir d'enfant est à la fois l'aboutissement de toute la mécanique reproductrice qui sous-tend les rapports entre sexes opposés et, en même temps, un recommencement de soi dans une nouvelle identité, une nouvelle existence. On devient parent. Notre enfant va nous prolonger, nous récidiver, nous sublimer, nous légitimer. Nous ferons de lui quelqu'un dont il sera fier, dont nous serons fiers, et qui sera fier d'être issu de nous. Fatalement, ça interroge sur ce qu'on est, d'où on vient et ce qu'on a à transmettre. C'est le moment idéal pour cristalliser : comprendre ses parents, dépasser les conflits filiaux, ou remettre au contraire en question et en cause un lien et une éducation qu'on a passivement acceptés.
Le rêve suivant fait directement suite au précédent, raconté ci-avant. Il semble influencé par l'interprétation du rêve qui venait d'être analysé et prolonger la réflexion sur celui-ci.
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Je suis tout d'abord avec quelqu'un - je ne me souviens pas qui - dans un centre commercial et, là-bas, je croise des gens que je connais : anciens amis, collègues qui ont démissionné. Ils étaient allés ensemble voir un château sur la Loire, je crois. Bref : je ne crois pas que ce soit une partie de rêve important, mais vu que c'est avec, je le pose là.
==> Rêve résolument tourné vers le monde et sa représentation, le tout orienté vers le passé. Ton monde est ici symbolisé par un centre commercial, autre lieu de tous les possibles matériels et, par extension, symboliques. Tu n'y es pas seul, ce qui te rassure, mais cet autre est sans importance réelle puisqu'il ne fait pas l'objet d'émotion ou de relations particulières ici. En revanche, le fait d'y recroiser les anciens démissionnaires montre que tu te projettes vers un passé pour mieux jouer à l'exploration des si : reprenant ces personnes évacuées de ta vie suite aux choix professionnels qu'ils ont fait, ils incarnent un autre chemin que tu aurais pu prendre - que tu pourrais prendre.
Ensuite, je suis avec un unique gars, dans une salle de classe. Il est sur son smartphone. Finalement, ce gars veut m'agresser : il me court après, j'essaie de m'échapper, mais il me rattrape et on commence à lutter. Un homme passe (qu'est-ce qu'il fait là, lui ?) et me dit qu'il va appeler les flics, mais qu'il ne peut pas m'aider. Je lui dis : "Oui, oui, je comprends." et on continue de lutter. Finalement, j'ai le dessus, et je dis à mon "ennemi" du moment : "j'ai envie de te frapper, là, tu vois ?" et je rajoute : "Mais non..." et je ne le fais pas.
==> Changement de lieu - autre lieu symboliquement fort car ancré dans ta mémoire de jeunesse : l'école, lieu de tes apprentissages et ton devenir d'adulte - : tu y es ici confronté à un autre hostile, qui semble se distinguer de toi par l'usage d'un smartphone. Là, l'interprétation peut être plurielle : l'écran joue le rôle de dérivatif te protégeant en captant l'attention et détournant l'agressivité, ou bien celui d'un séparateur inspirant l'agressivité ? Là, c'est flou. Comme ça se passe en classe, cela procède peut-être d'un mélange de souvenir scolaire sur fond de discrimination technologique ? L'autre qui passe n'est qu'un secours relatif, l'aide réelle ne pouvant provenir que d'un ordre extérieur supérieur absent - il n'y a donc que toi pour faire face. Tu t'en sors alors après la fuite par l'affrontement, que tu remportes, ce qui implique ici une reflexion sur l'attitude face aux obstacles : on ne fuit pas avec succès. Il faut faire face et se battre pour avoir une chance de l'emporter, ce que tu prouves ici, et tu choisis la voie de la miséricorde. Il s'agit d'une mise en scène de conflit où tu acceptes de devoir affronter le danger, le surmontes et le sublimes. Voilà un modèle très christique, voire chevaleresque, qui te met clairement dans une position avantageuse en terme d'estime de soi. S'agit-il de ta perception de toi-même ou d'une tentative de réparation, de compensation face à d'autres redditions ?
À ce moment-là rentre dans la pièce une armée de mouches. Je me tourne vers les fenêtres pour essayer de m'échapper. Les fenêtres sont étranges (avec un axe au milieu, et elles tournent - je pourrais dessiner le mécanisme), mais bref : je ne peux pas passer. Il pleut dehors.
==> Les mouches sont un insecte associé à la mort, à la putréfaction, éventuellement la saleté. En nuée, elles ne sont pas loin d'évoquer un fléau divin. Or, tu as un comportement digne de Jésus dans le passage précédent. Si c'est un châtiment divin, ce serait l'indice que tu te vivrais comme un croyant hypocrite. La nuée de mouches est aussi perçue dans la littérature fantasy et les croyances superstitieuses comme une incarnation du diable. Ainsi, on peut nourrir une interprétation radicalement opposée où tu es une incarnation de Jésus, un être pur, pourchassé par les forces du mal. La fenêtre, si elle ne présente pas une croisée, n'est pas à proprement un symbole religieux, mais c'est une échappatoire barrée, une issue vers l'air, la lumière, le ciel, dont l'accès n'est pas - encore - permis. Le basculement de la fenêtre, par ailleurs symbole de passage, peut souligner une métaphore de la mort à venir, pas encore actuelle, et qui permet l'accès à une dimension supérieure après la mort. La pluie, à l'extérieur, est un symbole ambivalent : salvatrice car mortelle pour les mouches et nourricière pour la vie, elle inspire pourtant la tristesse et rend l'extérieur hostile, insinuant l'idée d'un piège dans lequel tu es prisonnier.
Enfin rentre dans la pièce une fille, jolie et bien habillée (avec tailleur, sac à main et béret pour femme). Je me tourne vers mon ennemi et lui dis : "Arrête, tu vois bien qu'on est dans un rêve !!". Là, il me lâche et hoche la tête. Je vais voir la fille et, la prenant par le bras, lui dis (plutôt violemment) : "Bon ! J'en ai marre, là ! C'est quoi, le message (sous-entendu le message de ce rêve)? ". Et, là, un peu gênée, elle compte jusqu'à 3 et me dit : "Est-ce que tu ne t'es pas oublié toi-même ?"
==> Là, c'est patent que c'est un rêve qui vise l'introspection par l'analyse du rêve. Ta conscience fait un bras de fer avec ton inconscient, ce qui est probablement dû à ta rationalité qui ne supporte pas de se faire damer le pion par ton inconscient ^^ La jeune et jolie femme au style si impeccable combine plusieurs essences : féminité, responsabilité, pouvoir, autorité, légitimité, et pourquoi pas maternité à cause de l'alliance de tout ça. Le compte à rebours est étonnant. L'ordre et la manière d'énumérer peuvent être intéressants. La question finale, elle, entre en résonance avec le thème premier du rêve : le chemin de vie parcouru et les choix accomplis, les options privilégiées ou négligées, l'identité choisie.
==> Mis en corrélation avec ton autre rêve, je dirais que la crise de la quarantaine pourrait bien être plutôt une crise identitaire. Remettrais-tu en cause ce qui te constitue à l'aube de te reproduire dans votre enfant à venir ? Une manière de mettre en perspective ce que tu es au moment de transmettre tes valeurs ?
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Le fil d'Ariane
RandomParce que, quand on tourne en rond dans sa tête, on ne va plus nulle part... Voici mon petit cabinet virtuel pour vous aider à reconnaître votre Minotaure et trouver la sortie de votre labyrinthe intérieur : explications sur le fonctionnement psychi...