Depuis Freud, on sait que les bébés sont des obsédés sexuels, et que leur libido ne s'apaise pas, même avec une barbe blanche et un dentier ou un anus artificiel.
Néanmoins, on entendra ici l'amour comme cet élan de soi vers un autrui unique pour se faire des mamours et jouer à touche-pipi et, réciproquement, ce besoin viscéral qu'un autre que vos papas-mamans vous fasse des papouilles, notamment à des endroits que les papas-mamans n'ont pas le droit de tripoter. Donc, on débutera l'amour à l'adolescence pour des raisons de commodités arbitraires. Non, je ne veux pas d'ennuis avec la police, et non, vous n'avez pas le droit d'avoir une utilisation bilatérale - ou même multilatérale - de votre corps avant votre majorité sexuelle. 15 ans. Et pas sans capote, féminine ou masculine, ni contraceptif. Faut pas déconner. Fin de la parenthèse où je fais mes gros sourcils.
À l'adolescence, on intériorise plusieurs notions clefs :
- le temps passe.
- on va crever.
- maman et papa sont imparfaits, et peut-être même très cons.
- les licornes n'existent pas et le terrorisme se finance sur les Trump et autres Poutine.
- on est vraiment en train de niquer la planète (spéciale dédicace à HK et ses Saltimbanks)
- on se fait chier sans personne avec qui ôter son slip. Pire, on est atrocement triste d'être tout seul avec son kiki dans le soir tout noir.
Alors monte en nous une angoisse sourde. Certains la détournent en regardant du côté de la connerie : ben oui, quand on s'amuse à faire chier le monde, on évite de se regarder soi, parce que c'est moche, et on constate sa puissance aux nuisances occasionnées, et ça suffit pour kiffer. Mais les autres ? Ceux qui prennent cette saloperie d'angoisse visqueuse et glaciale en pleine gueule et qui s'en étouffent ? Ben ils en crèvent en pleurant leurs mères dans le silence de leur vide intérieur.
Alors ils appellent au secours de tous leurs pores, leurs ports ou leurs porcs, chacun selon ses propres moyens, et ils tirent leurs flèches à grappin dans tous les sens : quand on tombe, pas le temps de regarder à quoi on se raccroche. Et c'est là qu'on mûrit : en creusant le lit de ses échecs sentimentaux.
Inexpérimenté par essence, le jeune sait à peine faire ses lacets et exprimer par un guttural grognement ou un couinement hystérique s'il veut un steack-frites ou la nouvelle jupe Pimkie-ras-la-moule-trop-fraîche, toujours chacun selon ses propres moyens ; alors, établir le contrat social nécessaire pour bâtir un couple, écouter assez longtemps l'autre pour oublier son nombril, c'est compliqué. On va donc au plus simple, au plus pressé : on cherche sa paire de pecs ou de nichons en fonction de ses goûts, et on projette dessus tout son arsenal de fantasmes et de clichés romantiques, dans une créature digne de Frankenstein qui coud ensemble du Prince Charmant et du Booba, de la Petite Sirène et de la Clara Morgane.
Et il s'accroche, le bigorneau priapique, sur sa roche tétonneuse ! Et elle s'agrippe, la moule en chaleur, sur l'aiguille boutonneuse !
Sans plus se préoccuper des réalités : juste se shooter à l'impression d'amour.
Se gorger du sentiment d'être avec l'âme-sœur. Tant qu'il et elle ferment leurs gueules et n'ont rien d'autre à faire que de s'inspecter l'anatomie.
Mais le fantasme, ça tient pas la route sous les coups de crocs acérés de la réalité.
Alors on tire une autre flèche sur le béguin suivant, puis une autre, et encore une autre, et toutes vous reviennent en pleine gueule pour vous faire grandir de ces échecs.
L'humain apprend la gravité en tombant, et c'est ainsi qu'il s'élève avec légèreté.
On veut de l'amour, on en a besoin, et parce qu'on veut de l'amour, on projette son besoin avec son amour au moindre béguin. Et c'est tellement plaisant qu'on s'automystifie en alimentant sa petite mythologie amoureuse. Bref, on voit dans chaque béguin le seul et unique grand amour de sa vie. Alors que, en réalité, ce ne sont que des opportunités d'aimer et d'être aimés, qui ne peuvent se concrétiser que par la coordination des deux l'un vers l'autre.
C'est sincère : on souffre. On peut même traverser une dépression liée au manque d'amour et au sentiment de solitude. Mais on s'en remet très bien, pour peu qu'on continue d'avancer. Pour preuve, vous pouvez écouter mon Dernier message, qui n'est rien d'autre qu'un témoin de ce que j'ai été et que certains d'entre vous sont trop souvent dans l'isoloir de la foule, sans savoir qu'au détour de chacun des carrefours qui jalonnent notre vie sont tapis des bonheurs et des malheurs, des rencontres et des séparations, des réussites et des échecs.
C'est ça, la vie : des hauts et des bas, et du temps pour jouir et guérir.
Il y a aussi sur les réseaux sociaux un problème de posture narcissique propice à la mise en scène de l'exclusivité amoureuse à cause des conversations privées aux heures de l'intimité : il est chaud, le smartphone complice, dans la main de celui ou celle qui se confie sous ses draps à celui ou celle qui le ou la lit ! Bref, notre cœur nous joue des tours, et on est amoureux de l'amour. Un classique ! J'ai toute une partie de mon recueil de poèmes sur ça : vous vous y reconnaîtrez sans doute. Le recueil s'appelle Aubes et Crépuscules et, forcément, la partie, Égarements amoureux. 😜
Alors, si vous croisez Cupidon, enfoncez-lui arc, flèches et carquois au fond du derche, et dites-lui de notre part à tous que c'est bon, on se charge d'aimer et d'être aimés par nous-mêmes. Entre humains, après tout, on peut bien s'ouvrir les bras et le cœur, plutôt que les gorges et les veines, non ? Après tout, une langue, c'est pas juste fait pour coller des timbres sur les lettres de réclamation !
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Le fil d'Ariane
DiversosParce que, quand on tourne en rond dans sa tête, on ne va plus nulle part... Voici mon petit cabinet virtuel pour vous aider à reconnaître votre Minotaure et trouver la sortie de votre labyrinthe intérieur : explications sur le fonctionnement psychi...