35. Adieu

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Je suis assise entre Andrea et Val. Ma main est posée sur sa cuisse. Nous sommes tous les deux dans le même état depuis quatre jours. Nous ne parlons pas, personne ne peut nous toucher ou nous approcher. Alex a essayé je ne sais combien de fois de venir à moi mais je ne supporte rien ni personne. Le seul regard que j'ai croisé en quatre jours c'est celui de Val. Il n'était peut être pas aussi proche que moi de Gen mais il était son jumeau et à ce qu'on dit,  on perd la moitié de son esprit et de son corps dans ces cas là.

Toute la fratrie est assise sur ce même putain de banc dans cette foutue église ! Papa, maman et maintenant Gen ! La seule différence aujourd'hui , c'est qu'il nous manque un de nos frères à nos côtés. C'était à moi d'être dans cette caisse.
Après le coup de feu Andrea et Marco avait suivi la voiture même s'ils connaissaient déjà le propriétaire. Cet enfoiré de Dante Fardelli avait rompu les accords. Vexé d'avoir perdu, il voulait à la base s'en prendre à moi. Pourquoi ai-je mis ces putains de chaussures ? Pourquoi est ce que je me suis baissé juste à ce moment ? Si Gennaro est mort c'est uniquement de ma faute. Je ravale un sanglot pour ne pas exploser durant la messe. Val sent bien qu'il se passe quelque chose alors il attrape ma main et là sert fort.

Je n'en peux plus de tout ça ! Depuis tellement longtemps, il n'y a eu que des jours tristes pour écraser les quelques petits jours de joie que nous avons eu. Qu'avons nous fait pour mériter un sort aussi atroce ? Qu'à fait Gen à part se trouver au mauvais moment au mauvais endroit. Cette salope de Sam a bien évidemment joué son rôle là dedans. Elle était la taupe des Fardelli et est volontairement tombé dans les bras d'Andrea. Elle a disparue de la surface de la terre. Alex, Marco et Andrea sont à sa recherche en permanence mais elle n'a rien laissé derrière elle tout comme Dante. Ils sont introuvables. Ça aussi c'est de ma faute ! Elle était mon amie à la base. Comment ai-je fait pour ne rien voir ?

Alex me connaît par cœur et même si je ne parle pas il sait que je m'en veux. Il a beau essayé de me rassurer et me dire à chaque occasion que je n'y suis pour rien, cette petite phrase me revient sans cesse : « c'est toi qui était visée, c'était ta soirée, c'était ta copine et c'est ton frère qui est mort ».

Les larmes coulent sur mes joues et je me sens impuissante physiquement et moralement. Je n'y arrive vraiment plus.

Après le cimetière, quelques amis proches sont venus à la maison. Andrea a fait un petit discours émouvant et a tenu à faire passer quelques photos représentant Gen. La dernière photo est celle de mon anniversaire sur la plage. Ce jour là, je lui faisais la tête. Mon cœur se serre et je me lève précipitamment de ma place. Je n'arrive plus à respirer. Ma poitrine est comprimée et je n'arrive plus faire passer l'air. Je cours à la porte d'entrée et je prends une profonde respiration.

Alex arrive juste derrière moi.

- Emi ! Viens je t'en prie !

Il me prend de force dans ses bras mais je ne peux pas lui répondre. Mon corps refuse de répondre à son étreinte. Voyant que je ne réagis pas, il me dit :

- Tu es sûre que tu te sens bien? Je comprends ce que c'est. Tu sais qu'il était comme un frère pour moi ! Tu ... enfin vous êtes aussi ma famille, Emi ! J'ai besoin de toi et tu as besoin de moi ! Alors me laisse pas !

Il resserre son étreinte encore puis me libère.

- Je vais te chercher un verre d'eau, je reviens.

Je m'assois devant la porte sur notre petit banc. Avec maman, on attendait toujours les garçons, ici. Et d'ailleurs, celui que j'attendais toujours le plus c'était Gen. Quand je pense que je ne le reverrais jamais.

- Je peux te déranger juste une minute.

Je relève la tête et je vois Dwayne.

Oh mon dieu, comment puis-je le regarder en face. J'ai perdu mon frère, mon confident mais lui il vient de perdre l'homme de sa vie ! Je me relève rapidement et même si je ne le connais pas je le sers dans mes bras.

- je suis désolée.

Ce sont les seuls mots que j'ai réussi à sortir en quartes jours.

- Tu n'as pas à t'excuser Émilia. Gen savait dans quoi il se lançait tu sais. Si je suis là aujourd'hui, c'est pour te dire au revoir. La seule chose qui me retenait à L.A c'était lui. Je vais rentrer dans ma famille près de New York. Je tenais à te dire que ton frère était très fière de toi et que tu étais celle de sa famille à qui il tenait le plus avec Val. Putain ! J'arrive pas à croire qu'il ne soit plus là ... jamais.

Sa voix se brise et ses yeux sont humides.

- Il m'a toujours dit que le jour où il lui arriverait quelque chose, il fallait que je te remette ça ! Si tu veux mon avis, lis la toute seule.

- Pourquoi ?

- Parce qu'il n'y a qu'une seule lettre ! Une seule pour toi ! Et qu'il aurait très bien pu demander à Val de te la remettre.

- Je vois ! Dwayne, tu n'es pas obligé de partir, si tu veux tu peux rester avec nous et ...

- Emi ! La seule a qui Gen en avait parlé c'était toi ! C'est pas comme si vous étiez ma famille. La seule personne que j'avais c'était lui !

- Je sais ! Et je suis désolée pour ça aussi ! Tu peux compter sur moi si tu as besoin...

- Ne t'inquiète pas pour moi ! Ca va aller ! Prends soin de toi surtout.

Je me rassois sur mon banc tout en pensant à la tristesse et la déchirure que dois ressentir Dwayne. Si j'avais perdu Alex, je ne sais ce que j'aurai fait ! Je ne sais même quoi faire aujourd'hui face à tout ça!

- C'était qui ?

Je sursaute ! Je camoufle la lettre de Gen dans la poche arrière de mon pantalon.

- C'était Dwayne, c'était le copain de Gen.

Alex s'assoit à côté de moi et me prend dans ses bras.

Secrets de familleOù les histoires vivent. Découvrez maintenant