12 . Amour impossible

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Il n'a même pas pris la peine de me répondre. Cela fait plus d'une heure qu'il a lu ce foutu message et rien. Je scrute frénétiquement mon téléphone toutes les minutes mais l'écran reste noir. Je ne comprends pas son silence et cela me rend complètement cinglée. Mon sang bout dans mes veines. Je pensais que ce message permettrait de réinstaurer le dialogue entre nous, qu'il allait s'excuser et me dire qu'il était contraint de rompre avec moi parce que Gen l'y avait forcé. Mais non. Il reste dans un mutisme profond qui va finir par m'achever. L'incompréhension a été remplacée par la colère. Je lui en veux de me faire ça, de me laisser seule, de ne me donner aucune explication logique à tout ce bordel. Les sous-entendus de Gen me laissent perplexe et tournent en rond dans mon esprit. A quoi faisait-il allusion lorsqu'il parlait de secrets ? Je sors de mon état de réflexion quand j'entends la jeep d'Andréa démarrer.

Le dimanche est une journée particulière car mes frères vont à une sorte de club et se réunissent avec d'autres passionnés de voitures. C'est une tradition qu'ils perpétuent depuis la mort de papa.

J'avais huit ans lorsque il est parti. Andrea, lui, en avait seize. Marco quatorze et les jumeaux, onze. Ils travaillaient déjà tous après l'école avec notre père. Lorsqu'il a subitement disparu, Andréa a simplement honoré les contrats qui étaient en cours, puis progressivement, il a repris l'affaire. Marco et les jumeaux, l'ont rejoint dès qu'ils étaient en âge de travailler. Ils ont tous les quatre réussi à sauvegarder le MGM, « Motolese Garage Mecanic ». Mes frères font vivre le souvenir de notre père à travers toutes les petites habitudes qu'il avait jadis. Le garage, le club du dimanche, cette belle et grande famille soudée.

Chaque dimanche, un de mes frères reste avec moi, tandis que les autres se rendent ensemble à l'autre bout de la ville. J'ai tenté à de nombreuses reprises de leur faire comprendre que j'étais en âge de rester seule, mais même à vingt ans,  il faut croire que me laisser une journée entière, seule dans cette maison,  est impossible pour eux. Une fois, j'ai demandé à les accompagner à une de leur fameuse rencontre mais ils ont prétexté que les femmes y étaient interdites. J'ai vite compris que je n'étais pas la bienvenue et j'ai cessé de me battre car je savais pertinemment que je n'aurai jamais gain de cause.

Aujourd'hui, celui qui est de baby-sitting c'est Marco. Il doit sûrement être encore au lit car la maison est bien calme.

Je me décide à sortir de ma chambre. Je descends et j'en profite pour ranger et démarrer une lessive. Étant la seule femme de la maison, si je ne passais pas derrière eux, je pense que notre résidence serait une zone sinistrée interdite au public et que mes frères vivraient probablement en tenu d'Adam. Je suis certaine, qu'à part Gen, aucun d'entre eux ne sait faire fonctionner la machine à laver. Mais pour une fois, je ne vais pas m'en plaindre car cela me fera penser à autre chose . Si je continue à réfléchir de la sorte, mon cerveau va très certainement exploser.

Je suis dans la buanderie quand j'entends une fille rire. Je passe la tête par la porte et y vois Marco raccompagner sa conquête de la veille. Il passe nerveusement sa main dans ses cheveux blonds et baisse les yeux pour ne pas croiser le regard de cette fille qu'il ne rappellera jamais. Lorsqu'il claque la porte et qu'il se débarrasse de cette pauvre femme, son visage se détend. Soulagé, il éjecte tout l'air qu'il retenait.

- Toi là-haut, je t'interdis de rire, tu m'entends.

J'explose de rire avant d'imiter une groupie à la voix mielleuse:

- Marco, et si on prenait le petit déjeuner ensemble ? On pourrait passer la journée tous les deux, toi et moi. Oh et aussi, on pourrait se marier et faire des enfants.

Je cligne des yeux en prenant un air de bimbo. Marco rit à gorge déployé. Je sors de la buanderie pour le rejoindre et je lui donne une tape sur l'épaule.

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