Chapitre Quatre

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Un acier dur

Ce qui était sûr, c'était que sa déduction n'avait pas loupé.

À l'aérogare de la Vallée, qui était en vérité un hangar de ferraille et de poutrelles de fortune, était enseveli sous le crépitement des gouttes. C'était le genre de pluie fine et serrée parfaitement désagréable qui pouvait durer des heures. Cela ajoutait de la grisaille à l'atmosphère, déjà sous pression et impatiente de la famille de Laïs, qui attendait sous imperméables et parapluies.

Laïs ne fuyait jamais devant une situation embêtante. Enfin la plupart du temps, elle essayait de la résoudre le plus tôt possible, pour éviter qu'elle ressurgisse plus tard dans son existence, sans prévenir. Mais là, elle devait avouer, qu'elle n'était plus qu'une petite boule de nerfs.

Elle avait l'impression d'entendre chaque détails. Les femmes qui se plaignaient des vols de parapluies, les respirations sifflantes des messieurs en retrait et les enfants qui jouaient dans la boue. Laïs se demanda à quel moment, avait-elle réellement perdu le contrôle de sa vie.

À vrai dire, elle était venue de mauvaise humeur, mais la pluie l'avait calmé. Maintenant, elle était juste stressée et parfaitement nerveuse. Les ouvriers se préparaient pour la venue du dirigeable qui était en retard. À croire que tout était fait, pour que cela se passa plutôt mal.
Laïs sous son parapluie, son canotier et son imperméable, était encerclée respectivement de, sa mère, sa soeur et d'une Doyenne.

Sa mère était un reflet de sa soeur en plus âgée et moins jolie. Rousse, grasse, rougeaude et toute poudrée, avec un énorme chignon sur le crâne et une robe jaune poussin. Charles - l'époux d'Agathe - surveillait le petit dans ses bras et les enfants -dont Hector - qui s'enfonçaient dans les flaques. Le père de Laïs, lui, était écrasé derrière sa femme imposante.

Quant à la Doyenne, elle était là, sinistre et frippée, sous sa mantille et sa robe noire. Laïs fulminait rien qu'en la voyant, alors elle s'obligeait à regarder l'horizon, pour ne pas hurler sa rage intérieure.

Nom d'un écrin, elle était beaucoup trop tendue ! Elle devait se détendre, si elle ne voulait pas exploser.

Elle se concentra sur ses botillons à boutons et remarqua, qu'elle était habillée à peut près semblablement à une cousine adolescente, d'une quinzaine d'années. Agathe avait raison, elle avait des goûts de fillette. Mais, c'était le dernier de ses soucis. Elle se sentait bien comme ça.

Il pleuviotait toujours et ce n'était pas près de s'arrêter.

  -Il en met du temps, bougonna sa mère, j'ai des festivités qui suivent, moi, après.

La Doyenne se réveilla enfin.

  -Tout vient à point, fille, tout vient à point...

Laïs la fusilla du regard, puisqu'elle ne pouvait pas faire autre chose de plus direct. La Doyenne se renfonça dans ses épaisseurs, son grand nez sortit de son écharpe comme le bec d'un corbeau. Laïs savait qu'elle avait refusé trois cousins, mais la punition était sévère et particulièrement injuste. Elle en voulait au Conseil des Doyennes.

Elle aperçut soudain le visage d'Agathe se pencher à deux centimètres du sien, comme sous une grosse loupe. Elle lui fit un grand sourire.

  -Tu dois être si excitée ! Protège-toi bien avec le parapluie, ne commence pas à jouer la gouttière.

Agathe remonta d'autorité son col.

  -Je vais bien. Grinça-t-elle.

Elle devait garder la tête haute, tant que la Doyenne était là et même après. Plus le temps de faire l'enfant. Mais au moment où, Hector s'accrocha à son imperméable, elle failli fondre en larmes. Mais, c'était sans compter lorsque celui-ci, s'écria.

LE REFLET DE LAÏS ━゙LA PASSE-MIROIR✔Où les histoires vivent. Découvrez maintenant