Chapitre Vingt-deux

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Une erreur de mémoire

Le fameux Renard la mena dans un couloir mal éclairé. Il semblait digne de confiance - s'il était l'ami de Gaëlle - mais Laïs beaucoup trop angoissée derrière ses paupières lourdes, ne pouvaient s'empêcher de tripoter son tisonnier plaqué contre sa cuisse.

Le domestique aux cheveux de feu s'arrêta et pointa une porte en bois qui semblait avoir cent ans. Laïs le fixa avec insistance.

  - Comment savoir que vous n'essayez pas de me piéger ? Je ne vous connais pas, quelque soit vos familiarités avec Gaëlle.

L'armoire à glace soupira et passa une main sur sa nuque. Ici, ça sentait la poussière en abondance.

  - Vous m'avez suivis jusqu'ici, madame.

C'était vrai, mais ça ne suffisait pas. Comment elle avait fait pour survivre toutes ces semaines ? Elle s'était faite discrète, silencieuse quand elle se déplaçait, elle ne nouait pas d'amitiés superflues.

Devant son silence et sa mine impassible, Renard fouilla dans les poches de sa livrée. Laïs se crispa, mais ce qu'il sortit acheva de lui faire confiance.

  - Gaëlle m'a dit que vous étiez quelqu'un de méfiant, madame. Elle m'a dit de vous montrer ceci si vous n'étiez vraiment pas à l'aise.

C'était une orange, ronde et parfumée qu'il tenait au centre de sa paume calleuse. Laïs abaissa sa garde.

  - Savez-vous ce que s'est ?

  - Non, Gaëlle m'a dit que vous comprendriez.

  - C'est le cas, reprit Laïs, merci beaucoup. Je n'ai rien à vous donner en échange...attendez, si.

Elle chercha dans ses larges poches sous ses jupons et sortit le dernier sablier qu'elle n'avait pas utilisé. Le vert. Doucement elle le tendit à Renard qui semblait abasourdi d'être remercié et récompensé d'une certaine manière pour avoir juste mené une Lady quelque part.

  - Merci... madame.

Laïs lui fit un tendre sourire.

  - Merci à vous Renard, pour votre bonté.

Puis elle se tourna, posa son gant sur la poignée et entra sans bruits dans la pièce. Lorsque la clanche cliqueta doucement, Laïs se mit accroupie pour passer le long du passage et arriva à l'intérieur d'une cheminée.

Heureusement, l'âtre n'avait pas servis depuis des années.

Toute tassée sur elle-même dans sa robe prune qui lui montait jusqu'au cou elle tendit l'oreille. Des bruissements de papier, des rires secs et quelques paroles.

  - Signore, malgré la lecture de cette merveilleuse copie, je ne pourrais pas donner un avis dessus rapidement.

Laïs fronça les sourcils. Lui, c'était l'étranger. Son accent fluet et chantant devait être celui de la Sérénissime. Elle se pencha, glissant un oeil ou deux en dehors de sa cheminée.
Elle aperçue une grande bibliothèque, un pupitre et deux homme de dos qui semblait étudier une reproduction ?

  - C'est tout ce que vous avez à me dire ? Répondit assurément le ton désuet d'Archibald.

Le petit rire de l'homme se fit entendre.

  - Nous pensons que chaque esprit de famille a son Livre avec lui ou au moins sur son arche. Seul Farouk a une obsession avec le sien, signore.

  -Je le sais bien, sinon je ne vous aurais pas payé pour traverser le monde. Autre chose ?

Laïs avait le coeur qui battait trop vite. Le Livre de Farouk ? Pourquoi un frisson venait de lui traverser l'échine ? Pourquoi ce mal-être ?

LE REFLET DE LAÏS ━゙LA PASSE-MIROIR✔Où les histoires vivent. Découvrez maintenant