Fire & Gasoline - Tome 2 [EN COURS]

Seul dans le noir

Oh seigneur.

Comment est-ce possible ? Comment un parent peut-il faire une chose pareille à son enfant ? Comment peut-on supporter ça ? Je pense à maman et à son absence qui m'a tant fait souffrir. C'est atroce de penser que Julio, lui, aurait préféré que sa mère soit morte. Une pensée me traverse l'esprit, un souvenir de ma conversation avec Ava, et je demande :

« Tu l'as tuée ? »

J'ai toujours rêvé de pouvoir tuer de mes mains l'homme qui m'a détruite. Mais...comment vouloir la mort de sa propre mère ? Je n'arrive pas à l'imaginer. Julio secoue la tête.

« Non. Elle est morte par accident. Une overdose. »

Je hausse les sourcils, surprise. Si un de mes proches était mort à cause de la drogue, je ne regarderais pas l'argent sale de la même façon que Julio. Mais je suppose...que la situation est très différente.

La seule chose pire que de se retrouver face à un monstre, c'est de réaliser que ce monstre n'en est pas un. C'est juste un être humain. Comme nous. Comme moi. Bien sûr, ça n'excuse pas ce qu'il a fait. Mais je viens de réaliser quelque chose : Julio et moi avons plus en commun que je ne l'aurais imaginé. Pourquoi a-t-il choisi une voie et moi une autre ? Pourquoi a-t-on vécu ce qu'on a vécu ? Ces questions en resteront pour toujours. La seule certitude, c'est qu'il comprend ce que j'ai vécu. Et c'est la première personne que je rencontre qui en est capable.

Pourquoi lui ?

Je ne veux pas ressentir de compassion pour lui, je ne veux pas être triste. Je veux le détester pour tout ce qu'il m'a fait subir. Mais pourquoi est-ce si difficile, d'un coup ? Pourquoi faut-il que la seule personne qui peut entrevoir ce qui se trouve en moi soit un putain de criminel ? Je déglutis difficilement avant de parler :

« Ça justifie pas ce que t'as fait. »

Rien ne pourrait justifier ça. Et d'ailleurs, comment la victime d'un viol peut-il forcer quelqu'un à faire de fausses accusations ? Franchement, ça me semble inconcevable. Ou alors, peut-être...peut-être que cette histoire n'est qu'un mensonge. Est-il possible que j'aie imaginé ce que j'ai vu en lui ? Julio lève la tête. Il semble soudain furieux et il se jette sur moi pour me saisir par le cou et me coller contre le mur, heurtant violemment l'arrière de ma tête. Je laisse échapper un gémissement qui ne l'arrête pas.

« Ce qui justifie ce que j'ai fait, c'est toi, Axelle ! Tu aurais pu empêcher tout ça, tu aurais pu sauver Diego ! »

Mais de quoi il parle ?

Je secoue la tête en me débattant mais les mots de veulent plus sortir de ma bouche. Je sens la main de Julio qui compresse ma gorge.

« Il suffisait que tu le quittes. Il suffisait que tu comprennes ! Pourquoi t'as pas compris, Axelle ? »

Il me secoue violemment. Je n'arrive plus à respirer. En désespoir de cause, je tente de lui griffer le visage, de l'aveugler avec mes doigts, mais sans succès. Alors que je me sens au bord de l'inconscience, il relâche finalement la pression et je tombe à genoux, toussant et suffoquant. Dès que j'ai repris mes esprits, je tente de m'éloigner de lui, mais il m'attrape par les cheveux pour m'en empêcher et me force à me relever.

« J'ai cru que je pouvais te faire confiance, j'ai cru que tu étais ce que j'avais toujours cherché. Mais tu m'as déçu. Tu as voulu partir loin de moi ! »

Il me projette face contre le mur et je sens le canon de son arme se pointer sur l'arrière de mon crâne. Je ferme les yeux, sur le point de m'évanouir de terreur.

« C'est pour ça que je veux que tu meures, conclut-il d'une voix glaciale. »

Voilà. C'est la fin. C'est maintenant. Après tout, est-ce que ce n'est pas logique ? On ne peut pas tromper le destin éternellement. Je n'étais pas faite pour vivre, voilà tout. J'espère seulement que Daryl ne m'en voudra pas trop. Une larme glisse le long de ma joue alors que j'attends le coup de grâce, priant pour qu'il vienne vite, avant que la peur ne me fasse perdre la raison. Mais au lieu d'un coup de feu, j'entends la voix de Julio chuchoter dans mon oreille :

« Mais je veux aussi que tu vives. »

Quoi ?

Je n'y comprends rien. Je ne suis plus en état de comprendre. Tremblante, je ne peux que sentir l'arme qui s'éloigne de moi sans savoir pourquoi. Mes jambes ne me portent plus et je m'appuie contre le mur pour ne pas m'écrouler. Après un long moment, je sens le corps de Julio se coller au mien, ses bras entourant ma taille et il pose sa tête sur mon dos pour chuchoter :

« N'aie pas peur, Axelle. Je ne veux pas que tu aies peur de moi... »

Facile à dire ! Je crois qu'à un certain point, le cerveau humain ne peut plus supporter la peur et il s'éteint pour sa propre sécurité. A cet instant, je ne sens plus rien que le besoin impérieux de me laisser tomber au sol et d'y rester jusqu'à y mourir. Je ne supporte plus d'avoir peur. J'entends à peine la voix de Julio tant mes oreilles bourdonnent.

« J'aurais dû le deviner quand je t'ai vue. J'aurais dû te tuer immédiatement. J'aurais dû savoir que tu me détruirais, Axelle. Tout ce temps à essayer de te comprendre, essayer de découvrir ce qui était si spécial, si unique chez toi... Je me suis perdu en essayant de te trouver. »

Il prend une grande inspiration. Ma tête tourne, je me sens au bord de l'évanouissement.

« Et maintenant je suis coincé. Je veux te tuer mais je n'y arrive pas. Je veux ta mort mais le monde me semble plus beau quand tu es en vie. Tu es une flamme, Axelle. Une flamme que je voudrais garder auprès de moi pour me réchauffer. Mais si je fais ça...alors la flamme s'éteindra. Et tout sera noir. »

Il se serre un peu plus contre moi. Je ne le sens même plus.

« J'ai passé trop de temps seul dans le noir. »

Moi aussi.

C'est la seule pensée cohérente que je parviens à former et à peine a-t-elle pris forme dans mon esprit qu'elle ne semble déjà plus avoir de sens. J'ai l'impression de glisser sur le sol et de tomber dans un gouffre, comme si la gravité s'inversait. Je crois que mon cerveau vient de disjoncter. J'essaie de parler mais je ne sais plus comment faire. A bout de force, je parviens à poser ma main sur celle de Julio pour enlever ses bras de ma taille. Il recule d'un pas alors que je reste immobile. Et je l'entends murmurer :

« Ne deviens pas comme moi. »

Je ne bouge pas d'un pouce. Je ne suis pas sûre d'en être capable. J'ai l'impression de m'écrouler. La lumière s'éteint, puis la porte s'ouvre et se referme. Et je reste seule, dans le noir.

Merci à maelie_lld pour ses votes!

Prochaine partie vendredi ou samedi, ça dépendra de si j'avance bien ^^

Je vous kiffe!