Le café de l'inspecteur Pluton

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Un cadavre. Une plume noire. Une fenêtre cassée. Aucun indice. Aucun témoin oculaire.

Et c'était évidemment le jeune inspecteur Pluton qui se retrouvait avec l'affaire sur les bras depuis cinq ans désormais. Voilà un bout de temps que ces crimes à la plume étaient perpétrés, une poêlé d'inspecteurs s'était risquée à résoudre cette affaire, mais personne n'avait jamais réussi à avoir ne serait-ce qu'une piste.

Était-ce une unique personne ? Étaient-ils plusieurs ? Quelques personnes rapporteraient les crimes à la plume était l'oeuvre d'un tueur à gage. Rapide, efficace, invisible. De plus, ils osaient prétendre que ces crimes étaient bénéfiques car ils n'éliminaient que des criminels, ce à quoi l'inspecteur Pluton s'empressait de répondre que peu importe la bonté d'âme de ce criminel, s'il voulait évincer un criminel il fallait s'adresser à la police. Qu'ils tuent des tueurs en série ne changeaient rien au fait qu'il était lui-même un tueur et l'inspecteur Pluton avait bien dans l'idée de foutre au trou ce Batman 2.0. On ne rigolait pas avec la justice.

Sur les nerfs, l'inspecteur Pluton bouscula un collègue pour se rendre à la machine à café. Et puis après il irait se griller une clope. Il était trop remonté pour qu'on lui adresse la parole et tous ceux qu'il croisa sur sa route le comprirent bien vite.

Cette nuit, trois cadavres avaient été découverts et étaient signés par une plume. Et les heures à laquelle on en avait déduit leur mort et les lieux où ils avaient été commis ne correspondaient pas. Traverser la ville en moins cinq minutes était tout bonnement impossible, même pour le plus rapide des véhicules. C'est pour cela que l'inspecteur Pluton était certain qu'ils étaient plusieurs, au moins deux. Mais qui ? Et pourquoi se permettaient-ils de faire le travail de la police ? De plus régulièrement une fenêtre était brisée et c'était souvent en hauteur. On pourrait se dire que, lors de l'affrontement, les dégâts vont de paire. Or de une, il n'y avait quasiment jamais de traces de lutte et de deux les éclats de verre étaient, pour la grande majorité, toujours à l'intérieur, comme si... quelque chose s'y était fracassé venant de l'extérieur.

L'inspecteur Pluton tapa rageusement sur la machine pour se commander un expresso et grognait en attendant qu'il coule. Une fois fait, il attrapa son café qui avait le goût de jus de chaussettes et s'empressa de se diriger hors du commissariat pour aller fumer. Son travail était sa seule occupation, pas de femme, pas d'enfant et une famille distante. Étant le bleu de l'équipe, il s'était retrouvé au volant de l'enquête poubelle par laquelle tout le monde passait et qui était tout de suite refourguée dès l'arrivée d'un nouveau. Malgré tout, il mettait son cœur l'ouvrage, il aimait son métier, il avait des principes et ces criminels allaient à l'encontre de ceux-ci.

Une fois dehors dans le froid, il sortit un paquet de clopes, en prit une entre les lèvres et l'alluma avec son briquet. Mais apparemment, même la nicotine ne lui procurait l'apaisement attendu. Il était tellement tendu par cette enquête que rien n'arriverait à le calmer à part chopper les guignols qui sévissaient la nuit. Il avait à peine grillé la moitié de sa cigarette qu'il l'écrasa contre une poubelle et la jeta. Les criminels n'allaient pas aller en prison seuls, il fallait qu'il y retourne. Faisant le chemin inverse, son café encore plein à la main, il retourna dans son bureau et s'assit sur la chaise.

Surélevé du bordel du bureau, le dossier où était consigné les pauvres éléments recueillis, s'ouvrait à lui. Des photos des multiples crimes, des plumes par centaines, et un cheveu. L'inspecteur Pluton se massa les tempes pour éviter de craquer. Il essaya de ne pas hurler de rage en lisant encore et encore le compte-rendu fait par la police scientifique. On avait fait analyser les plumes et, plus récemment, le cheveu découvert sur une des scènes de crimes. On avait tenté de savoir à quel oiseau appartenant les plumes, bien trop grandes pour être celles d'un vulgaire corbeau, et bien la police scientifique ne savait pas. La plume provenait d'un oiseau inconnu. De même, le cheveu avait un caryotype qui n'appartenait pas à un humain mais à une espèce différente. Ils avaient même osé proposer que la plume et le cheveu proviennent de la même espèce, ayant un caryotype avec le mêmes nombres de chromosomes mais d'individus différents, les gènes ne concordant pas.

Le Chant Du CygneOù les histoires vivent. Découvrez maintenant