Chapitre 54

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Lundi 22 février

« - Agathe ? Agathe, réveilles-toi !

La jeune fille papillonne des yeux. La morsure du froid achève de la réveiller et elle se retrouve nez-a-nez avec David qui lui frotte vigoureusement les bras.

D'abord confuse par une telle proximité, elle a un vif mouvement de recul au souvenir des dernières révélations sordides du jeune homme.

- Mais qu'est-ce qui se passe ? hurle-t-elle presque.

Un voile s'abat dans le regard du brun et il lâche ses épaules avec précaution, comme s'il avait peur de l'effrayer. Il s'écarte ensuite légèrement pour la laisser se redresser en position assise.

- Tu as fait un malaise, dans l'eau. Je suis désolé, tout est de ma faute.

Si elle n'était pas aussi déboussolée par la situation, Agathe lui aurait volontiers fait remarquer que c'est la première fois qu'elle l'entend s'excuser de quoi que ce soit.

- Tu m'as sauvée ? Merci... lâche-t-elle du bout des lèvres.

Elle est toujours terrifiée par le passé sordide de son interlocuteur, mais son air affligé le rend à ses yeux plus humain. Tout en reprenant ses esprits, la brune se promet de lui laisser une chance de s'expliquer.

Elle s'aperçoit que David l'a emmitouflée dans son manteau et elle s'étonne de ce geste prévenant de sa part. Mais quand elle le retire et que le froid saisit son corps tout entier, elle comprend qu'il lui a permis d'échapper à une pneumonie, si ce n'est plus grave.

En effet, elle prend petit à petit conscience que ses vêtements ainsi que ses cheveux sont trempés, suite à sa baignade imprévue.

- Merci, pour ça aussi, dit-elle en désignant le manteau qui la recouvre.

Les yeux de David n'ont jamais été aussi expressifs. Il semble traversé par toutes sortes d'émotions et Agathe ne peut s'empêcher de soupirer. Ce garçon lui fait tourner la tête. Il est dangereux et a un passé plus que douteux, mais ce qu'elle voit dans ses yeux lui fait remettre en question sa méfiance et son dégoût.

- J'aimerais que tu me laisses te raconter mon histoire en entier.

Son ton est presque suppliant. Elle acquiesce et le jeune homme l'aide à se relever. Ils font quelques pas pour permettre à la brune de reprendre ses esprits, puis David la guide vers les rochers où ils s'étaient assis plus tôt.

Là, il lui laisse quelques minutes de répit, réfléchissant à la manière d'expliquer son terrible passé sans l'effrayer plus qu'elle ne l'est déjà. Puis il se lance à voix basse :

- Mon père était violent. Il battait souvent ma mère, voire pire. A cause de lui elle s'est mise à boire, pour oublier. Et elle ne se rendait même plus compte de ce qu'il lui faisait subir, elle croyait que tout était normal. Et moi, enfant, j'y croyais aussi.

Agathe frissonne, mais cette fois-ci le vent glacial n'y est pour rien. A ses côtés, David est crispé au souvenir des terribles évènements de son enfance.

- Quand j'ai été en âge de comprendre la situation, vers 11 ans, j'ai contacté un oncle éloigné qui nous a sortis de là. Ma mère est partie vivre aux Etats-Unis pour suivre un programme spécial et je suis parti habiter chez mon oncle. Il m'a éduqué et surtout m'a initié aux arts martiaux. Mais j'ai commencé à fréquenter les mauvaises personnes au collège, puis au lycée. J'ai découvert comment les combats clandestins pouvait m'aider à m'évader et à extérioriser et j'ai tout de suite adoré ça.

Il ne peut retenir un sourire à l'évocation de ce qui est pour lui un véritable exutoire. Agathe n'ose même plus respirer, s'attendant au pire.

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