2019
Pour la première fois depuis elle ne saurait dire combien de temps, Océa se réveille sans ce poids dans son cœur. Poids qui pesaient quotidiennement sur son âme et auquel elle avait finit par s'accoutumer. Comme libérée soudainement de chaînes invisibles qui entravaient chacun de ses gestes et chacune de ses paroles.
La lumière filtrant à travers les rideaux vient caresser ses paupières endormies et la tire doucement des bras de Morphée. Elle ouvre les yeux et découvre dans un mouvement étonné le visage de Noé au-dessus du siens. Elle sursaute, ce qui le fait sourire, puis s'étire en lui disant dans un bâillement taquin:
- Tu es réveillé depuis longtemps?
- Un moment...
- Et tu n'as rien trouvé de mieux à faire que de te mettre à me regarder dormir?...
- Tu étais si paisible... je ne voulais pas te réveiller.
« Si paisible »...
Océa perd soudainement son sourire. Oui elle était paisible. Mais comment peut-elle l'être en toute âme et conscience? Sa sœur est désormais six pieds sous terre, sa mère va être jugée pour meurtres et elle vient de voler le mari de Rose... Comment peut-elle ainsi frôler du bout des doigts le bonheur alors que tout autour d'elle est en ruine. La jeune femme se redresse brusquement et tire le drap sur sa poitrine, la culpabilité venant de lui poignarder le cœur. Noé laisse sa tête tomber sur l'oreiller d'Océa et vient poser sa main sur le dos nu de son amante mais à ce contact cette dernière se lève précipitamment du lit en prenant le drap avec elle en guise de vêtement.
Il fronce les sourcils, soucieux:
- Que se passe-t-il?
- Nous n'aurions pas dû faire ça...
- Nous l'avons pourtant fait...
- Oui, mais cela ne rend pas la chose bien pour autant.
Il pousse un soupire:
- Tu penses à Rose n'est-ce pas?
- Bien-sûr que oui!
Il se lève à son tour et se met face à elle, bien peu soucieux de sa nudité et répond d'un ton emplie de colère:
- Moi aussi je pense à elle! Tous les jours de ma vie! A chaque seconde je vois son visage, son regard et son sourire, sans arrêt! Elle est partout, tout le temps avec moi. Dans mes rêves et mes pensées!
Il marque une pause, ferme les yeux une seconde et passe sa main dans ses cheveux pour se calmer, avant de poursuivre, cette fois plus doucement:
- Mais cette nuit... pour la première fois, son visage a cessé de me hanter. Ce n'est plus elle que je voyais, c'était toi. Jamais je n'oublierai Rose, mais enfin j'ai réussi pendant un instant à passer à autre chose. Et il serait temps que tu fasses de même Océa. Les fantômes de Rose et Olympe ne te laisseront que si toi tu le veux.
Il ne lâche pas ses yeux, essayant de lui faire comprendre ce qu'il ressent pour elle sans pour autant trahir Rose. Océa ne dit rien, pendant un si long moment que Noé comprend alors qu'elle ne pourra pas. Elle ne pourra pas continuer, parce qu'il n'y pas assez de place pour des fantômes et lui, il le sait.
- Je pensais vraiment que j'aurais pu être la personne qui te sauverait. Mais je me suis trompé. Il n'y a que toi qui puisse te sauver Océa...
Il attrape son boxer jeté la veille sur le sol et l'enfile, puis fait de même avec son jean avant d'attraper sa chemise dans sa main et tourne les talons pour sortir de cette chambre sans même prendre la peine de la mettre.
- Je vais partir. Je n'ai plus rien à faire dans ce manoir où dans cette famille... Je ne pense pas qu'on se reverra. J'espère sincèrement que tu réussiras à t'en sortir.
Il attrape la poignée et s'apprête à ouvrir la porte quand la voix féminine dans son dos retentit:
- Attends!
Il se retourne, étonné:
- Tu as raison. Il n'y a que moi qui puisse me sauver. Mais je ne peux pas réussir sans toi... Après le procès, je partirai avec toi. Loin. Pour toujours.
La respiration de Noé se coupe et ses poumons se contractent dans sa poitrine tant la surprise est grande. Il ne bouge plus. Océa s'approche alors doucement et vient embrasser tendrement Noé en se mettant sur la pointe des pieds.
- Loin d'ici...
- Pour toujours...
*****
- Où aimerais-tu aller?
- Je ne sais pas... Partout. Je n'ai jamais quitté la France.
Noé dresse un sourcil, un large sourire plaqué sur le visage:
- C'est vrai?
Océa hoche la tête en continuant de tortiller des mèches de cheveux de Noé entre ses doigts. Son regard fixé vers le plafond et celui de Noé plongé dans le siens.
- Avant de rencontrer Rose j'ai beaucoup voyagé.
- Tu es allé sur combien de continents?
- Tous...
Océa se redresse pour le regarder et pousse un petit rire:
- Même en Antarctique?
- Bon ok peut être pas tous. Mais lui ça ne compte pas.
- Si ça compte.
- Non ça ne compte pas!
- Si!
Elle dépose ses lèvres sur les siennes pour le faire taire et avoir le dernier mot et lorsqu'elle se sépare de lui elle murmure:
- Tu m'emmèneras sur tous les continents?
- Même en Antarctique si tu veux...
Soudain une sonnerie de téléphone retentit : le portable d'Océa. Elle lève les yeux au ciel et veut aller le chercher mais Noé l'en empêche en la rattrapant par la taille:
- N'y vas pas.
- Si... c'est peut-être à propos du procès.
Il hésite une seconde mais la lâche. Elle va jusqu'à l'autre bout de la pièce où est déposé son sac, fouille dedans et une fois son portable trouvé elle décroche sous le regard protecteur de Noé qui écoute attentivement ses paroles:
-Allô?... Oui... Oui c'est moi... Je vous écoute... Co...comment?... Quoi?... Mais vous... Oui... D'accord... Oui... Je comprends oui... Très bien... Oui... Merci... Aurevoir...
Elle raccroche et ne détourne pas ses yeux de l'écran, comme perdue.
- Alors? Qui était-ce?
- L'inspecteur en charge de l'affaire.
- Et que voulait-il?
Elle lève son regard vers Noé et il comprend instantanément que quelque chose ne va pas. Il se lève et s'approche d'elle:
- Que se passe-t-il? Dis moi.
- C'est ma mère...
- Oui?...
- Ils l'ont retrouvée ce matin dans sa cellule... Pendue. Elle s'est suicidée durant la nuit... Lucile Danewood est morte...
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Olympe et l'attente des corbeaux
Mystery / Thriller« Être une Danewood est une malédiction. Et les malédictions n'épargnent jamais personne... » 1998. La petite Olympe Danewood, âgée de trois ans, disparaît mystérieusement. Personne ne retrouve sa trace et la police finit par classer l'affaire, pers...