Police.

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Eclipse du temps  où ma mère a appelé la police + le temps d'attente avant que je puisse avoir un rendez-vous. 

Plus le temps s'écoulait, et plus j'oubliais des détails, plus j'oubliais et confondait des scènes ou même les lieux exacts. Tout s'embrouillait dans ma tête, certainement pour que je ne puisse plus vraiment me ressasser toutes ces choses passées. 

C'est le jour J, celui où je vais encore devoir raconter ma vie. Celui où je vais devoir me plaindre devant un inconnu et qu'il va me regarder avec des yeux vides, comme s'il s'en foutait ou comme s'il ne me croyait pas. 

C'est ce qu'il s'est passé. 

J'étais très anxieuse ce jour-là, je l'avoue. J'avais peur de dire une bêtise, de regretter mes dires ou quelque chose de ce genre. 

Pour me rassurer, il m'a montré une petite salle derrière celle où j'allais être interrogée, avec une télé dans laquelle l'enregistrement de l'interrogatoire passerait. 

Alors je suis entrée dans une salle avec un policier, et il y avait une caméra dans un coin de la salle, pour m'enregistrer. Il fallait que me mette face à elle, pour qu'on puisse me voir également. Comment dire que rien que ça servait à me rajouter du stress. Il m'a posé toutes les questions possibles et imaginables pour éplucher au mieux ce qui s'était passé et je suis restée un bon moment dans cette petite salle pour enfant. Je me souviens avoir porté exactement les mêmes vêtements que le jour du viol, parce qu'inconsciemment je me suis dit que ce serait quand même important de leur montrer qu'il n'y avait pas une once de vulgarité dans ma tenue. Même si être en jupe ne justifie rien.. Bref, il y a toujours ces préjugés et je ne voulais pas qu'il y ai de doutes là dessus.  

Il essayait de rester neutre face à ce que je lui racontais, et il tentait même de détendre l'atmosphère en me faisant rire etc. Ça m'aidait beaucoup. Je me souviens que j'avais super chaud, que j'étais tellement gênée de raconter ce qu'il s'était passé que j'étais toute rouge, couverte de honte. Je n'osais pas trop le regarder, je préférais regarder le miroir qui était en fait une vitre par laquelle on pouvait me voir, mais moi je ne pouvais pas voir.  

Ma mère était interrogée dans une autre pièce, elle aussi. Mais que pouvait-elle dire? Elle venait de l'apprendre et ne savait rien de la situation. J'imagine combien ça a dû la déranger de devoir être interrogée elle-aussi, ce n'est jamais très agréable. Désolée. 

Enfin, le policier m'a demandé si je voulais porter plainte, et, j'ai dis non. 

Surpris, il me demanda pourquoi. 

Je lui répondit que j'avais peur des représailles, qu'il habitait pas loin de mon lycée et qu'il serait possible que je sois amenée à le revoir. J'avais peur, en d'autres termes, de ce qu'il pouvait me faire si je parlais, si je l'accusais. 

J'ai préféré me taire, mais eux ne voulaient pas. Ils voulaient l'interroger, le voir, le foutre en taule. 



Lettre à mon traumatisme.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant