Chapitre 24

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J'avais froid, et mal à la tête. Dans un premier temps, je n'arrivai pas à ouvrir les yeux. Mes paupières semblaient lourdes, et incapables de s'ouvrir. Mes mains n'étaient pas le long de mon corps. Elles étaient attachées, au-dessus de ma tête. Il me fallut de nombreuses minutes pour reconstituer ce qui s'était passé. La nouvelle de James, l'engueulade, puis la réconciliation avec Jordan. Et quelqu'un qui m'a attaqué par-derrière. Après, je n'ai aucun souvenir.

Je pouvais sentir mes pieds touchés le sol. Je n'avais donc pas mes chaussettes. Je n'avais pas non plus de tee-shirts. Le froid me rongeait la peau. J'essayai de bouger un peu les jambes. Mon pantalon était encore là. Cette odeur de moisi, d'humidité. De nombreux souvenirs, atroces, me revinrent en tête. Je ne pouvais pas être là, encore. C'était impossible. Ça ne pouvait pas être eux, encore.

Je me fis souffrance pour ouvrir mes paupières. J'avais mal, rien qu'en les ouvrants. La seule chose que je vis en premier, ce n'était rien. J'étais plongé dans le noir le plus total. Pas une seule lumière n'éclairait la pièce, qui me semblait grande. J'étais attaché, au milieu de quelque part. Mais ce, quelque part, ne m'était pas inconnu.

D'un seul coup, la lumière me brûla les yeux. Par réflexe, je fermai mes paupières, dès l'instant où la lumière traversa mon iris. Je restai comme ça pendant quelques secondes, pour reprendre mes esprits. Au même moment, j'entendis quelqu'un descendre des marches d'escalier. Un pas lourd, rempli de rancœur. Un pas assuré, rempli de haine. Les pas se rapprochaient de plus en plus de moi, quand la personne s'arrêta. Elle ne parlait pas, je pouvais simplement entendre sa respiration, lourde. Mon cœur battait beaucoup trop vite, et ma respiration était compliquée. Après quelques instants, j'ouvris les yeux.

- Content de te revoir, chéri.

La personne qui se tenait devant moi portait toujours le même masque qu'avant. Un masque blanc, terrifiant. Des larmes de peur, d'angoisse, roulaient le long de mes joues. Mon cœur loupa un battement. Je me mis à crier, de toutes mes forces. Mais je savais que personne ne pouvait m'entendre. Je m'étais déjà cassé la voix pendant une semaine, il y a quelques mois de ça. Retour à la case départ.

James

Je faisais les cent pas, autour de ma petite chambre d'hôtel miteuse, depuis maintenant de nombreuses heures. Il était près de huit heures du soir, et Adam n'était toujours pas rentré. Il était parti en fin de matinée, et n'était jamais rentré depuis. J'avais essayé de l'appeler, de lui envoyer des textos, en vain. Mais maintenant, j'avais peur. Dehors, il faisait nuit. Mais surtout, il y avait deux menaces qui arpentaient toujours les rues.

J'avais envie de me frapper, de m'insulter, de l'avoir laissé seul. Je suis son garde du corps, et mon rôle est de toujours être là pour lui, peu importe la situation. Mais lorsque ma boss m'a dit que c'était fini pour moi, il me fallait un peu de répit, pour penser à tout se devait arriver. Rien qu'à l'idée de laisser Adam seul, alors que ses kidnappeurs n'ont toujours pas été trouvés me brisais le cœur. Il avait besoin de moi, et moi de lui.

Sans même réfléchir, je pris mes clefs de voiture, et partis à sa recherche. Il ne devait pas être très loin.

Anna

- Du coup, Adam t'as pardonné ?

Jordan se tenait devant moi, sur le pas de ma porte. L'hiver me gelait les os, mais il ne pouvait pas rentrer à l'intérieur de ma maison. Il était plus âgé que moi, et si mes parents me voyaient avec un type plus âgé, il me tuerait. Quand il m'a appelé pour me dire qu'il était en bas de chez moi, je suis descendu, faisant croire à mes parents que j'avais quelqu'un au téléphone.

- Je pense. Du moins, j'espère. 

Il était beaucoup plus grand que moi, et me surplombait. Il ne donnait pas l'impression d'avoir froid, ce que je ne comprenais pas. Il faisait presque -1 degrés, et le vent qui soufflait me donnait l'impression d'être en Alaska en ce moment même.

- Alors on peut peut-être partir sur de bonnes bases, encore.

Il me sourit, droit dans les yeux. C'est vrai qu'il était vraiment craquant, comme type. Et même après tout ce qu'il s'est passé, au fond, il est gentil.

- J'espère que c'est la dernière fois.

Et comment. Je n'avais pas envie de me prendre la tête avec lui une nouvelle fois, pour la simple et bonne raison que je n'ai pas le temps. J'accorde normalement mon temps à très peu de gens, sauf Adam. Et même si ce mec est clairement une bombe, je ne ferais pas d'exception.

- Anna, le dîner est prêts ! Finis ta conversation au plus vite, ça va refroidir !

Je me mis à sourire, et une gêne s'installa entre nous. Jordan rigola, et dirigea ses yeux en direction de sa voiture.

- Je pense que je vais devoir y aller.

- Très bien.

Sans même m'en rendre compte, il déposa sa main sur ma joue, et caresse cette dernière avec son pouce. Il regarda mes lèvres, alors que moi, totalement stressée, ne pouvait dégager mon regard de ses yeux.

- Prends soin de toi.

Il enleva sa main, et partit en direction de sa voiture. Je ne savais pas quoi lui dire, et mes joues étaient devenues toutes rouges tellement je me sentais stupide. Je le regardai marcher, sortant ses clefs de sa veste en jean.

- Au fait, Jordan...

Ce dernier se retourna, un sourcil levé. Pourquoi est-ce que je venais de l'interpeller ? J'aurais simplement pu le laisser partir, et voir ce que ça aurait donné, la prochaine fois que nous nous serions vu. Je ne savais clairement pas quoi lui dire, et dérivai sur un autre sujet.

- Adam est bien rentré ?

Jordan pencha la tête sur le côté, comme si ma question l'interloqua.

- Comment ça ?

Ce fut à mon tour d'être interloqué. Ma question était simple, et la réponse devait l'être aussi. Un simple "Oui, ne t'inquiète pas" aurait suffit.

- Bah quand tu l'as vu tout à l'heure ? Tu l'as bien ramené, non ?

- Euh.. Non, il voulait rentrer seul...

Mes yeux s'écarquillèrent, et au même moment, une range roger noir déboula dans ma cour. James en sortit, et semblait totalement perdu. Il ne regarda même pas Jordan, et se précipita vers moi, totalement affolé.

- Dis-moi que tu as des nouvelles d'Adam.

Je n'arrivai pas à répondre, sous le coup de la pression. Des milliers de questions se bousculaient dans ma tête. Si Adam n'était pas avec James, où était-il ? Si Jordan ne l'avait pas ramené, et qu'il n'était pas rentré, est-ce qui lui était arrivé quelque chose ?

- Anna ! Réponds moi !

- Non. Non, je n'ai pas de nouvelles de lui, mais...

James se retourna, et se dirigea vers sa voiture.

- Où tu vas ?!

- Au commissariat. 

Sans même réfléchir, et sans même prévenir ma mère, je me précipitai à mon tour vers la voiture noire. James ne me posa pas une question, et roula en furie en direction du centre-ville. Où es-tu, Adam ?

Adam

C'était l'homme, et non la femme qui se tenait devant moi. Pour la première fois, j'entendis le son de sa voix. Une voix virile, mais aussi une voix qui résonnait fausse. Malgré ça, elle me foutu la chair de poule, tout comme lui, qui n'arrêtait pas de me fixer. Même s'il s'était reculé de quelques mètres, il restait dans le sous-sol, avec moi.

- Qu'est-ce que vous voulez ?!

Il ne répondit pas. Son masque était toujours devant sa vraie tête. Il était assis. Mes mains commençaient à me faire mal, car le sang ne circulait plus. J'avais du mal à respirer, et ne me sentais pas bien. J'avais soif, froid. C'était comme ci, je pouvais sentir la mort s'approcher de moi, de plus en plus.

- De l'argent ? Vous voulez de l'argent ?!

Toujours aucune réponse. À la place, il sortit son téléphone portable, et navigua sur ce dernier, comme ci de rien n'était.

- Répondez-moi !

Il releva la tête de son écran, et le rangea à l'intérieur de son jean. Je regrettai désormais mon haussement de voix, et m'arrêtai de gesticuler dans tous les sens. Mon kidnappeur se leva de sa petite chaise, et s'approcha de moi, très lentement. Ma respiration devenait de plus en plus forte, et de plus en plus douloureuse. Je devais sortir d'ici.

- Pourquoi es-tu encore vivant, Adam Pearson ?

Comment ça ? Pourquoi je suis encore vivant ? Car je n'ai pas laissé tomber. Je n'ai pas baissé les bras. J'ai continué à me battre, même si c'était difficile. J'ai affronté la réalité, même si j'en ai souffert. Je ne suis pas une pourriture comme ces deux-là. Je ne suis pas un perdant.

- On ne change pas une équipe qui gagne.

Il se mit à rire. D'abord doucement, puis son rire sortit de sa bouche. Un rire démoniaque, qui me donnait des frissons. Ce mec était totalement taré.

- Car tu crois avoir gagné ? Mais attend... C'est moi qui suis enfermé, dans un sous-sol ? Non. C'est moi qui aie demandé un garde du corps, pour me sentir en sécurité ? La réponse est encore non !

Il essayait de me pousser à bout, je pouvais le sentir. Il essayait de me faire sentir comme une merde. Mais je ne me laisserai jamais abattre par des gens comme ça. À la place, je pensais à Anna, James, mes parents... Et même Jordan. Des gens en qui j'avais confiance, avec qui je me sentais bien. Avaient-ils remarqué ma disparition ? Au fond de moi, je l'espérai. J'espérais sortir d'ici, vivant.

- Tu es vivant, aujourd'hui, Adam. Et même si nous ne savons pas comment tu es encore vivant, tu ne ressortiras pas d'ici. La dernière fois que tes proches te verront, ça sera à la morgue, totalement défiguré, la peur sur le visage, avec la souffrance.

Des larmes commençaient à couler le long de mes joues. Mais une question n'arrêtait pas de tourner en boucle dans ma tête.

- Comment ça vous ne savez pas comment je suis encore vivant ?

Mon kidnappeur s'arrêta, et approcha son visage très proche du moins. Par réflexe, j'essayai de reculer, mais avais oublier que j'étais attaché.

- Quand nous t'avons déposé au super-marché, tu aurais dû être mort, comme tes autres confrères. Mais quand nous avons écouté les informations, et que nous avons appris qu'Adam Pearson était encore en vie, pour nous, ce n'était pas possible. Tu étais mort. Tu aurais dû être mort. Mais non. Tu es un coriace. Mais plus pour longtemps, chéri. Car encore une fois, tu nous appartiens. Et ça, pour longtemps. 


Garde du corps [BXB]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant