Nate
Je longe les corridors désertiques. Tout en avançant, mes mains glissent le long des casiers jaunes. Enfin, j'arrive devant la salle de classe. Le professeur parle tellement fort que sa voix est audible derrière la porte. Je toque et entre immédiatement.
— Johnson, je ne vous demande pas la raison de votre retard, m'aborde t-il d'une voix nasillarde. Mais voyons quelle nouvelle excuse vous allez m'inventer.
— Mon car était dans les embouteillages, lui expliqué-je maladroitement.
— Menteur ! s'écrie t-il. C'est la millième fois que vous me la sortez celle-ci. Vous viendrez chercher un devoir pour votre insolence !
— Je vous jure monsieur ! Il dit vrai, j'étais avec lui dans le bus, ajoute précipitamment une voix féminine.Toute la classe se retourne vers Lexie. La brune s'empourpre lorsqu'elle remarque que la totalité des élèves la fixe.
— Ah oui mademoiselle Davids ? Vraiment ? s'avance le petit bidochon d'une voix menaçante.
— Croyez-moi, Nate prend la même ligne de car que la mienne. J'ai simplement couru à la sortie du bus pour arriver à l'heure aujourd'hui.Toute la classe s'était tue et attendait la réponse du professeur de Lettre, monsieur Red Murphy.
— Et bien, si vous le dites. Cependant, sachez que je hais les personnes de mauvaise foi. J'espère que vous ne mentez pas, sinon vous le regretterez.
La brune hoche la tête. Je la regarde, incompréhensif. Merci Lexie, je te re-vaudrai ça plus tard.
— Nate, à votre place de suite, vous m'avez fait perdre assez de temps. Reprenons le cours. Au XX e siècle, naît un nouveau courant littéraire très particulier...
Le professeur poursuit son cours magistral, sous les soupirs des élèves.
Je me demande pourquoi Lexie a prit ma défense. Ce n'est pas son genre. Elle n'est pas non plus timide mais intervenir en classe n'est pas dans ses habitudes. Tout le monde la connaît car elle travaille dans le journal du lycée.
Ce dernier est tenu par cinq ou six filles. Chaque mois est publié un nouveau numéro, produit en une centaine d'exemplaires distribués dans le lycée. Dedans, on parle de l'activité de l'établissement, des clubs de Cheerleders, basket, foot, des potins et des crushs amoureux.
Lexie s'investie toujours au maximum dans son travail de rédactrice en chef. C'est une chouette fille, juste un poil stressée et parfois trop proche des cours. Nous la connaissons, Cameron et moi depuis la maternelle.
— Nate !
Je me retourne vivement et vois Cam me faire un signe. Je pouffe en voyant qu'il est assit à côté de Monica. Le garçon me sourit de toutes ses dents. Je me tord de rire sur ma chaise. Il a bien tout manigancé ce pachyderme !
Une idée me traverse la tête. Cam hoche la tête. Nous avons pensé à la même chose. Le blond sifflote et sa voisine se tourne brusquement vers lui. Elle affiche un air froid, comme à son habitude, et lui murmure quelque chose que je n'entend pas. Quel dommage ! Voyons voir ce qu'ils disent !
Je fais exprès de laisser mon crayon tomber au sol et vais le récupérer. J'ouvre grand mes oreilles, et tente de me rapprocher de la table des deux zigotos.
— Tu es vraiment pitoyable Cameron ! Tu crois m'intéresser toi...
J'entends des brides de leur conversation, mais ce n'est pas très suffisant. Alors, je recule encore, accroupi sous ma table. Malheureusement, je roule sur mon stylo et tombe sur les fesses. Mes chaussures crissent contre le carrelage. Je ne peux pas retenir un cri de stupeur. Aussitôt, je plaque ma main sur ma bouche. Oh mince...
Des pas se rapprochent et je retiens ma respiration comme pour une apnée sous-marine.
Okay Nate, tout va bien, Red Murphy ne t'a pas vu.
J'ose un regard furtif à côté de moi, et tombe aussitôt sur les yeux noirs du professeur. Un hurlement d'effroi sort de ma bouche. Je me cogne la tête contre le haut du bureau.
L'enseignant se racle la gorge.
— Monsieur Johnson, pouvez m'expliquer ce que vous faites assis sous votre bureau ?
Oh non...
— Je vous ai vu, ainsi que tout le monde d'ailleurs. Vos pieds dépassaient et vous ne passez pas inaperçu avec un haut rouge.
Je ferme les yeux et me recroqueville contre moi même, en espérant que ce ne soit qu'une hallucination.
— Johnson ?
J'ouvre vivement un œil, puis un autre. Toute la classe me fixe, en se retenant de rire.
Non c'est bien la... réalité.
— Bon, vous pouvez sortir je pense, siffle le prof d'une voix agacée. Niveau discrétion j'ai connu mieux.
— Oui, répondis-je maladroitement. C'est vrai que j'ai toujours été dernier au cache-cache.Fou rire général dans la classe. Fier de ma petite comédie, un sourire assuré se dessine sur mes lèvres. Nate c'est ton heure de gloire alors profite-en.
J'essaie de me hisser hors de la table, c'est impossible. Là ce n'était pas prévu dans le plan... Le vieil enseignant m'attend de pied ferme au dessus de mon bureau. À la manière d'une tortue ninja, je pivote, glisse au sol et réussi à me dégager.
— Ah ouf ! soufflé-je.
À nouveau, les élèves ne peuvent se retenir d'exploser de rire. Je fais de même. Un brouhaha se déclenche.
— Ça suffit maintenant ! s'énerve le petit prof en tapant le sol de ses bottines. Je n'ai pas besoin d'un pitre dans mon cours ! Relevez vous immédiatement !
Il crie de toutes ses forces et son visage devient rouge écarlate. Red Murphy retire son monocle et fait les cent pas de sa démarche de petit coq.
Les rires des élèves s'intensifient, ce qui déplaît au professeur trapu. Sa colère se ravive et il braille de sa voix aiguë.
— Vous allez vous calmer ! Sinon ça ne va pas le faire jeune homme ! Vous...
Je me redresse lentement et regagne ma place. Le professeur s'interrompt dans son monologue et me regarde. De la fumée pourrait sortir de son crâne tellement qu'il semble bouillonner. Je me retiens d'éclater de rire, et adresse un sourire moquer au professeur, l'air de dire « on se remet ça quand tu veux Red Murphy ». Le binoclard lève les yeux au ciel et regagne le tableau d'un pas rapide.
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Nobody Except You
RomanceVoilà plus de 3 ans que je joue ce rôle, sortir avec des filles est devenu une habitude. Sans aucune partie de plaisir, c'est si monotone pour moi que je n'en fait plus attention. Dans notre société la différence fait peur, l'homosexualité en faisa...