XVII- Une réussite bien méritée

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-Hélène, passez-moi le ruban s'il vous plait! 

-Bien, Aude! J'arrive tout de suite! lança la couturière. 

Je repassais les coutures et les points, tout en faisant quelques modifications par ci, par là. Quand Hélène m'apporta le ruban, je l'accrochais sur le coin gauche de la hanche de la robe à l'aide d'une aiguille et d'un fil blanc pour qu'il ne soit pas visible. 

Quand il fut fixé, Miriane regarda le croquis de la robe, regarda ensuite la robe en elle-même, et dit d'une voix enjouée:

-Enfin, nous avons finit! Bon travail les équipiers! 

Depuis trois jours, nous ne dormions plus, et nous avions pris l'habitude de nous appeler mutuellement "les équipiers" depuis que je l'avais prononcé la première fois il y a trois jours. Moi aussi, je fus heureuse pendant un certain moment, mais la réalité me rattrapa, chaque détail devrait être minutieusement cousu, bien placé, et encore, en conséquent, nous avions fais plus à l'arrache  qu'à autre chose. Je repris soudain mon air froid, sans émotion -enfin, si, de la détermination pouvait se lire dans mon regard, et mes coéquipiers le savaient- et je dis, d'un ton glacial:

-Arrêtez de vous réjouir, on dirait des gamins, lançais je d'une voix pas très chaleureuse pendant que les autres s'enlaçaient et s'embrassaient à tout va. 

-Mais... comment cela, Aude? me lança Jean, n'êtes vous pas contente de notre travail? 

-Vous oubliez que ce travail n'est pas appliqué, et vous le savez! Vous le savez que ces robes sont bâclées! Il n'est pas encore temps de lever vos verres! Vous oublier peut être aussi que chaque détail compte, chaque point de couture, chaque disposition! Mais surtout, vous oubliez que ces modèles n'ont pas encore étaient présentés à la reine! hurlais-je, alors maintenant, on se remet au travail! 

J'avais raison, non, la chef avait raison, et ils le savaient. 

-Ce que vous dites est vrai, Aude... dit Hélène, dépitée, aller! Au bouleau! Elle frappa dans ses mains, et tous les équipiers se remirent à leur place. 

Je me plaçais devant la première robe et vis plusieurs imperfections, dont des points mal cousus ou mal placés, ou encore de la dentelle de travers. Alors, pendant l'heure qu'il nous restait, nous finîmes les dernières modifications et quand tout fut finit, nous nous écroulâmes sur les canapés que nous avions trouvé dans la pièce trois jours plutôt. 

Je suais tellement j'étais épuisée, et j'avais bien l'impression que je n'étais pas la seule. 

-Êtes-vous satisfaite, Aude? 

-Vous pouvez faire la fête, dis-je, toujours avec mon ton glacial. 

-Super! lancèrent-ils, tous en chœur. 

Ils se mirent à danser, même sans musique, car le bonheur n'a pas de prix. Cette réussite avait procuré du bonheur aux équipiers, mais aussi à moi. Alors la musique, ils n'en avaient pas, mais pourtant, ils chantèrent, comme s'ils venaient de remporter une bataille fulgurante et éprouvante. 

-Venez avec nous, Aude! me dirent Laine et Coquelicot. 

Les deux jeunes femmes m'entraînèrent sur la piste. Depuis trois jours je n'avais pas souri, et quand les coins de mes lèvres se relevèrent, je me mis à respirer de nouveau, ce n'est pas que je ne respirais pas auparavant -bien sûr, sinon je serai morte!- mais là, je respirais réellement, non seulement je respirais réellement, mais en plus, je respirais librement. J'avais été tant envahie par le stress, que j'en avais oublié la sensation de sourire.

Cette fois, ce ne fut pas le stress qui m'envahit, mais le bonheur, et je suivis les pas de mes congénères. Les paroles de mes nouveaux amis me réchauffaient le cœur, et leur chanson chantée a capella me berça, et mes pieds dansèrent sur le rythme de la musique.

-Qui donc vous a appris à danser si bien, Aude?  

Mais je ne voulais pas perdre mon air autoritaire qui avait commencé à cohabiter avec moi, alors je répondis simplement d'une voix froide. 

-Ma mère. 

Ma mère. Mère. Cette égoïste qui ne pensait qu'à l'argent! Inutile d'y penser! La voix rauque et glaciale de ma mère revint dans mon esprit, et je réalisai que, même si je devais garder mon autorité, je devais aussi apprendre à reconnaître le vrai bonheur. Je souris:

-Trêve de bavardage, on danse? lançais-je. 


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