Le temps s'éternise et s'allonge. La salle entière attend impatiemment le témoignage du fils. Valéry les regarde un à un, le dévisager. Il essuie ses mains, dégoulinantes, sur son pantalon. Il prend appuie sur ses pieds et pousse sur ses cuisses pour se lever. Les jambes tremblantes et les yeux égarés, il se redresse, terrifié. Comme soudain oppressé par les regards indiscrets de la foule, amassée sur les bancs, il baisse la tête et regarde ses pieds. D'un pas dénué d'assurance, il entame une marche funèbre vers la coure et se met face au président. Il prend appuie sur la barre, de ses mains incertaines. Ses muscles s'agitent. Il maintient d'autant plus son appuie, pour ne pas risquer de perdre connaissance et, ainsi, faiblir, devant eux. Les secondes se cachent, disparaissent, ne s'écoulant plus. Sans doute ne veulent-elles plus influencer les minutes ou bien les heures. Mais leur absence a arrêté le temps, prolongeant ainsi l'angoisse que ressent Valéry.
Le jeune homme relève courageusement les yeux et affronte ceux des jurés, de même que la coure. Le président s'adresse alors à lui.
- Etes-vous Valéry Moreau ?
- Oui...
- Je vous demanderai de prendre en compte qu'il s'agit là d'un conseil disciplinaire et qu'en aucun cas le mensonge ne sera accepté. Monsieur Moreau ici présent est accusé d'avoir commis des violences sur enfant. Avez-vous, Valéry Moreau, subit des violences de sa part ?
- Je...
Valéry quitte le président des yeux et se retourne vers son père. Il le regarde, désemparé, alors que l'ours reste immobile, tête baissée.
- Je ne sais pas...
Le jeune homme sent sa gorge s'étreindre et ses poumons s'engorger de frayeur. Il voudrait pouvoir se cacher. Son corps entier s'agite alors qu'il ne semble plus tenir en place. Comme n'arrivant pas à retenir la véritable réponse pour lui. Il est incapable de mentir.
- Il... oui, il... Il...
Valéry se met à haleter. Son poul le torture, tandis que le garçon essaye en vain de reprendre son souffle. Il se sent opprimé à la vue des jurés. Il se sent victime. Monstre aux yeux de son père.
- Il a fait ça... pour... pour m'aider, condamne Valéry.
- Que voulez-vous dire ? S'enquière le président.
- Parce que je...
La voix de Valéry vacille. Suffoquant, il se met à onduler au rythme de sa peur grandissante.
- Je peux pas...
- Jeune homme, s'il-vous-paît.
- Je... suis malade... c'est contagieux... il voulait juste me protéger. Que je guérisse !
- Je suis désolé, mais aucune maladie n'est répertoriée dans votre dossier, déclare le président.
- Quoi ? Sursaute Valéry, qui redresse soudain la tête. Non, il m'a dit que... il a dit...
- Vous n'êtes pas malade. Il vous en a apparemment persuadé. Vous frappait-il souvent ?
- Je... Je ne sais pas...
- Ne mentez pas je vous pris.
- Je ne sais pas.
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Le miroir des siècles
Ficción GeneralAlors que certains reçoivent des caresses, d'autres sont atteints par la main d'une brute. Isolé du reste de Paris, seul dans une chambre, Valéry guette l'instant où sa vie serait prête à lui offrir un temps d'allégresse. Mais lorsqu'il se perd à r...