Cours particulier(s)

Lâche

Totalement bouleversé par le baiser qu'il venait d'échanger avec Granger, Drago arpentait les couloirs des cachots d'un pas vif, ne sachant pas trop où il pourrait se réfugier en toute sécurité. Il ne voulait voir absolument personne. Il avait besoin d'être seul et le château avait beau être immense, il y avait toujours quelqu'un pour croiser votre chemin. Blaise l'avait retrouvé dans cette salle de classe, Granger en haut de la tour d'astronomie, Nott dans son dortoir et la Salle sur Demande était continuellement squattée par Londubat depuis qu'il s'était découvert du courage.

Cependant, l'heure de table approchait et la plupart des élèves allaient se rendre dans la Grande salle afin de déjeuner. Drago décida donc de sortir prendre l'air et de se trouver un coin isolé près du lac. C'était un jour pluvieux mais il n'en avait royalement rien à faire ; la pluie lui remettrait peut-être même les idées un peu en place. Les cours allaient reprendre bien trop rapidement à son goût et même s'il n'avait plus cours avec elle de la journée, il allait être amené à la recroiser bien assez tôt. Et après ce qu'il venait de se passer, il n'en avait aucune envie.

Le sorcier passa devant le saule sous lequel il avait discuté avec Blaise mais décida de trouver un autre endroit où s'installer : étant déjà venu ici il y a peu, il préférait être prudent. Il décida finalement de s'asseoir une cinquantaine de mètres plus loin, sur une grosse pierre plate couverte de mousse et à moitié cachée par un bouleau pleureur.

Drago desserra un peu sa cravate en passant une main lasse sur son visage. Il venait d'embrasser Granger. Lui, Drago Malefoy, venait d'embrasser Hermione Granger. Volontairement. Et il avait aimé ça. Il n'essaya même pas de se voiler la face. Les frissons, le ventre noué, le souffle court, les sens uniquement pris par tout ce qu'il avait ressenti... il ne pouvait rien nier de tout ça. C'était bel et bien lui qui avait initié ce baiser et il y avait pris du plaisir comme jamais.

C'est pourquoi Drago ne devait JAMAIS recommencer. S'il avait perdu tout sens de la réalité à cause d'un simple baiser, que pourrait-il arriver s'il se laissait vraiment aller ?! Ok, il avait appris à la respecter mais de là à éprouver du désir pour Granger, il y avait un monde ! Et il ne voulait absolument pas mettre les pieds dans un tel monde. Il aimait son monde tel qu'il était. Enfin, tel qu'il l'était avant le retour du Seigneur des Ténèbres, pour être tout à fait honnête : les Malefoy imposant respect et déférence aux autres par la pureté de leur sang et leur fortune. Aucun compte à rendre, aucun meurtre à planifier... Simplement magouiller pour garder la mainmise sur le pouvoir en toute discrétion après tout, il fallait qu'ils soient inatteignables en cas de scandale éventuel.

Voilà le monde que Drago aimait : insouciance, sécurité, argent et pouvoir. Celui que Granger lui faisait entrevoir depuis quelques temps était beaucoup trop effrayant. La pureté du sang n'avait plus aucune importance, l'égalité, le libre-arbitre, l'entraide et la lutte pour ses convictions sans tenir compte des conséquences éventuelles. Pour quelqu'un à qui on avait dicté sa conduite depuis sa plus tendre enfance, avoir tant de liberté était tout simplement terrifiant.

Avec le recul, Drago aurait été incapable de dire pourquoi il avait initié ce baiser. Le soulagement face à sa douleur apaisée ? Le fait qu'elle ait osé lancer un sort de magie noire juste pour lui, allant ainsi à l'encontre de ses valeurs ? L'inquiétude qu'elle ressentait visiblement pour lui alors qu'à part sa mère, jamais personne ne lui avait montré ce genre d'intérêt ? S'opposer à l'autorité paternelle après tout ce qu'elle lui avait révélé ? Ou simplement braver l'interdit qu'elle représentait ? Sans doute un mélange de tout ça...

Le fait était qu'il en avait eu terriblement envie et, vu la façon dont elle l'avait embrassé en retour, le désir devait être partagé. Et c'est ce qui lui faisait le plus peur. En l'embrassant, il avait totalement perdu pied et il ne pouvait pas se le permettre. Trop de choses étaient en jeu. Ils étaient en pleine guerre et ils appartenaient à des camps différents. Comme il l'avait dit à Blaise quelques temps auparavant, Drago ne serait jamais un disciple de Potter.