Chapitre 10 : La Croisée des chemins (2/2)

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II


   Ils galopèrent à bride abattue, puis une fois certain d'avoir distancé les engeances démoniaques, ils s'arrêtèrent à la croisée des chemins entre la grand-route et la piste qui menait au pont nord-est de Méliétel. L'incursion dans la ferme avait bien failli se révéler mortelle pour eux, cependant ce n'était qu'un modeste tribut comparé aux deux montures qu'ils avaient ainsi récupérées. Maintenant ils ne leur restaient plus qu'à rejoindre le père de Darian au domaine Allister et s'en serait finit de tout cette enfer, si rien de fâcheux ne leur arrivait dessus en cours de route.

   Dans le sillon de l'horizon rougie, se détachait les immenses flammes voraces qui dévoraient les rares bâtisses encore debout de Méliétel. Le ciel lui-même semblait s'être mué en un véritable brasier ardent. L'incendie qui ébranlait le berceau de leur enfance s'érigeait comme le bûcher de leur vie passée. Ils pouvaient reconstruire le village, ils ne ramèneraient pas les morts à la vie. Alcid, Thiklès, les habitants du village, rien ne serait plus jamais pareil.

   Ils restèrent en silence au milieu de la croisée pendant un moment, comme pour reprendre leurs esprits. Camillia se mit à scruter les visages. L'air de Darian était sévère et tiré, celui de Tempérance, entre la fatigue et l'anxiété. Pour Ralfel, tout n'était que douleur et crispation. La jeune femme hésita à prendre la parole, après tout elle n'avait rien d'un leader, au contraire de Darian qui avait su les fédérer depuis le début de la fuite. Et ce fut lui qui finit par rompre le silence pesant.

   — On y est presque maintenant les amis. On n'a plus qu'à traverser le bois et nous serons à destination. Raf... Raf tu vas bien ?

   Le fils du tanneur s'affaissa brusquement sur le rouan, prêt à dégringoler au sol. Tempérance l'attrapa par l'épaule in extremis malgré sa frêle constitution. Darian sauta à terre et se précipita vers son compagnon qui venait de perdre conscience. Il le prit dans ses bras et le fit glisser à terre tandis que Tempérance quittait à son tour les étriers.

   — Que lui arrive-t-il bon sang ? fit-elle en s'approchant.

   — Je ne sais pas – Darian se mit à entrouvrir la tunique salie du tanneur – Il a bien dit que les crochets de l'araignée l'avaient éraflé.

   Tempérance passa la main contre la tempe dégoulinante de sueur de Ralfel.

   — Il est brûlant de fièvre ! s'emporta-t-elle

   Ce que découvrit Darian ensuite ne fut guère mieux. Entre les pans de la cotte, la peau de Ralfel était rouge et boursouflée, teintée de veinules violacées qui entourait la piqure de l'arachnéenne. Le venin était en train de se répandre dans son organisme.

   — C'est moche... souffla Darian.

   Camillia sentit son bas ventre se tordre de douleur, allaient-ils encore perdre l'un des leurs ? Les larmes montèrent aux yeux de Tempérance tandis qu'elle s'acharner pour faire sortir Ralfel de l'inconscience.

   — Son organisme a dû être infecté par le crochet de l'araignée, poursuivit le jeune Allister.

   — Tu penses qu'il survivra jusqu'au petit matin ? l'interpella Camilla froidement.

   Les yeux de Tempérance lancèrent des éclairs dans sa direction à cette perspective.

   — Je pense oui... Le venin va mettre du temps avant d'agir, mais il aura besoin de soin.

   — Que devons-nous faire alors ?

   Les pensées de Camillia commençaient à s'embrouiller, certes elle appréciait la compagnie de la fille du bourgmestre et du meilleur ami de Ralfel, mais si ces derniers commençaient à les ralentir... Il n'y aurait aucun choix à faire entre eux et Darian en cas de danger. Seul son bien-aimé comptait pour elle. Darian prit un instant pour réfléchir puis reprit la parole.

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