I
Ce fut la douce brise qui flatta ses pommettes qui fit revenir à lui Darian Allister. Il pouvait sentir les tiges de la pelouse rafraichies par le rosé lui chatouiller la nuque. Dans ses poumons s'engouffrait l'air pure du matin au fil de ses inspirations. Dans l'immensité du ciel s'élevait peu à peu l'éclat solennel d'Astalyone, ses rayons réchauffèrent le corps du jeune homme.
Il demeura ainsi, son esprit embrumé par de sinistres songes. Tour à tour dans son esprit s'enchainaient les images : les loups cornus, les araignées à figure humaine, de sombres silhouettes juchées sur de noires montures qui rejoignent une horizon pourpre. Et les flammes noires qui dévorent tout sur leur passage.
Darian se releva soudainement, les souvenirs revinrent à lui comme un sceau d'eau glacé jeté à sa figure. Mais ce ne fut rien en comparaison de l'effroi qui s'empara de son être ensuite.
Il se trouvait dans un carré d'herbes, à la lisière du bois qui s'étendait autour du domaine Allister. De la fier bâtisse, il ne restait plus que des cendres éparses à peine soulevé par le vent. Il se rapprocha, boitant de la jambe droite. Il appela tour à tour Elyre et Arathéa mais rien ne lui répondit. Lui-même n'y croyait plus. Même le corps de Camillia avait disparu du jardin.
Il enjamba les restes calcinées de plusieurs planches en bois et se rendit au milieu des débris du manoir. Il s'agenouilla et se mit à chercher parmi la cendre et la poussière. Chercher quelque chose qu'il redoutait de trouver. Au bout d'une demi-heure sa main finit par se refermer. Noire et strié, un crâne dénué de mâchoire puis ensuite des bouts d'os, de ci-de-là une clavicule, un tibia puis une phalange.
Darian repoussa les ossements au loin et se recroquevilla sur lui-même. Prostrée ainsi, il voulut pleurer, lui qui avait tout perdu. Mais les larmes ne vinrent jamais, elles ne s'étaient que trop écoulées depuis les prémices de cette funeste nuit.
Il n'y a que la mort qui t'attends au bout du chemin Allister. La mort pour toi et tous ceux qui te sont chers. Le cristal l'avait prévenu et lui n'avait pas écouté.
Une pensée l'ébranla alors.
Pourquoi ai-je survécu ? Comment ai-je pu me retrouver en dehors de la maison ?
Une bourrasque d'air froid souffla sur la ruine suivit d'un sifflement aigue. Darian sentit quelque chose se rapprocher à toute vitesse. Son sixième sens s'alerta. Sans réfléchir il fit une roulade sur le côté. L'aiguillon le frôla de quelque centimètres avant d'heurter le sol. Le sifflement, c'était le Chant qui venait de l'avertir.
Il bondit sur ses deux jambes et se retourna pour fuir. Une Arachnéenne se tenait devant lui, ses énormes lames de faucilles prêt à frapper. Sa longue chevelure corbeau soulevé par le vent laissait apparaître un visage gracieux et juvénile. Elle lui adressa un sourire tout en jouant avec sa langue.
— C'est donc entre mes crochets que tu es tombé petit oisillon. La mère de couvée sera ravie de l'apprendre.... Enfin si je t'amène à elle.
Darian voulut enjamber les débris pour s'enfuir. Sa jambe droite le tirailla de douleur. L'Araignée tendit l'une de ses pattes et le faucha au passage. Le jeune homme roula à terre, s'écrasant dans la cendre et la poussière. Il se demanda pourquoi il avait agi ainsi. Qu'avait-il à gagner à rester en vie ? Ne pouvait-il pas abandonner une bonne fois pour toute, sans amis, maison et famille ? Pourtant son instinct en avait décidé autrement jusqu'à présent, faisant de lui le seul rescapé de la Lune de sang.
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Lame D'Azur
FantasyMéliétel, une bourgade paisible d'Ithac, province fleurissante de l'Empire Nérèvanien. Niché entre les collines et le mont Tageytos, il s'agit d'un village tranquille, sans histoire où les visiteurs sont rares. Darian ne rêve que d'égaler les...