ARYA, LE PSY.
Morne soirée. Table et chaises de bar. Deux verres de vins vides. Feuilles qui volent. Une corde qui ressemble à un ver est distinctement visible, accrochée au fond de la scène, avec un nœud coulant défait. Arya et le psy sont assis face à face. Le psy gribouille sur son calepin.
ARYA. Docteur, je sais très bien que je dis ça tout-le-temps, mais là, je me sens vraiment mal. Toutes mes visions se sont avérées justes, docteur, même celle du lasso et du revolver. J'ai tout vu, docteur, de a à z. Du moment où ils se sont déshabillés l'un devant l'autre au moment où tout a basculé. Il y avait un garçon et une fille. Une fille vraiment très belle, et un garçon vraiment très bizarre. La fille a enlevé sa veste la première, et le garçon a fait pareil avec son pantalon. Puis elle s'est approchée de lui et elle s'est mise à lui déboutonner sa chemise, bouton après bouton, et elle passait la main dans son torse, elle faisait une caresse, puis elle passait au bouton d'en dessous.
Lui, pendant ce temps, il a pris la fille par les hanches et il a saisi les extrémités de sa jupe, alors qu'il y avait déjà quelque-chose qui gonflait dans son caleçon. Il a tiré sur les extrémités de la jupe, et il l'a faite glisser le long de ses jambes pour la lui enlever. Elle avait de si jolies jambes, docteur ! À la peau bien ferme, les mollets bien bombés, toutes blanches. Elle, pendant ce temps, elle déboutonnait le dernier bouton, et elle faisait glisser sa chemise le long de ses bras pour la lui enlever. Il avait un torse imberbe, pas du tout musclé, un peu maigre, même, mais juste un peu.
Le psy déchire la feuille de son calepin qu'il était en train de gribouiller et commence à gribouiller sur une autre.
ARYA. Ils ont commencé à se dire des choses, docteur. Ils ont parlé des rêves qu'ils faisaient le nuit. La fille a dit qu'elle rêvait d'une autre fille qui la harcelait sur le trottoir en lui demandant de la suivre, et le garçon a dit qu'il rêvait d'un corbeau à corps de femme qui le forçait à réciter les verbes irréguliers en anglais. Elle a bombé la poitrine devant lui, docteur, et elle lui a demandé de lui enlever sa chemise de la même manière qu'elle lui avait enlevée la sienne.
Alors il a commencé à déboutonner les boutons un à un, en lui murmurant qu'il ne fallait plus penser aux rêves qu'ils faisaient la nuit, se concentrer sur le moment présent, sur ce dont ils étaient conscients et qu'ils étaient sûrs de pouvoir comprendre, plutôt que sur leur subconscient qu'ils étaient incapables de déchiffrer. Il était au quatrième bouton quand il a passé une main dans sa chemise pour la première fois, et elle a courbé le cou au ciel en poussant un gémissement. Comme elle, régulièrement, il passait sa main sur sa poitrine, sur son ventre, et il lui faisait une caresse avant de passer au bouton d'en dessous.
Le psy déchire de nouveau sa feuille avant d'en entamer une autre.
ARYA. Vous m'écoutez,docteur ?
LE PSY. Bien sûr que je vous écoute, Arya. Continuez.
ARYA. Après, ils étaient tous les deux en sous-vêtements l'un devant l'autre. Le garçon avait le sexe tout gonflé, et la fille, docteur... la fille avec un soutien-gorge rouge et une culotte blanche. Qu'est-ce qu'elle était belle, docteur ! Elle s'est retournée, et il s'est affairé à dégrafer son soutien-gorge, en alternant parfois avec des massages et des baisers, dans le cou, sur les épaules, sur les omoplates.
Et elle, pendant ce temps, a passé ses mains derrière elle pour atteindre le garçon, pour le prendre par les hanches et saisir les extrémités de son caleçon. Elle le lui a enlevé, et il avait un peu de poils sur le pubis, et le sexe en érection, déjà prêt à passer à l'action, docteur. Il était en train de lui embrasser l'épaule, et il a été tellement excité au moment où il a senti qu'elle lui avait enlevé son caleçon qu'il l'a mordue. Et là, comme il avait fini de dégrafer son soutien-gorge,il l'a jeté ailleurs, et la fille était seins nus, docteur...
Le psy jette une nouvelle feuille de son calepin.
ARYA. Ses seins, docteur ! Ils étaient magnifiques. Je n'avais jamais vu des seins aussi magnifiques. Pas trop petits, pas trop gros non plus, et ils étaient tout ronds. Ils avaient l'air très doux, aussi. Vraiment très doux. Moi aussi j'aurais voulu coucher avec une aussi jolie fille docteur, si seulement elle n'avait pas... Les mamelons au bout étaient tout roses, et les tétons dressés et déjà tout durs, docteur.
Alors, il lui a saisi les seins, il s'est mis à les palper, et elle poussé un gémissement, et elle a collé ses fesses juste à côté de son sexe, docteur. Enfin, il a pris l'extrémité de sa culotte sur sa jolie hanche ronde, et il l'a brusquement retirée. Il a poussé un grand cri, et elle aussi, et sa culotte était déjà toute mouillée, docteur. Là, ils se sont allongés sur le lit, et ils se sont remis à se parler. Le garçon disait « Ruhigen ! Sereine ! » et la fille disait « Mörder ! Mörder ! »
Le psy déchire sa feuille, l'air cette fois-ci perturbé non par ses gribouillis ratés, mais par ce qu'Arya lui dit. Il arrête de gribouiller et la regarde pendant qu'elle continue.
ARYA. Alors ils se sont mis à faire l'amour, docteur. À faire l'amour pour de vrai. Il lui demandait si elle avait envie qu'il la rende heureuse, et elle répondait : « Oui ! Oui ! » Et ils criaient, docteur, le garçon criait, et la fille criait. Ils criaient de plaisir, je pense. Sauf que, au bout d'un moment...
Long silence. Arya se met à pleurer.
ARYA. C'était horrible, docteur ! Horrible ! La fille s'est mise à pleurer, et le garçon l'a embrassée en lui demandant ce qu'il lui arrivait, et là elle a dit qu'elle ne pouvait pas, que ça la faisait trop penser à Royaline, et le garçon a dit que ça lui faisait trop penser à madame Corbeau, et là le garçon s'est mis à dire « Madame Corbeau » au lieu de « Sereine », et la fille a dit « Royaline » au lieu de « Mörder », et ils... ils... La fille a pris un revolver, et...
Bruit de coup de feu. Long silence.
LE PSY. Sereine s'est suicidée ?
ARYA. Sereine, la fille ? Oui, Sereine s'est suicidée, docteur. Cette pauvre fille, si jolie, si belle... elle s'est tiré une balle dans la bouche, docteur.
LE PSY. Et qu'a fait Mörder ?
ARYA. Le garçon ? Il a hurlé « Sereine ! Ruhigen ! Sereine! », et il s'est convulsé de sanglots en serrant le corps encore chaud de sa Vénus morte dans ses bras. Sauf qu'après,il s'est levé, en pleurs, et il est allé chercher une corde, et... Docteur,je l'avais senti ! Les gens qui jouaient aux cow-boys en allemand, le lasso et le revolver, je l'avais senti, docteur !
LE PSY. Mörder s'est suicidé aussi ?
ARYA. Il s'est pendu, docteur !
Long silence. Le psy prend une nouvelle feuille de son calepin et la déchire. Il en fait une boulette. Il la donne à Arya, qui la jette en visant le trou dans le nœud de la corde au fond de la scène. Elle réussit ou ne réussit pas à faire passer la boulette à travers. Un immense coup de vent souffle.
VOIX DE ROYALINE. dans les coulisses Lasso ! Revolver !
Croassements moqueurs. Royaline pousse un rire sardonique.
LES CORBEAUX sur un ton de croassement Keep, kept, kept !
VOIX DE ROYALINE juste avant un nouvel éclat de rire sadique Tu n'as pas envie d'être heureuse, Sereine ?
Noir de transition.
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DYSTOPIA
Acak« Papa ! Papa, j'ai un ver dans l'oreille, papa ! J'ai essayé, j'arrive pas à l'enlever ! » Avez-vous jamais rêvé de pouvoir entrer dans le subconscient des gens ? De savoir ce qu'il se passait dans la tête des violeurs et des assassins ? De pouvoi...