#36 Avenir & Feu de camp

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« Vous avez fait quoi ?! »

Je grimaçai et plaquai une main sur la bouche de Léanne. Crier dans une voiture revenait à casser les oreilles de tous les passagers, et je n'avais pas vraiment envie qu'Emilio fonce dans un mur par notre faute.

« Comment est-ce que tu as bien pu faire ça avec Colin Millers ? » me chuchota-t-elle rapidement.

Je pouvais comprendre son trouble. Moi-même, lorsque j'y repensais, j'avais le sentiment que tout n'était qu'un rêve lointain. Mais alors je croisais le regard de Colin, et je ne pouvais plus douter de ce que nous avions fait. Celui-ci d'ailleurs nous écoutait attentivement, malgré son air désintéressé tourné vers le paysage. J'étais parvenu à le dissuader de s'asseoir au siège passager, pour passer le maximum de temps à ses côtés.

Emilio, Colin, Léanne et moi nous trouvions actuellement dans une petite voiture vieille sans doute de deux décennies, et nous roulions en direction de Tullahoma. Aucun de nous n'avait été dans le Tennessee, aussi l'invitation de la grand-mère de Léanne avait-elle séduit tout le monde. Il avait été décidé que le voyage se ferait en voiture, ce qui revenait à deux jours, et nous étions partis dès le premier jour des vacances de Noël.

« Emilio, tu étais au courant pour les deux tourtereaux ? » demanda Léanne depuis le siège passager.

Emilio soupira lourdement et, sans jamais quitter la route du regard, il pinça doucement la joue de mon amie.

« Tu n'es pas obligée de le crier sur tous les toits. Et non, je ne savais pas non plus.

— Désolé les gars, m'excusai-je. Je n'étais pas certain que Colin ait envie d'en parler... »

À mes côtés, le brun haussa les épaules, et se détacha enfin de la fenêtre à laquelle il avait collé son nez depuis des heures. Je n'aurais jamais cru que Colin puisse être aussi enthousiaste à l'idée de voyager.

« Vu le bruit que fait Léanne, il valait mieux les informer en privé », dit-il simplement.

Je gloussai, tandis que Léanne grognais devant. Cela faisait des semaines que je mourrais d'envie de lui en parler, mais Colin m'en avait formellement interdit. Il préférait que la nouvelle ne s'apprenne que dans un cercle restreint, et étant donné le nombre de personnes qui le détestaient dans le lycée, je pouvais le comprendre.

« Bon, du coup est-ce qu'on peut vous considérer comme un cou– Eh ! »

Léanne venait d'être interrompue par un nouveau pincement de la part d'Emilio, et elle se tût immédiatement, jetant un coup d'œil à Colin. Je les observais, surpris de leur air de connivence. Léanne semblait embarrassée désormais, et tous se plongèrent dans le mutisme.

« Vous me cachez quelque chose ? demandai-je, méfiant.

— Pas du tout », me répondit Colin.

Mais il fuit mon regard, et alors je fus certain que quelque chose m'échappait complètement. Pourtant, malgré mes suppliques, aucun de mes amis n'accepta de m'en parler. Après deux heures, j'abandonnai l'affaire.

Nous nous arrêtâmes dans un motel pour la nuit, et demandâmes deux chambres. Puisqu'il se trouvait au milieu de nulle part, nous avions l'embarras du choix. Nous mangeâmes des sandwichs, puis chacun se retira dans sa chambre. Le lit était confortable, et j'étais heureux de dormir aux côtés de Colin, pourtant je ne parvenais pas à fermer l'œil.

« Colin, chuchotai-je.

— Mmh ?

— Tu dors ?

— Bien sûr que non. »

Cacophonie des cœursOù les histoires vivent. Découvrez maintenant