#12 Un numéro, une chambre, une histoire

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On pouvait me traiter de tous les noms, me donner tous les défauts du monde. On pouvait me traiter d'égoïste, de naïf, d'insensible. Mais je savais reconnaître quand j'avais tort, et à mes yeux c'était une qualité suffisamment rare pour que j'en sois fier. Alors oui, j'avais fait une belle bourde, mais je ne comptais pas laisser la situation telle quelle. Si je pouvais participer un peu aux réparations, j'estimais que ce serait déjà bien.

Je possédais désormais le numéro de téléphone et l'adresse de Léanne Monroe, mais personne envers qui m'en vanter. Ne pas avoir de spectateur me gâchait un peu le plaisir de l'acquisition, et je faillis chouiner à haute voix, avant de me souvenir que si, il y avait quelqu'un.

« Ah ! »

Pitié, faites qu'il ne soit pas déjà parti. Je rebroussai chemin en direction des classes, adressant mille prières à un dieu en qui je ne croyais pas. « Si vous faites en sorte que Colin est toujours dans le lycée, je vous promets que je me convertis ».

Bon, je dramatisais peut-être un peu.

Pourtant mes prières furent exaucées puisque Colin entra finalement dans mon champ de vison. J'accélérai le pas en le voyant parler avec un professeur. Je me demandais si mon petit génie ne s'entendait pas mieux avec les professeurs qu'avec les élèves...

« Colin !

— Isaak ? » me répondit-il, franchement surpris.

Je ricanai et attendis qu'il termine avec son professeur pour entourer ses épaules d'un bras. J'étais si content de le revoir que ça devait sembler louche. On se mit tranquillement à marcher vers la sortie, Colin plus entraîné par ma poigne qu'autre chose.

« Tu sais quoi ? J'ai le numéro de Léanne ! m'exclamai-je finalement, bien décidé à me vanter.

— Et ?»

Je le regardai comme s'il était un extraterrestre. Sérieusement ?

« Et quoi ?

— Qu'est-ce que ça peut me faire ? »

Qu'est-ce qu'il pouvait être exaspérant quand il s'y mettait...

« Dis donc, déjà que ta vie est inintéressante, tu pourrais au moins t'intéresser à celle des autres ! », je lâchai en levant les yeux au ciel.

Cette fois mon ami s'arrêta définitivement et se planta devant moi, le regard sévère. Ses prunelles avaient l'air de dire « réfléchis à ta connerie mon coco », et du coup, c'est ce que je fis.

« Oh... réalisais-je, penaud. Désolé, c'était pas sympa. »

Colin soupira puis haussa les épaules, reprenant la marche. J'en conclus qu'il ne m'en voulait pas et replaçai mon bras sur ses épaules l'air de rien.

« Je disais donc, repris-je, j'ai obtenu le numéro de Léanne, et tu devrais être content pour moi ! »

Je devais vraiment l'ennuyer, parce qu'il soupira un peu plus fort.

« Et pourquoi je devrais être content ?

— Parce que ton meilleur pote a obtenu le numéro d'une fille !

— Pour commencer, on n'est pas meilleurs potes, on se connaît depuis une semaine. Et ensuite... Est-ce qu'elle te plaît ?

— Hein ? Non pourquoi ! »

Je fronçai les sourcils. Quelle question étrange.

« Alors est-ce que tu appartiens à ce groupe de mecs machos qui bombent le torse dès qu'une fille de leur liste sexiste leur donne son numéro ? Parce que dans ce cas-là dis-le-moi, que je ne t'adresse plus la parole.

Cacophonie des cœursOù les histoires vivent. Découvrez maintenant