Chapitre 4

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Au dernier étage de Cobb Hall, ma chambre privée hors de prix comporte un lit extra long pour une personne, une commode, un placard, des rangements, un bureau avec une chaise, un micro réfrigérateur et un four micro-ondes. Je me suis levée très tôt pour avoir le temps de m'entraîner avant la fameuse audition, presque une année passée à ne rien foutre en sport, ce n'est vraiment pas gagné.

Rien n'est encore ouvert, alors j'avale un thé léger et deux ou trois biscuits... des galettes bretonnes. Je n'ai pas résisté à piocher sur la précieuse réserve que ma mère tenait avec amour dans notre maison du Kansas.

Pourquoi faut-il qu'après chaque bouchée, je revoie son beau visage qui me sourit tendrement ?

 Elle semble me dire d'arrêter mes conneries et de me remettre avec Dan, mon ex petit-ami. Je me souviens des efforts surhumains de ce mec, pour tenter de me sortir du trou où j'étais bien décidée à crever lentement. Je ne voulais plus bouffer, boire, et encore moins faire l'amour. Ce n'est pas vraiment l'idéal pour la vie de couple mais Dan était déterminé à tenir bon, alors j'ai abrégé les adieux... je me suis tirée sans laisser d'adresse. 

Je suis loin d'en être fière, je me sens aussi dégueulasse que ce connard d'Amérindien et son horrible façon de m'humilier. Au fond, j'ai peut-être mérité ce genre de chose, parce que je me suis conduite comme une sous-merde avec Dan.

J'enfile un débardeur noir et un legging court. Je planque un jean dans mon sac, je n'aurais sûrement pas le temps de repasser me changer pour la première journée de cours.

Je prends ma voiture et je me rends au NSU Event Center, la blondasse a dit que l'audition avait lieu sur le terrain de basket. En descendant les gradins, je repense à la veille... puis encore à l'autre salopard. J'aurais dû lui balancer deux baffes bien senties. Le pire, c'est que je n'ai aucune idée de son nom et mon enquête piétine lamentablement. En plus, je dois absolument me trouver un job, la chambre seule, l'assurance de ma bagnole sont des luxes qui grignotent rapidement mes économies. Mais j'ai vu que le Flo's café cherchait une serveuse, je ferais peut-être l'affaire avec de la chance.

J'attache ma tignasse bien serrée et commence par des assouplissements légers. Une fois mes muscles échauffés, je tente quelques mouvements simples et j'enchaîne les variantes de sauts, les ponts, les équilibres, les roulades, les pirouettes. Je ne suis pas si rouillée, je décide donc de passer aux choses sérieuses. Je me lance dans une série de rondade, flip, vrille... je m'éclate un peu à l'atterrissage.

Je me suis fait mal car je n'ai pas l'habitude d'évoluer sur un support qui n'amortit pas les chocs. Si j'essaye de réaliser mon programme là-dessus, celui des compétitions, je risque carrément ma peau. Je prends conscience que la Cheer Team fait ça tout le temps sous les applaudissements.

Sans courage, je n'arriverai jamais à rien alors j'enclenche ma musique fétiche. Plus question de plaisanter... je retrouve très vite mes réflexes, ma rapidité, ma puissance aussi. J'ai l'impression d'effectuer un retour dans le temps, comme si l'amour du sport pouvait panser des plaies béantes. 

Charlie et les parents ne sont pas morts, tout ça n'était qu'un mauvais rêve... je vais gagner ce championnat, ensuite on fêtera ça en mangeant du délicieux gâteau breton de maman.

Des sifflements et des acclamations me tirent brutalement dans la réalité.

Merde ! Les RiverHawks au complet sont entrés sur le terrain.

— C'était magnifique, Sweet Heart ! interpelle le grand blond avec familiarité.

Les commentaires sur mon éventuelle agilité dans un pieu fusent comme des giboulées chargées d'un vent froid qui me glace le dos. 

Danse dans mon coeurOù les histoires vivent. Découvrez maintenant