Chapitre 11 - Entrevue

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Deux jours plus tard, je me trouvai assise dans une des salles de l'Ordre

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Deux jours plus tard, je me trouvai assise dans une des salles de l'Ordre. Quand un drame survient, il y a toujours enquête, et dans mon cas cette enquête était double.
D'une part, ils allaient statuer sur ma part de responsabilité dans la mort de Jennifer, mais aussi sur mon empoisonnement. Et quoi qu'ils décident, je devrai m'y soumettre.
Ils sont trois à me faire face alors que je suis seule. Mes parents ont dû rester dehors le temps de mon « entretien. »

En réalité, il s'agit d'un interrogatoire. Cela fait à présent plus de quarante minutes que je parle, et il m'est difficile d'expliquer ce qui s'est passé cette fameuse nuit du 26 septembre.
— Reprenons encore une fois, dit l'un d'eux.
Il s'agit d'un homme maigre et sec. Ses cheveux gris sont coupés courts, comme ceux d'un militaire et son nez, en serre d'aigle, est légèrement de travers, signe qu'il a été cassé par le passé.
La femme à côté de lui se penche vers moi. Elle, je ne l'aime pas du tout. Elle me regarde de haut depuis le début de la séance et son attitude ne me donne aucun espoir quant à ce qu'elle pense de moi. Elle ajoute :
— Ne vous occupez pas de nous raconter les choses dans l'ordre. Nous ferons la part des choses. Contentez-vous de nous rapporter ce qui s'est passé cette nuit-là et ce que vous avez vu.

Bien que la pièce soit chauffée, j'ai froid.
— À quoi bon ? Je vous ai dit tout ce que je savais. Cela fait trois fois que me répète.

Aussitôt les lèvres de la femme se pincent dans un rictus et l'homme aux cheveux gris se redresse et fronce les sourcils.
Les représentants de l'Ordre ne supportent que l'obéissance.
La troisième personne qui les accompagne est aussi un homme. Il est différent des deux autres. Pour être honnête, il n'a pas l'air d'être un des gratte-papiers de l'Ordre. Son costume est bien taillé, dans un tissu de qualité et tout en lui respire le pouvoir et l'élégance. Seulement, il ne m'a pas regardée une seule fois depuis que je suis entrée dans la pièce. Il a l'air de s'ennuyer à mourir et se fiche totalement de mon sort et du jeu auquel se livrent ses collègues avec moi.

— Mademoiselle Grey, dit la femme. Jusqu'à preuve du contraire, vous allez faire ce que nous vous demandons. Reprenez depuis le début.
L'homme au costume élégant soupira et se cala sur son siège tout en croisant les bras.
La femme lui jeta un rapide coup d'oeil inquiet. Manifestement, elle avait peur de lui.
Je m'exécutai et repris depuis le début :
— J'étais sortie avec des amis.
— Nous parlons bien du 26 septembre ? reprit-elle.
— Oui, dis-je avec humeur.
J'avais de plus en plus de mal à cacher mon exaspération.
— J'étais avec des amis...
— Et vous confirmez que vous étiez assignée par l'Ordre à être de garde ce soir-là ?
— Oui, je...
C'est alors que l'homme élégant m'interrompis :
— Nous avons déjà entendu tout cela. Parlez-moi plutôt des visions que vous avez et de vos cauchemars.
J'hésitai et jetai un regard nerveux aux deux autres représentants de l'Ordre. Ils n'osaient rien dire, même si je voyais bien que l'intervention de l'homme les dérangeait.
— Et bien... Depuis, il m'arrive de voir des choses qui n'existent pas.
— Vous avez un exemple ?
— Surtout des monstres ou des créatures. Généralement, c'est comme un effet d'illusion d'optique. Une personne s'approche de moi et je distingue un monstre à la place.
La femme revint aussitôt à l'attaque :
— Quand cela arrive, comment réagissez-vous ? Avez-vous agressé quelqu'un à cause de cela ?
L'homme élégant la fit taire d'un signe de main :
— Et vos cauchemars ?
— Mes cauchemars sont différents. Généralement, je me fais attaquer par des créatures.
L'homme hocha la tête.
— Avez-vous observé autre chose ? Des changements physiques ou au niveau de vos aptitudes ?
J'hésitai.
— N'ayez pas peur, fit-il.
Je considérai de façon incertaine les deux représentants de l'Ordre. Ils me faisaient peur. Ils ne m'aimaient pas et m'avaient condamnée d'avance. Quoi que je dise leur servirait d'argument supplémentaire pour m'enfoncer.

Malgré tout, je me jetai à l'eau.
Je portai la main à mon cou et tirai sur la chaîne en argent qui s'y trouvait, de manière à faire émerger le médaillon de sous ma blouse.
— J'ai réussi à faire marcher une boussole de vérité.
— Quoi ? lâcha la femme, incrédule.
Elle se pencha, scrutant le bijou.
— Comment êtes-vous entrée en possession de ce genre d'objet ? Pourquoi ne l'avez-vous pas confié à l'Ordre ? Vous savez qu'il est interdit...
— SUFFIT ! fit l'homme.
Il n'avait pas crié, mais sa voix, impérieuse, avait claqué dans la pièce telle un coup de fouet.

Dès qu'il fut assuré du silence de la femme, il reprit :
— Comment la faites-vous fonctionner ?
— Je l'ignore. C'est comme si j'entrais en communion avec elle. Si je pense à une chose fausse ou qu'on me dit un mensonge, elle le ressent et émet une sorte de signal.
— Quel genre de signal ?
— Ça dépend. Cela peut aller du frémissement jusqu'à un bourdonnement assez fort.
L'homme hocha la tête :
— Très bien, vous pouvez disposer. La décision de l'Ordre en ce qui vous concerne vous parviendra dans les dix jours.

La femme était sur le point de contester, mais le seul regard de l'homme suffit à la laisser coite.
Je sortis de la pièce, les sentant m'observer.
Je me demandais à quel point j'avais bien pu empiré les choses.

Aleisha Grey - Démons intérieurs - Tome 1 - Wattys2019Où les histoires vivent. Découvrez maintenant