Chapitre 19 - Le conseil académique

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Je n'étais pas au bout de mes surprises

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Je n'étais pas au bout de mes surprises.
Anton me mena jusqu'au bâtiment administratif et une fois de plus ce jour-là, j'y arpentai le dédale de couloirs.
Alors que nous marchions, les mots que j'avais lus, griffonnés sur le message, tournaient encore et encore dans ma tête.

Anton s'arrêta devant une grande haute porte et la désigna d'un mouvement de tête.
- C'est ici. Je t'attendrai ici. Le bâtiment est un vrai labyrinthe, il ne faudrait pas que tu t'y perdes.
D'un geste discret, je m'assurai que mon médaillon était bien dissimulé sous ma blouse. Sans savoir pourquoi, je ne tenais pas à ce que d'autres ne s'attardent sur son existence.
La porte s'ouvrit dans un grincement lugubre, révélant la salle du conseil.

A mon grand étonnement, la pièce était très modeste. Trois personnes me faisaient face. L'homme que j'avais vu au siège de l'Ordre, monsieur Carnegie, Éléanore et un autre homme que je voyais pour la première fois. Ce dernier était revêtu d'un complet gris. Il était si discret qu'il aurait pu passer inaperçu.
Mon cœur rata un battement. Ces gens qui me faisaient face m'intimidaient.
Carnegie s'adressa à moi :
- Mademoiselle Grey, entrez ! Fermez la porte derrière vous.

A peine me suis-je exécutée que l'atmosphère feutrée de la pièce me frappa. Ici, tout les sons étaient atténués, presque avalés.
Tous trois me dévisageaient. C'en était intimidant.
Carnegie brisa une nouvelle fois le silence, rendu plus épais maintenant que j'avais fermé la porte :
- Vous voici donc parmi nous.
Il m'adressa un sourire étudié tandis qu'Éléanore tendait le menton vers moi. Seul l'homme au complet gris resta imperturbable.
- Avant que vous ne commenciez votre nouvelle vie à Green Point, je souhaitais m'entretenir avec vous. Comme vous vous en doutez déjà, la plupart des élèves que vous rencontrerez ici ont une histoire. Tous cependant n'en ont pas une aussi intéressante que la vôtre. Plusieurs ici ont subi une contamination démoniaque, mais généralement sans conséquence. Celle que vous avez subie, par contre, et le fait que vous soyez encore en vie aujourd'hui est tout à fait stupéfiant. Personne n'a jamais survécu au venin d'un Garagon. Vous êtes la seule. Cela fait de vous une personne très spéciale.
Une lueur s'alluma dans son regard tandis que mon malaise s'accroissait.
- J'ai convaincu les référents de l'Ordre de vous transférer à Green Point. Cependant, je dois vous avouer que je ne l'ai pas fait sans arrière-pensée.
Je me raidis et les mots du message que j'avais retrouvés dans ma chambre dansèrent une nouvelle fois devant mes yeux.
- Je pense que le venin du Garagon a altéré votre organisme d'une façon plus qu'unique et que vous avoir auprès de nous, pourrait constituer un atout non négligeable.
Carnegie se tut et laissa le silence se refermer sur nous.
Il attendait visiblement une réponse.
Je me raclai la gorge et pris la parole. Je fus surprise par le ton étouffé de ma voix.
- Je... Je ne suis pas sûre de comprendre.
Carnegie se redressa sur son siège, les yeux rivés sur moi. Je me sentais comme une proie prise dans le regard d'un prédateur.
- Vous savez, l'Ordre a une manière de fonctionner qui lui est propre. Divers programmes, dont certains expérimentaux, sont développés chaque année dans le plus grand secret. Green Point joue un rôle central dans certains de ces projets et vous, Aleisha Grey, vous comptez aujourd'hui comme un élément central pour nos projets.
Je plissai les yeux, sur mes gardes.
Tous trois avait l'air de chiens affamés prêts à me tailler en pièce.
Il n'était plus temps pour moi d'être timide. Malgré tout, je pris sur moi et, rejetant la tête en arrière, je les défiai du regard.
- Qu'attendez-vous de moi exactement ?
- Connaissez-vous votre statut actuel ? demanda Carnegie
- Mon statut ?
De quoi parlait-il ?
Il ménagea un temps de silence un peu trop long et trop théâtral à mon goût.
- Oui, votre statut. Aux dernières nouvelles, ou plutôt depuis ce matin très exactement, vous êtes ni plus ni moins que la propriété de l'Ordre.
Il marqua un temps d'arrêt avant d'ajouter avec un sourire carnassier :
- En d'autres mots, aux yeux de l'Ordre, vous n'êtes rien de plus qu'un instrument, une sorte d'esclave.
Je me rappelai alors le papier qu'Éléanore avait donné à signer à maman, celui leur donnant droit de vie et de mort sur moi et frissonnai.
Je sentis un mélange de désespoir et de rage bouillonner en moi. L'Ordre n'est que ce qu'il paraît être : un ensemble politique peuplé de profiteurs animés par des intérêts égoïstes. Même la raison d'être de l'Ordre est viciée : la lutte contre les démons n'est qu'un prétexte pour asseoir le besoin de pouvoir de ses dirigeants.
- Aussi, j'ai un marché à vous proposer, déclara-t-il.
J'étais littéralement prise au piège. Coincée du début à la fin. Mais qu'est-ce que l'Ordre pouvait bien me vouloir ? Je n'étais même plus fonctionnelle comme chasseuse de démons depuis que j'avais sans cesse des hallucinations.
Je m'appliquai à respirer et à ignorer les sentiments contradictoires qui m'habitaient. Aussi, les poings serrés si fortement que mes ongles entamaient mes paumes, je m'entendis dire :
- Je vous écoute.

Aleisha Grey - Démons intérieurs - Tome 1 - Wattys2019Où les histoires vivent. Découvrez maintenant