CHAPITRE 49 - Des légendes et des larmes

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Lovio était assis dans l’herbe près de la barrière protégeant le village de Toal quand les deux étrangers arrivèrent. Etant tout de même assez loin d’eux, il ne put les distinguer correctement, mais il reconnut la grande silhouette droite et fière d’une Piaf au plumage mauve, et celle recourbée d’un Hylien moyen à la peau brunâtre. Dès leur soudaine apparition, ils avaient été entourés par une foule de villageois, attirant rapidement l’attention d’Hönir. Ce dernier s'était vite fait attaquer par la Piaf, et il supposa alors qu’elle l’avait pris pour son maudit de frère, Ganondorf.
Après ça, Lovio n’avait pas pris la peine de suivre le dénouement de l’irruption des deux énergumènes, préférant reprendre la position qu’il avait avant d’être dérangé, ce qui veut dire couché en étoile sur le sol, les bras derrière la tête et Tapis lui tenant compagnie à côté de lui, tous deux contemplant les nuages dans le ciel.
La veille, il avait, comme tout le monde, été voir Link à la forge, mais il avait vite vu que reforger l'épée prendrait du temps et que son ami, absorbé dans son travail, n'avait pas besoin de lui, aussi était-il reparti. Il avait traîné un peu avec Hergo et Hönir, et ce matin, Link avait repris le travail. Il avait entendu les coups de marteau sur l'enclume de loin. Les autres étaient allés s’enfermer dans la bibliothèque avec le nouveau Sage de l’Ombre, laissant seul le pauvre Lovio. Mais, honnêtement, cela ne le dérangeait pas vraiment. Au moins, pouvait-il avoir son petit moment de répit à lui, laissant les choses importantes aux « grands ». Le violet soupira, imité par un mouvement de soulèvement de Tapis. Il regardait les nuages avancer dans le ciel, rêvant d’aventures épiques et de voyages aux allures de contes de fées.
- Dis, Tapis, tu crois que le monde ne se résume qu’à Hyrule ? demanda Lovio sans vraiment y faire attention, attendant la réponse de son compagnon.
Après un petit moment, il souffla :
- J’espère que tu as raison.
Un brin de tristesse passa sur le visage du violet, quand tout à coup, une tête apparut au-dessus de lui, cachant le ciel bleu avec une tignasse de cheveux bruns et un grand sourire béat.
- Tu penses vraiment que le monde n’est qu’Hyrule ? lui fit remarquer le trouble-fête.
Lovio se releva sur les coudes au moment où la tête repartie, et il observa Era parader autour de lui en tenant sa robe rose du bout des doigts tout en fredonnant. Il le regarda un moment, trouvant vraiment le garçon étrange.
- Toi pas ? demanda Lovio, le regard perdu dans le vague. Je n’ai jamais quitté Hyrule, alors je me demande c’est tout…
Era s’arrêta de danser et s’assit en tailleur devant son ami, imité par Tapis qui se recourba pour adopter plus ou moins la même position. Le garçon commença alors à parler en faisant de grands gestes et avec le plus grand des sourires, faisant rêver le violet.
- Et si je te disais qu’au-delà de ce pays, se trouvent d’autres encore plus grands, remplis de populations toutes différentes, aux cultures variées et aux croyances discordantes, aux villes à l'architecture grandiose, comme venue d’un autre temps, me croirais-tu ? énonça-t-il avec un sourire malicieux à la fin et des yeux pleins d’étoiles.
Lovio ne savait quoi répondre. A vrai dire, il aurait bien voulu croire le jeune homme, lui qui n’avait jamais vu plus loin que les montagnes semblant encercler Hyrule. Mais le doute le prenait quand il se rappelait l’étrangeté du garçon et ses manières assez… spéciales de s’exprimer et d’exagérer les choses. Pourtant, ces derniers se dissipèrent à la vue de Tapis semblant s’enthousiasmer tout seul devant les paroles d’Era, comme en proie à d’anciens souvenirs. Alors, Lovio sourit à l’énergumène devant lui, l’incitant à continuer, au plus grand bonheur de ce dernier et de leur compagnon de tissu.
-Tu vois, à l’extrême Sud-Est du pays, se trouve une immense mer de sable, semblant infinie, où ne règne que désespoir et chaleur accablante, pire que le désert Gerudo, commença Era, s’appliquant sur sa gestuelle , animant ses paroles comme si elles étaient vivantes.
- Comment cela peut être pire que le Désert Gerudo ?! Il n’y a pas pire comme endroit ! s’exclama le violet, ahuri devant la déclaration de son nouvel ami.
- Et bien, parce que ce n’est pas vraiment un désert, mais une mer de sable, comme je l’ai dit à l’instant. Là-bas, le sable y est animé, formant vagues et remous où y voguent des navires de pierres. Au-dessus fouette un éternel vent de grains de sable bouillants, brûlant la peau, s’incrustant dessous, et donc très mortel, appelé Khamsin. Personne n’ose s’y aventurer, sauf les plus téméraires, les voleurs ou les exclus, expliqua-t-il minutieusement.
Lovio eut alors des frissons d’effroi en l’entendant : une mer de sable où s’abat un vent mortel ? Oui, c’était définitivement bien pire que le Désert Gerudo, paraissant totalement inoffensif à côté avec ses petites tempêtes et ses petits sables mouvants. Era continua son récit, appréciant le regard que portait sur lui le violet, à la fois émerveillé et envieux.
- Mais hormis ce détail, plus loin encore à travers cette mer, alors qu’Hyrule n’est plus que visible par un petit point, se trouve une gigantesque cité jaspe ! Les habitants de là-bas sont en tous points différents des Hyruliens, sans pour autant s’en éloigner, les deux pays n’en formant à l’origine qu’un seul, faisant peut-être cousins les doyens des deux populations. Car en fait, cette cité se trouve dans le pays de Lorule, véritable île flottante dans les airs, à plusieurs kilomètres au-dessus de la mer, et presque aussi grande qu’Hyrule ! Les habitant du pays sont très friands de pierres précieuses, vouant presque un culte à leurs attributs, et la pauvreté y est rare. Mais la ville la plus flamboyante est la cité dont je t’ai parlé, capitale du pays et nommée Lorulia, en hommage à sa fondatrice, qui a également donné son nom à la famille royale. La ville est constellée de pierres précieuses, principalement couverte de jaspe sur les murs des maisons, mais également parsemées sur la route et les fonds des fontaines.  Là-bas, la population porte d’étranges vêtements faits de riches étoffes blanches et bleues, contrastant avec leurs yeux et leurs cheveux. A l'image des Gerudos qui ont toutes les cheveux flamboyants, les leurs sont tous bleus. Sauf que lorsqu’ils naissent, ils ont les cheveux blancs, à l’inverse de nous qui les avons blancs quand la vieillesse nous gagne. Plus ils grandissent, plus leur chevelure s’obscurcit, pour finir presque noire avant leur mort. Ils ont en général les yeux verts, bleus, violets, ou jaunes, et, tu vas halluciner : ils peuvent utiliser la magie !
Lovio écarquilla ses yeux déjà bien ouverts.
- L-la magie !? Elle existe donc vraiment ?! demanda-t-il, ahuri par cette nouvelle.
- Oui ! Et elle est également utilisée en Hyrule ! Comment crois-tu que ce cher Sheik fait pour faire apparaître du vent avec sa lyre ? Et les Sages, tu n’y avais pas pensé ? Ils utilisent de la magie eux aussi, lui fit remarquer le jeune homme en robe avec un sourire narquois.
Lovio n’y avait vraiment pas pensé. Il se sentit bête d’un coup, et rentra sa tête dans ses épaules. C’est vrai : il y avait de la magie ici, sinon Tapis n’existerait pas, et Ganondorf n’aurait pas ses pouvoirs…
- Mais tu m’as dit que tous les habitants pouvaient utiliser la magie, ici ce n’est pas le cas, alors comment ça se fait ?? questionna Lovio, intrigué.
Era se passa une main derrière la nuque.
-Et bien, dès leur plus jeune âge, les enfants de Lorule développent tous une certaine aptitude à la magie, mais différente selon chaque personne. Cela va de simples petits tours de passe-passe en faisant apparaître du feu en claquant des doigts, à pouvoir parler aux animaux ! Mais le peuple ne possède pas de grands pouvoirs. C’est la famille royale qui acquière d’immenses capacités, comme de pouvoir commander les éléments avec un objet, rendant dangereuse son utilisation.
Era fit une pause bien à propos et reprit :
- Malheureusement, c’est à cause de cette disparité que Lorule s’est séparée d’Hyrule, s’exilant eux-mêmes dans le seul endroit inaccessible à toute forme de vie extérieure, voulant la paix la plus absolue ! Ils se sont alors exclus, vivants dans les cieux, loin de tout, dans leur havre de tranquillité, interdisant l’accès à toute personne du monde extérieur…
Sur ces derniers mots, Lovio remarqua que le regard d’Era s'était assombri une fraction de seconde pour venir se faire très vite remplacer par son habituel enjouement.
- Cet endroit a l’air magnifique ! s’émerveilla le violet, les yeux pleins d’étoiles.
Il réfléchit, puis regarda Era :
- Mais, comment tu peux savoir autant de choses là-dessus, alors que personne n’a le droit d’y entrer ? demanda-t-il, tout de même sceptique.
- Parce que j’y suis déjà allé, pardi ! rigola Era. Quand ils m’ont vu arriver, ils ont directement accouru pour m’ouvrir la grande porte en rampant à mes pieds, moi, le Grand Era !
Lovio rigola à son tour en voyant son ami se lever et faire de grandes révérences à des personnes imaginaires.
-Mais oui, raconte encore plus de bêtises que tu ne le fais déjà, ironisa une voix derrière Era.
Lovio se pencha pour voir qui venait de parler, apercevant Sheik adossé à un arbre, non-loin d’eux.  Le jeune homme arrivait de la bibliothèque. Il venait de rencontrer Niyo et Amelina et d'apprendre la mort d'Asphar, ce qui l'avait très fortement contrarié. Il était sur le point de prévenir Link et Zelda à la forge, mais s'était arrêté en entendant les propos fantasques d'Era.
- Ce n’est qu’une légende, ce fameux pays dont tu parles, Lorule, déclara-t-il nonchalamment en se dirigeant vers les deux garçons d’un pas lent.
A ce geste, le Loup s’élança d’un bond vers Lovio pour venir lui lécher avidement le visage, ce qui lui provoqua un fou rire.
- Qu’est-ce que tu en sais, hein ? Et puis j’y suis vraiment allé ! Sinon, comment pourrais-je décrire l’endroit ? geignit Era en se retournant vers son agresseur.
- En lisant les livres parlant de la légende de ce fameux peuple de mages mystérieux, proposa le blond, d’un air las.
- C’est méchant de dire ça ! lança Lovio, défendant son nouvel ami après avoir repoussé un peu le Loup.
L’intéressé ne parut pas s’en formaliser, se contentant de regarder ailleurs.
- Moi, j’aimerais bien aller visiter ce pays ! Que ce soit une légende ou non ! Et j’aimerais aussi visiter tous les endroits que je ne connais pas en dehors d’Hyrule, faire un loooong voyage et connaître chaque parcelle de terre de ce monde ! déclara le violet avec un grand sourire franc. Et je voudrais vous emmener tous avec moi, pour que vous voyez ce que je vois, et que l’on profite tous de ce moment ensemble !
Devant cette déclaration, Era parut comme déboussolé. Il regarda un moment Lovio, comme s’il voulait vérifier qu’il avait bien entendu ses paroles.
-Tu sais, tu me fais étrangement penser à quelqu’un… dit-il simplement d’un ton anormalement sérieux, sans le moindre sourire, le regard posé sur le jeune homme, mais comme autre part, loin dans le passé.
Le temps sembla alors se rallonger, Sheik se tourna vers Era et l’observa, stupéfait du ton qu’avait employé son ami. Un ton que l’on utilisait généralement dans les moments sérieux, où la rigolade n’avait pas sa place. Lovio avait arrêté de rire et fixa l’étrange garçon comme si c’était la première fois qu’il le rencontrait, le détaillant minutieusement. Pourtant, il ressemblait à tout ce qu’il y avait de plus normal, hormis sa robe rose : cheveux bruns, yeux bleus, peau claire… et pourtant, tout dans son attitude paraissait étranger.
- Qui..., commença alors le Sheikah, sourcils froncés.
- Comment se fait-il que tu sois ici ? demanda soudain le brun, changeant totalement de sujet, son habituel ton enjoué et son sourire de retour, mis à part un léger accent pressant dans sa voix.
Le blond comprit alors et se justifia.
- Ils m’ont énervé, alors je suis sorti prendre l’air pour me calmer, et je vous ai vus, déclara-t-il en haussant les épaules. Et si tu veux tout savoir, j’ai commencé à vous écouter quand tu as commencé à parler de la mer de sable.
Les deux amis continuèrent de parler, Era taquinant Sheik comme à son habitude, alors que Lovio fixait toujours le garçon en robe, si bien que Tapis n’arrêtait pas de l’interpeller pour attirer son attention. Il trouvait ce garçon de plus en plus étrange, et pourtant tellement familier.

Soudain, un éclair bleu apparut dans le coin de sa vision, le sortant de sa léthargie. Il tourna brusquement la tête, et vit avec surprise un Piaf massif au plumage bleu ciel se poser doucement au sol, semblant être passé au travers du dôme de protection. Ses deux amis l’avaient également vu, et Sheik accourut à la rencontre du nouveau venu, suivi par les petits sautillement d’Era. Tapis s’envola lui aussi, et glissa sous le violet pour le mettre sur lui dans le but de suivre ses compagnons. Une fois arrivé, il se retrouva dominé de trois têtes par le Piaf, alors même qu’il se trouvait à un mètre du sol avec Tapis.
- Bonjour, Toaliens, je me nomme Asarim, conteur d’Hyrule, annonça solennellement l’intrus avec prestance.
- C-conteur d’Hyrule ?! V-vous êtes le célèbre Piaf Asarim ! s’exclama Lovio, des étoiles pleins les yeux. Vous êtes connu dans tout le pays pour vos récits et histoires semblant sortir d’outre-tombe !
- Merci pour cette attention, jeune Hylien, fit l’intéressé en amorçant une légère révérence. Dis-moi, nos chemins se sont-ils déjà croisés ? Tu me sembles étrangement familier.
Le violet allait répondre positivement, quand Sheik intervint brusquement :
- Célèbre ou pas, comment avez-vous fait pour traverser la barrière ?! Elle n’est pas censée être traversable  ! s’énerva-t-il un peu. Et puis que nous voulez-vous ? Il y a assez d’intrus dans ce village !
Le Piaf haussa un sourcil et regarda le champ de force derrière lui et sembla la découvrir.
- Excusez-moi, mais je ne l’avais pas vu, expliqua Asarim d’un air nonchalant, puis il dit en se retournant : Je suis ici car j’aide une amie à moi à retrouver ses anciens compagnons.
A ces mots, le Sheikah regarda derrière l’énergumène sans pourtant voir ne serait-ce que l’ombre d’un individu. Mais à ce moment, un petit point blanc passa devant son regard pour venir se poser dans l’aile ouverte du grand Piaf.
- Voici Sekiro, âme vagabonde et solitaire ayant perdu son futur dans un passé tragique, mais cherchant à présent sa famille d’antan, déclara-t-il d’un ton grave en montrant le minuscule oisillon dans sa paume.
Sheik resta bouche-bée. Était-il sénile ou fou ? il se le demandait bien. Mais à côté de lui, pendant qu’Era rigolait sans retenue, Lovio fit une remarque pertinente :
- N’est-ce pas un Shiro ? L’oiseau des âmes ? demanda-t-il en pointant du doigt la boule de plume blanche.
- C’est exact, affirma Asarim.
Bien évidemment, Era demanda alors ce qu’était un Shiro, exprimant tout haut la question que refusait de poser Sheik.
- C’est un petit animal, en général un oisillon, dans lequel on intègre une âme défunte pour qu’elle puisse revenir dans le monde des vivants finir la quête qu’on lui avait donnée, expliqua le violet.
- Ooooh ! fit le brun en robe pendant que le Piaf acquiesçait.
- Et d’ailleurs, je vois que vous avez déjà un Shiro que l’on ne voit pas de cette taille tous les jours, remarqua l’oiseau en désignant d’un signe de tête le Loup.
Ce dernier, assis à côté de Sheik, baissa humblement la tête, comme un salut que seul le Piaf pouvait comprendre.
- Mais du coup, ça ne nous dit pas ce que vous nous voulez, s’exaspéra le Sheikah alors que l’oiseau souriait devant le geste de l’animal.
-Et bien, je ne peux pas vous l’expliquer, mais cette chère Sekiro cherche ses amis, et nous venons de les trouver. Seulement, l’ancien nom de la défunte ne peut plus être prononcé, ce qui risque de ne pas nous faciliter la tâche, expliqua Asarim à son tour.
Sheik, énervé par cette accumulation d’arrivées inattendues et par le reste, allait s’emporter quand ladite Sekiro sauta pour voltiger tant bien que mal vers le jeune Lovio qui la rattrapa au creux de ses mains juste avant qu’elle ne chute. Le temps sembla s’arrêter alors que le violet regardait la petite boule de plumes et que les autres les observaient.  Lentement, Sekiro cligna des yeux, et Lovio sentit une pression sur sa tête, lui la faisant avancer sans qu’il ne le veuille vers ce petit être jusqu’à faire toucher leurs fronts, fermant alors automatiquement leurs yeux.
C’est alors qu’il la vit. Cette femme qui hantait son esprit depuis maintenant presque un mois. Cette femme élancée, à la chevelure de feu et aux yeux d’ambres, à la poigne de fer et à la lame meurtrière. Cette même femme qui avait jadis fait chavirer son cœur, mais qui avait également connue une funeste fin, égorgée comme un vulgaire animal par un homme qui l’aimait d’une bien triste manière. A ces brusques souvenirs, des larmes qu’il avait refoulées depuis longtemps lui chatouillèrent les yeux, mais pourtant, ce n’est pas cela qui les fit couler sans retenue. C’est le fait de la voir là, devant lui, dans un endroit inconnu, entourée de murs noirs aux inscriptions bleutées. C’est de la voir lui parler, mais de ne pas l’entendre. C’est de la voir vivante, lui souriant comme jamais elle ne lui avait souri. C’est cela qui le fit pleurer, qui lui fit se mordre la lèvre tellement fort qu’il faillit saigner, qui fit secouer ses épaules de violents sanglots, obligeant Era à venir le réconforter.
Lorsqu’il rouvrit les yeux, ce fut ceux de Sekiro qui le firent céder. Ces yeux au regard tendre qui le firent s’agenouiller devant tant de culpabilité et de tristesse accumulées. C’est alors recroquevillé sur ses genoux, sanglotant bruyamment et tenant Sekiro contre son cœur qu’Asarim vint s’accroupir devant lui pour l’entourer de ses ailes, ainsi que pour lui délivrer un message dont lui seul put comprendre le sens.
- Je suis l’Esprit du Temps, celui qui parle aux âmes et qui les apaise. J’ai vu ton destin, et je n’y ai pas senti de pleurs, alors sèche tes larmes et affronte la vérité pour réaliser ta destinée.
Après quelque secondes, le Piaf se releva doucement, laissant le jeune homme se remettre de ses émotions. Il fit alors face aux deux autres.
- Ce qui m’amène enfin à mon but premier. Je ressens la présence de trois Sages dans ce village, ce qui ne devrait pas être le cas, déclara-t-il. Pouvez-vous m’indiquer leur emplacement je vous prie ?
Sheik releva un sourcil, surpris. C’est donc Era qui répondit à sa place.
- Trois sages ?! Je croyais qu’il n’y avait que Jehd ici ! s’exclama-t-il, surpris de cette nouvelle. Et puis, où devraient-ils être si ce n’est à Toal ?
- Dans les Bois Perdus, pardi ! dit une voix derrière eux, qui se révéla être le bibliothécaire. Nous devons expressément aller chez le Vénérable Arbre Mojo !
- Hein ? fit le brun en se tournant vers le nouvel arrivé. Faut encore partir ?
- Oui, mais on t’expliquera tout, pour l’instant, réunion dans la bibliothèque, déclara-t-il, puis dans la plus simple des simplicités : Oh, bonjour et bienvenue Maitre Asarim.
Sheik et Era se regardèrent, perplexes. Maitre ? Mais avant que l’un d’entre eux ait pu poser la moindre question, le Sage de l’Ombre était déjà reparti.
- Bon, je crois qu’on devrait y aller, non ? fit Era, ne sachant pas vraiment sur quel pied danser, avec Lovio encore tout sanglotant au sol.
Sheik acquiesça, et s’en alla au lieu de rendez-vous sans un mots, seul. Le brun se tourna vers le violet, et posa une main réconfortante sur son épaule.
- Tu viens ? dit-il, un air peiné sur le visage.
Dans un reniflement sonore, le jeune Hylien se releva en s’essuyant les yeux rougis par le chagrin.
- J’arrive, informa le garçon avec un sourire forcé, laisse-moi juste régler un truc et j’arrive.
Era lui sourit chaleureusement, et parti à la suite du blond en courant, ne voulant qu’une chose, taquiner son ami. Quant à Lovio, il se tourna vers Asarim, qui était jusque-là resté silencieux.
- Merci… souffla le violet.
- Je vous en prie, fit le Piaf avec une révérence.
- Pas besoin de tant de manières, rigola distraitement Lovio, comme ailleurs.
-Si vous saviez… murmura l’oiseau. Sachez cependant que plus jamais Sekiro ne pourra être considérée comme un véritable être vivant. Aller de l’avant, messire, vous avez des amis qui ont énormément besoin de vous, ne les oubliez pas à cause d’un deuil désormais inutile.
Le violet allait dire quelque chose, mais le Piaf l’arrêta d’un geste d’aile.
- Je ne puis me permettre de rester plus longtemps et d’encourir à modifier le futur plus qu’il ne l’est déjà, déclara-t-il humblement en reculant de deux pas. Je vous dis alors au revoir, et très certainement à bientôt.
Puis, dans un battement d’ailes, il s’éleva dans les airs et traversa la barrière en un nouvel éclair bleu, éblouissant au passage le violet qui dû se cacher les yeux. Il cligna des paupières plusieurs fois, essayant tant bien que mal d’effacer le point noir imprimé sur ses rétines. Le jeune Hylien baissa alors la tête vers Sekiro, se retrouvant enfin seul avec elle, malgré la présence peu dérangeante du loup à ses côtés. Il regarda la petite boule de plumes blanches dans ses mains, et lui adressa un regard tendre.

Épopée d'Hyrule: TOME 1 , Les élus  [ EN CORRECTION]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant