CHAPITRE 18 - Le Royaume du Crépuscule

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- Kss kss...

La petite ombre noire, penchée sur le corps de la femme, lui caressait la joue pour la réveiller. Allongée de tout son long sur une stèle dédiée aux nouveaux arrivés, elle avait fait son apparition au royaume quelques heures auparavant. Les nouvelles âmes étaient arrivées par dizaines ces derniers temps, cela n'augurait rien de bon. La place du palais était anormalement bondée, soudainement animée par toutes ces âmes en peine qui erraient en ruminant leur vengeance envers les assaillants qui les avaient envoyés « de l'autre côté ».

- Je me demande ce qu'il peut bien se passer là-bas pour qu'ils soient aussi nombreux à nous rejoindre, pensa la petite ombre tout haut. Il faudrait que j'envoie mon loup chéri y jeter un petit coup d'œil.

Elle retira avec beaucoup de douceur sa petite main de la joue de l'inconnue. A cette absence de contact, celle-ci se mit à gémir.

- Lo...vio... Hö... Hönir... AH !

Elle se redressa d'un coup sec, portant ses mains à sa gorge, les yeux exorbités et hagards, le visage empli d'effroi.

La petite ombre recula brusquement. Ses petits yeux mystérieux brillaient dans l'obscurité, scintillants et malicieux.

- Kss kss...

La petite ombre grandit et s'allongea en une forme féminine, allongée et gracieuse.

- Où... où suis-je ? demanda Frambra.

Elle toussa frénétiquement. Inconsciemment elle porta ses mains à sa gorge comme si quelque chose la gênait.

- Alors je... je ne suis pas morte ? Où sont les autres ? Qui êtes-vous ?

L'ombre féminine qui se tenait devant elle ne lui faisait pas peur, étrangement. Au contraire, elle la rassurait.

- Je suis la maîtresse de ces lieux, dit-elle en s'avançant de nouveau vers Frambra, sortant ainsi de l'ombre pour se dévoiler.

- D'ordinaire, ici, mes sujets me nomment Princesse, mais tu peux m'appeler Midona.

Frambra eut du mal à quitter Midona des yeux. Elle n'avait jamais rencontré quelqu'un avec cette peau bleutée et noire. Ses cheveux roux rappelaient immanquablement les siens, mais la ressemblance avec les Gerudos s'arrêtait là.

La jeune femme finit par regarder autour d'elles. La pièce n'était pas très grande, avec des murs de pierre sculptés de très nombreux bas-reliefs dont la signification lui échappait totalement. Des lignes lumineuses, d'un bleu tirant sur le vert, parcouraient la pierre, éclairant faiblement la pièce. Dans un coin, un orbe de taille respectable apportait un complément de luminosité très doux pour les yeux. Tout ici était apaisant, calme et Frambra s'y sentait bien, en sécurité. Néanmoins, ses doigts revenaient sans cesse à sa gorge, cherchant une trace de la blessure mortelle qu'elle pensait avoir reçue. Elle finit par sentir une longue cicatrice parfaitement lisse, comme si elle était déjà ancienne. Le cœur de Frambra s'emballa soudain alors que les souvenirs l'assaillaient. Lovio prit en otage par Ganondorf. Ce monstre qui réussissait à l'attraper encore une fois. Cette peur panique lorsqu'il avait posé ses mains sur elle et qu'elle avait senti son souffle près de son oreille. Le froid du métal sur sa gorge. Sa voix rauque si semblable à celle d'Hönir mais dans laquelle elle sentait toute la malignité à chacun de ses mots. Les visages horrifiés de son ami et de Lovio lorsque la lame avait tranché sa gorge. Cette douleur insupportable qu'elle avait ressentie et la chaleur de son sang qui s'épanchait, impossible à retenir. Sa vie qui s'échappait.
- Respire calmement, lui dit Midona en prenant doucement sa main pour l'ôter de sa gorge. Ce ne sont que des souvenirs. Plus rien ne peut t'atteindre ici, ni la douleur, ni la peur.

Épopée d'Hyrule: TOME 1 , Les élus  [ EN CORRECTION]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant