CHAPITRE 37 - L'Eveil

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Tout était noir. Aucune lumière ne filtrait ce voile qui le couvrait. C’est pour ça qu’Il trouva cela bizarre que la fine couche d’eau sous ses pieds reflète son image à la perfection. De plus, il n’entendait aucun son, ni bruit, pas même sa propre respiration. Le vide sidéral.
Soudain, un éclair rouge à sa gauche l’éblouit. Puis un vert sur sa droite. Enfin, un bleu, droit devant lui. Les trois faisceaux tournèrent d’abord autour de Lui, de plus en plus vite, venant se confondre en une seule couleur d’or, resserrant petit à petit leur étau, jusqu’au moment où la lumière fut si proche qu’il crut pouvoir la toucher, comme attiré par elle. Mais au moment où ses doigts auraient dû l’effleurer, elle explosa soudain en un millier de particules violet sombre, disparaissant au contact de l’eau. Mais à peine eut-il le temps de se poser des questions, qu’elles se rejoignirent toute en un seul point aussi vite qu’elles s’étaient séparées, formant cette fois, une figure solide. Une sorte de losange bicolore constitué de deux triangles principaux, celui du haut jaune, celui du bas plus noir que le vide l’entourant, dont leurs deux centres étaient éventrés par un autre triangle noir de vide, formant trois petits colorés autour de lui. De suite, il sut de quoi il s’agissait, bien qu’il ne l’eût jamais vue sous cette forme : la Triforce. Elle semblait se rapprocher de lui, puis, les trois premières couleurs revinrent, cette fois statiques, flottant autour de lui, comme des âmes perdues.
- Ô valeureux conteur, ta destinée est en marche, déclara la rouge à sa gauche d’une voix féminine désincarnée, à la fois rocailleuse et forte.
- En vue de ces jours funestes, nous t’octroyons ce qui te revient de droit, ajouta la bleue derrière lui, à la voix fluide et douce.
- Mais prends garde, car ce pouvoir désormais tien peut t’être fatal, dit la verte à sa droite, de sa voix claire et mélodieuse.
Ne pouvant prononcer le moindre mot, il se contenta de les regarder, ne comprenant pas, jusqu’à ce que la Triforce se rue sur Lui, le frappant de plein fouet. Il s’attendit à sentir quelque chose, mais rien, comme s’il ne s’était absolument rien passé…
Soudain, il vit.
Il vit comme s’il y était.
Un vieil homme en tunique jaune, lui faisait face, entouré de lumière. Puis il s’effondra, révélant autour de lui une pièce inconnue. Un garçon en tunique verte était accroupi à côté de lui, lui tenant la main, observé en cachette par un autre garçon en tunique violette.
La scène s’obscurcit subitement, laissant avec elle une sensation de vide. De mort.
Puis, la pièce laissa place à l’intérieure d’une charrette. Une vieille femme à la peau toute ridée était couchée là, le souffle douloureux, soutenue par une jeune femme et une adolescente. Le garçon en tunique verte réapparut, accompagné de l’autre garçon ainsi que d’un autre, dégageant une étrange aura, à la peau mate et aux cheveux de feu.
Les images s’assombrirent à nouveau, répandant à nouveau cette étrange sensation de mort. Ensuite, il arriva dans une petite maison, dans le salon. Il y avait trois personnes : le garçon à la tunique verte, un autre jeune homme en combinaison bleu-gris, le visage caché par une écharpe blanche et des cheveux blond devant un œil, ainsi qu’une femme vêtue d'une longue robe et d'un grand chapeau de sorcier violet et rouge avec des cheveux d’un bleu profond. Ils semblaient discuter calmement, jusqu’à ce que l’image s’éclate en mille morceaux et vienne se reformer, recollant les morceaux pour afficher d’autre endroits.
A chaque fois, le garçon à la tunique verte n’était pas loin, accompagné soit de celui à la tunique violette, soit de celui au visage caché. Dans l’une, la vision est concentrée sur un jeune garçon à l’allure de poisson bleu argenté, nageant au côté d’un autre, grand et rouge.
Dans une autre, il put voir un jeune homme en robe jaune et violette, aux cheveux blancs et au yeux émeraude, puis encore une autre, où l’on voyait un homme aux cheveux bruns munie de lunettes et d’un livre entre les mains. Il y en avait une également où se tenait un petit garçon aux cheveux d’or, et vêtu d’une tunique verte, devant un gigantesque arbre, jouant d’un étrange instrument.
Enfin, lorsque l’image se brisa pour se reformer une dernière fois, il se vit lui, couché contre un gros tronc, dormant à poings fermés. Il vit ses plumes bleues légèrement froissées, ainsi que son poncho tout de travers.
Abasourdi par cette vision, il ne remarqua même pas qu’autour de lui, tout était redevenu noir et que les trois lumières s’éloignaient de plus en plus.
- Maintenant, tu sais, déclara la verte. Nous ne pouvons t’en dire plus, valeureux conteur, au risque de modifier le cours du temps, désormais en ta possession.
- Cependant, n’oublies jamais que le moindre de tes choix peut t’être fatal, à toi comme à d’autres, ajouta la bleue. Nous te souhaitons bien du courage. Nous te savons fort, mais es-tu empreint de sagesse ?
- Seul le temps nous le dira, à toi de le lui demander, termina la rouge.
Sur ce, elles disparurent toutes les trois, le laissant seul, dans ce vide oppressant, à observer son reflet perturbé par des ondes invisibles…
Asarim se réveilla en sursaut, dos au tronc de l’arbre où il s’était assoupi, une main sur le cœur. Était-ce un rêve ? Quand bien même en était-il un, il était terriblement réel… Soudain, tous les flashs de personnes lui revinrent en mémoire, mais un en particulier retint son attention, celui du petit garçon en tunique verte, avec le grand arbre. Sans comprendre pourquoi, il sut que ce rêve n’en était pas vraiment un. Il sut également la destination qu’il devrait prendre après avoir rempli sa promesse au petit Shiro…
- Tout va bien ? lui demanda une voix au timbre aiguë et feuilleté.
Asarim releva soudainement la tête, cherchant des yeux l’origine de la voix, étant sûr qu’ils étaient seuls. Puis, son regard fut attiré par une petite boule blanche posée sur un petit caillou à ses pieds. Shiro le regardait avec de grands yeux.
- Il a dû faire un cauchemar… chuchota la même voix, au moment même où le petit oiseau se remit en boule pour dormir.
L’oiseau bleu resta un instant à le regarder, croyant rêver à nouveau.
- Oui, je vais bien, hasarda-t-il, surpris d’entendre sa propre voix.
Shiro sursauta et le fixa intensément.
- T-tu m’entends ? demanda la voix, prudente.
Etrangement, Asarim ne trouva pas cela bizarre de se dire qu’elle venait peut-être de l’oiseau blanc. C’était comme s’il savait tout, et en même temps rien. Par moment, il ne savait si ce qu’il voyait était bel et bien ce qu’il y avait devant lui, ou si ce n’était pas une vision d’un autre endroit, ce qui le déstabilisa fortement.
- Je t’entends, et je suis aussi surpris que toi, qui que tu sois, déclara-t-il en fermant les yeux un instant avant de les rouvrir.
Shiro cligna des yeux une fois, puis deux, puis cinq, le croyant surement fou.
- Et bien… d’accord… Je… je ne sais que dire ! tenta de rire la voix, alors que les yeux de l’oisillon se détournait.
- Alors ne dit rien, petit Shiro, désormais, plus rien ne doit te choquer avec moi, dit Asarim, n’étant pas très sûr de ce qu’il disait, comme si cela était les paroles d’un autre.
Il se leva et proposa son bras à son compagnon de voyage, qui sauta immédiatement dessus pour aller se loger dans le poncho.
- Petit Shiro, plus tard, je dois aller à la rencontre d’une certaine personne. Voudrais-tu m’accompagner ? demanda le conteur en ajustant son accordéon sur son dos.
- Bien sûr, après avoir retrouvé mes amis ! affirma l’oiseau blanc. Mais qui est cette personne ?
- Je ne saurais te le dire, compagnon, ce que je peux t’assurer, c’est que seul le temps pourra me le dire… murmura l’intéressé, comme ailleurs.
Shiro ne dit rien. A ce moment, Asarim sut alors une chose, et il en fut certain. Désormais, Il détenait un grand pouvoir. Il savait tout, entendait tout, mais le plus important, c’est qu’il voyait tout, sous toutes ses formes, dans le passé comme dans l’avenir, mais également le moment présent.

Épopée d'Hyrule: TOME 1 , Les élus  [ EN CORRECTION]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant