Chapitre 4

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Elle ouvrit la bouche pour lui demander ce qu'il faisait ici, pensant que c'était un marcheur de randonnée au repos, ou même un cueilleur de champignons qui se baladait par là.

Pourtant, il n'avait aucunement l'allure d'un sportif ou même d'un habitué de la marche en montagne. Pour arriver au château de sa famille, les visiteurs devaient parcourir de bons kilomètres de distance ; les rares perdus longeaient d'abord leur pelouse, puis la route qui sinuait jusqu'au centre-ville. Il ne s'arrêtaient pas aux abords de chez eux, craignant de passer pour des voleurs, ou des rôdeurs.

Mais ça n'était pas ce qui la dérangeait. Mélanie inspira et loupa presque son expiration en se rendant compte qu'il la dévisageait, elle, depuis l'endroit où il patientait. Il avait les mains dans le dos, certainement pour pouvoir s'appuyer sur l'arbre sans se griffer avec le tronc d'arbre sec. Les cheveux très noirs, ses yeux semblaient voilés par l'ombre des feuillages alentour, leur donnant une teinte noirâtre, un regard sévère qui n'inspirait pas confiance à Mélanie. Il avait des cernes prononcés et les lèvres presque rouges ; une Blanche-Neige masculine. Des mèches bouclaient sur son front, un menton légèrement arrondi lui donnant des traits presque doux, même s'il semblait âgé d'au moins trois ans de plus qu'elle, voire cinq.

Il avait des jambes longues et était chaussé de manière trop élégante pour être un randonneur.

C'était un style à l'ancienne somme toute, mais un détail dans cet étrange portrait frappa particulièrement Mélanie : il n'avait aucune tâche sur ses vêtements, sur son pantalon côtelé ou même la surface de ses chaussures. Ses cheveux étaient bien mis ; étrange pour quelqu'un forcé de marcher quelques kilomètres pour se retrancher dans un tel coin. Était-ce un fils de voisin, un cousin d'entre eux, pour les rares qui habitaient dans un rayon proche?

Cela faisait déjà une ou deux minutes que ce curieux jeune homme la regardait sans sourciller, et sans dire un mot. Il ne semblait ni perturbé, ni étonné, ni même inquisiteur. Il avait tout simplement l'air de l'observer sans vrai intérêt. Sans vrai intérêt, mais fixement.

— Bonjour ? Vous... vous vous êtes perdu ?

Il fit non de la tête, lentement. Contre toute attente, au moment où Mélanie reculait légèrement en vue de s'enfuir en courant, celui-ci ouvrit la bouche pour lui répondre d'un ton lointain:

— Comment vas-tu, depuis ton accident ?

Alors Mélanie eut un léger instant de sidération. Elle pâlit et tous les pires scénarios défilèrent dans sa tête. Elle fit un pas en arrière, volte-face et courut sans demander son reste jusque chez elle.

Contre toute attente elle percuta quelqu'un à trois mètres: sa mère était partie la chercher après l'avoir hélée trois bonnes fois depuis la cuisine. Avant qu'elle ne lui demande ce qu'il se passait, sa fille désigna la forêt en déclarant d'une voix paniquée:

— Maman, il y a un type...il y a un type dans la forêt, je crois qu'il me connaît ; tu l'as vu ?

Cette dernière accourut à la lisière des arbres avec sa fille. Mélanie la conduisit à l'endroit exact où elle avait aperçu l'intrus...mais plus de traces de l'étranger.

Ce côté de la forêt était un espace dégagé, le sol ne vallonnait qu'à quelques clairières de leur espace. Il était difficile de se cacher à cet emplacement sans être repéré. De plus, qu'en était-il des bruits de course ? Sa mère et elle investiguèrent les alentours et hormis une biche, pas une âme ne semblait s'être égarée près de chez eux. La mère de Mélanie resta perplexe, scruta les environs avant de revenir sur ses pas:

— On a qu'à rentrer et guetter s'il revient depuis la cuisine... C'était peut-être juste un vagabond, qui sait?

Mélanie, qui faisait encore face à la forêt et à sa myriade d'arbres que le vent de septembre faisait chuchoter, se retourna vers sa mère avec des yeux effrayés :

— Il a parlé de l'accident, maman. Il m'a demandé si j'allais mieux depuis l'accident.

Sa mère ne répondit rien sur le moment. Puis elles décidèrent de rentrer au plus vite, au cas où l'inconnu se cachait dans un recoin ayant échappé à leur vigilance.

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