Chapitre 5 : L'étrange marque sur ma porte

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DEAN.


On avait transporté Clark à l'hôpital, dans un état critique. La police était arrivée un peu trop tard et l'avait trouvé inconscient au sol. L'inspecteur en charge de l'affaire avait trouvé le conjoint du jeune homme enfermé dans la salle de bain au premier, visiblement en état de choc. Une fois Clark installé dans un lit à Saint Swithin, l'hôpital du coin, l'inspecteur avait emmené son petit-ami dans une pièce à part où il commença à lui poser tout un tas de questions. Dean avait écouté et bégayait des réponses difficilement. Il avait eu à peine le temps d'enfiler un manteau et des chaussures qu'on l'avait emmené à l'hôpital, encore en pyjama. Tout se bousculait dans sa tête... Il avait du mal à y mettre de l'ordre. L'inspecteur, qui l'avait laissé seul pendant un temps pour justement se calmer, revint avec un café du distributeur.

– Reprenez depuis le début, dit-il en lui posant le café devant lui. Ces hommes, qui étaient-ce, des voisins, des vieilles connaissances.

Dean regardait le café noir danser avec la fumée dans son gobelet, les yeux rougis, le teint cadavérique. Il releva la tête vers l'inspecteur et lui jeta un regard noir comme son café, un de ces regards dont il avait le secret.

– Je vous l'ai déjà dit, siffla-t-il sèchement, mais vous ne m'écoutez pas et refusez de voir plus loin que le bout de votre nez. Nous ne les connaissons pas, ce n'était pas des voisins. Ils ont presque battu à mort mon compagnon, des voisins feraient-ils ça ?

– Mais vous leur avez ouvert ?

Le jeune homme serra les dents. Non, il avait ouvert la porte pour voir de plus près des tarés déchiqueter un drapeau LGBT sous ses yeux, une connerie qu'il ne referait plus. Mais ça il lui avait déjà dit, certes d'une façon un peu hachée et incertaine, mais il lui avait bien dit qu'il ne les avait jamais vu de sa vie. Cependant cet inspecteur en carton semblait ne pas vouloir croire ce qu'il lui racontait, sous prétexte que cette histoire de jeu bizarre n'existait pas et que l'article sur le « knock and hide » était faux.

Dean n'irait pas loin non plus en leur disant qu'il avait entendu une voix à peine humaine lui demander de jouer. Au mieux il le prendrait pour un fou, au pire pour un menteur. Le jeune homme croisa les bras, ne touchant pas au café et s'adossa contre le dossier de sa chaise. Il le gardait ici depuis des heures et il n'avait pas pu voir Clark. Ses yeux bleus retombèrent un moment sur le café. C'était la technique du gentil flic, c'est ça ? Il releva ses yeux vers l'inspecteur. Il ne le croyait pas. Sur les lieux du crime, aucune trace de vol ou d'effraction notable, aucune trace d'un drapeau ou de lutte, et les propos de Clark avaient été jugés comme délirants. Son compagnon, lui, était pris pour un taré, ou pire, l'agresseur de Clark. Comment Dean aurait-il pu battre son petit-ami ? Au-delà de tout l'amour qu'il éprouvait pour lui, il était même physiquement incapable de le battre. Clark était littéralement une armoire à glace, et Dean un type lambda. Il retint un soupir et l'inspecteur se crut alors obligé de reprendre :

– Vous ne comptez rien dire ? Rien du tout ?

– Je crois que ce sera inutile, déclara Dean froidement en se levant. Vous ne m'écoutez pas, et vous continuerez à faire la sourde oreille. Je peux m'en aller maintenant ?

L'inspecteur soupira et hocha la tête. Dean quitta la pièce en claquant la porte. Il s'empressa de rejoindre Clark, mais trouva la porte de sa chambre fermée. Une infirmière lui expliqua alors que son compagnon était encore dans un coma léger et qu'il valait mieux pour lui de ne pas le déranger. Elle lui transmit cependant quelques brèves instructions données par Clark lors d'une de ses phases de réveil : rentrer à la maison et mettre de l'ordre. Quand Clark disait qu'il fallait « mettre de l'ordre », cela sous-entendait rarement de bonnes choses. Généralement cela signifiait une jolie dispute en perspective. Dean remercia l'infirmière et rentra.

Those Stories That We Won't TellOù les histoires vivent. Découvrez maintenant