Chapitre 6 : Mon train est en retard

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BRIAN.


La gare centrale située au cœur de la ville était la plus sollicitée que Brian ait jamais vu. Ce qui semblait normal étant donné qu'elle était la seule que cette fichue ville possède. Or quand Brian avait résolu l'énigme d'Andréa, qui n'était pas bien dure d'ailleurs, il s'était dirigé automatiquement vers la seule gare de la ville. Le plus compliqué restait cependant à venir, trouver l'indice suivant dans cette masse de voyageurs. Car s'il s'était effectivement rendu au bon endroit, le téléphone à tête de clown ne lui envoyait plus de message, et ne l'appelait plus. Quant à son propre mobile, Brian ne l'avait pas retrouvé.

On trouvait toutes sortes de personnes en gare. Des femmes éplorées, disant au revoir à un mari partant à la guerre. Des enfants courant, ballons à la main. Des vieux qui passaient le temps, assis sur un banc, l'air rêveur. Des hommes d'affaire très occupés, si occupés qu'ils marchaient à toute vitesse. Et il y avait les gens comme Brian, c'est-à-dire un seul type, perdu au milieu de la foule, à chercher quelque chose qui n'existait. Les mains dans les poches de son trench-coat, il faisait de vagues cercles sans but, jusqu'à ce qu'il désespère et prenne place sur un banc à son tour. Il attendit longtemps. Les minutes s'accumulèrent, et se transformèrent en heures. Les heures s'accumulèrent à leur tour. Alors qu'il commençait à perdre espoir et qu'il commençait à se demander s'il ne valait pas mieux rentrer, un message fit vibrer le téléphone à tête de clown. Brian le dégaina plus vite qu'il n'aurait dégainé un médiateur pour jouer, et il lut le message avec l'attention d'un premier de la classe.

« Va voir le clown qui vend des ballons près de la voie numéro trois. Demande-lui un ballon rouge de la part d'Andrea ».

Brian éteignit le téléphone, jugeant inutile d'essayer de joindre son interlocuteur. Si ce type s'amusait à se donner des airs mystérieux, il n'allait sûrement pas lui répondre. Il joua le jeu, ne serait-ce pour son propre téléphone qu'il cherchait encore.

Trouver le clown ne fut pas bien compliqué, à dire vrai il suffisait de lever un peu le nez en l'air pour voir des ballons se dessiner au-dessus des têtes. De plus Brian était plutôt grand, assez pour remarquer une perruque rouge vif en tous cas. Alors qu'ils'approchait du stand de ballon, il s'arrêta. Il allait hurler s'il voyait le visage de ce type. Oui, il allait hurler et tomber dans les pommes à coups sûr. On ne demandait pas à quelqu'un terrifié parles araignées d'aller acheter un ballon à une araignée ! Oui, enfin l'exemple ne tenait pas debout mais l'idée y était ! Il n'avait pas envie d'aller voir ce clown. Tant pis pour son téléphone, il en rachèterait un neuf et le tour était joué. Il n'avait qu'à balancer ce putain de portable maudit dans une poubelle et c'était réglé. Oui mais... et sa porte qui s'était ouverte toute seule ? Et son téléphone qu'on avait volé ? Quelqu'un savait où il habitait, savait où il se trouvait, en toute heure et en tout lieu. Abandonner ne marcherait pas. Non, il fallait jouer.

– Putain de clown, soupira-t-il en transpirant déjà.

Plus lentement qu'il ne voulait se l'avouer, Brian s'approcha du guichet en évitant de poser ses yeux sur l'homme maquillé en face de lui. Il resta devant le stand, poings serrés, le regard fixant ses godasses, n'arrivant pas à articuler le moindre mot. Le simple fait de savoir qu'il était là lui donnait la nausée. Le simple fait de l'entendre respirer le mettait mal à l'aise. Le simple fait d'exister lui donnait envie de fuir le plus loin possible. Le clown l'appelait de sa voix faussement grinçante, celle supposée faire rire les enfants. Rassemblant son courage, Brian siffla entre ses dents serrées, serrées si fort qu'elles pourraient sauter :

– Je... je voudrais un ballon rouge... pour Andréa.

Le clown lui donna l'ordre d'attendre, prenant soudainement une voix humaine. Une voix d'homme, de vrai être humain. Il fouilla quelque part dans son stand et en tira quelque chose.

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