Chapitre 7

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Nous descendons de voiture et à peine arrivées sur le perron, la porte s'ouvre dans un courant d'air à l’instant où un éclair fend le ciel tandis que le grondement du tonnerre résonne autour de nous. Tante Bleuenn, telle la tempête qui s’annonce, sort pareille à une furie. Oui, à n’en pas douter, cette dernière est ivre de colère et le temps semble refléter son humeur massacrante.

— Je peux savoir ce que fait cette traîtresse sur le pas de ma porte ?

Le petit bout de femme qu’est Soazig passe devant moi le moins du monde effrayée.

— Oh ! Tu veux bien arrêter ton cirque ? De l'eau a coulé sous les ponts depuis, lui rétorque-t-elle en levant les yeux au ciel.
— Je te supporte déjà bien assez lors de mes visites dans mon usine, ainsi qu'à la boutique, et maintenant tu en rajoutes en te rendant chez moi sans ma permission ! fulmine Tante Bleuenn.

Soazig se fige et pose sur elle un regard à vous glacer les os.

— Ta permission ?! Alors j'avais vu juste ! Tu me tiens rigueur pour Ankou depuis tout ce temps. Ce n’est quand même pas croyable ! explose-t-elle.

Tante Bleuenn la pointe d’un doigt furieux.

— Facile pour toi, vieille chouette ! Ce n'est pas moi qui t’ai trahie autrefois ! Comment puis-je à nouveau te faire confiance ?! J'avais foi en toi ! Tu étais comme ma sœur et tu m'as blessée profondément.
— Tout ça pour une nuit avec Ankou ?! s'exclame Soazig, stupéfaite.

Soudain, Tante Bleuenn lâche un profond soupir et ferme les yeux. Sa posture nous montre une douleur que je n’avais à aucun instant perçue depuis que je suis venue la rejoindre dans sa demeure dans l’espoir d’un nouveau départ.

— Pas pour Ankou, nous confie-t-elle en ouvrant les yeux et les posant sur les nuages noirs menaçants, mais pour l'homme qui venait de mourir et dont Ankou portait son image pour l'année à venir vu qu'il était le dernier défunt de l'an. Cet homme, plus beau de tous.

Soazig semble abasourdie et cherche aussitôt le regard de son amie.

— Mais qui était marié de son vivant, lui rappelle-t-elle, en fronçant les sourcils.
— Qui s'était marié après ma décision de ne pas me mettre en couple avec lui, précise ma tante.

Soazig laisse échapper une petite plainte qui m’apprend combien cette annonce l’atteint de plein fouet.

─ C'était un humain, poursuit Tante Bleuenn. Un mortel. Et c'était aussi mon âme sœur. Je ne me suis jamais liée à lui, car cela aurait voulu dire que j'aurais dû mourir moi aussi, lors de sa mort. À l'époque, je tenais beaucoup trop à mon éternité, alors je l'ai fui sans même qu'il ne me connaisse et je l'ai observé presque tous les jours jusqu'à ce qu'il trouve sa future femme et l'épouse. Grâce à quelques incantations avec l’aide des…

Elle me lance un regard, puis soupire avant de poursuivre.

─ Bref, il n'était plus capable de me reconnaître s'il venait à me croiser. Oubliant même notre rencontre, un soir d'été où nous nous étions rencontrés sur le port.

Sa voix grelotte et je ne parviens pas à retenir une larme pour ma tante.

— Bon sang, Bleuenn ! Pourquoi ne m'en as-tu jamais parlé ?! s'exclame Soazig, alors que je suis moi-même abattue par cette révélation sur la vie de ma tante et par ce qu'a pu lui coûter ce choix.
— J'étais anéantie, Soazig ! Et à l'époque tu vivais une merveilleuse histoire d'amour en vacances, pour la première fois sur la Côte d'Azur, avec Enrique le ténébreux comme tu aimais tant le surnommer à chaque fois que tu me parlais de lui et de ses prouesses orgasmiques.

Aziar #Lui et l'autre monde (Terminé "Nouvelle version")Où les histoires vivent. Découvrez maintenant