Aziar #Lui et l'autre monde (Terminé "Nouvelle version")

Chapitre 10

— Minuit ! annoncé-je, en regardant ma montre.

Tante Bleuenn et moi nous tenons devant la fameuse roche et comme prévu, la marée vient nous lécher les pieds. Ma tante observe les étoiles et me montre la ceinture d'Orion puis Polaris, tandis que je tiens entre mes mains un vieux parchemin.
Nous nous éloignons et appuyons la carte contre la paroi d'une roche. À l'aide de nos lampes frontales, nous traçons le prochain itinéraire.

— Alors ? l’interrogé-je, impatiente et excitée par ce jeu de piste, surtout de nuit, cela rend l’aventure encore plus mystérieuse et exaltante.

Être plongée dans l'obscurité de la nuit, la clarté de la pleine lune se reflétant dans la mer sombre et froide à mes pieds, accompagnée d'une légère brise marine fraîche faisant virevolter mes cheveux, me fait me sentir vivante.

— Il semblerait que j'avais vu juste, m'apprend Tante Bleuenn.
— Trégastel, donc ?
— Oui et plus précisément le dé de Coz pors. Enfin, je crois.
— Mais si tu n’es pas sûre, comment poursuivre sans prendre le risque de nous tromper d’itinéraire ?
— Il nous faut tout d’abord passer par Locronan.
— Où est-ce ?
— À une cinquantaine de kilomètres en direction du sud du Finistère.
— Très bien, ce n’est pas loin. Nous pouvons nous y rendre tout de suite.
— Je pense que c’est le plus raisonnable à faire pour être dans les temps à Trégastel.
— En espérant que ce soit la bonne voie, soupiré-je.
— Aie plus confiance en moi, ma chérie. Et ne laisse surtout pas ton inquiétude envahir l’ensemble de ton esprit, car un jeune homme de l’autre côté d’un passage pourrait très bien se morfondre et en pâtir.

Je soupire à nouveau en faisant automatiquement le vide en moi.

— Ok. Donc, comment ça se passe maintenant ? Va-t-il nous falloir décrypter un autre message une fois là-bas ?
— Je ne sais pas.
— Comment ça ?
— Eh bien, tout comme toi, je ne sais pas ce qui nous attend pour la prochaine étape. On connaît le lieu et l'heure.
— L'heure ?

Elle me fait face en pinçant les lèvres, puis déclare :

— Jildaza, chez nous, lorsqu’une première énigme se déroule en t'indiquant une heure précise, sache qu'à chaque étape suivante, il te faudra te tenir sur le prochain lieu à cette même heure précise, tout au long du périple.
— D'accord. Donc le dé à Trégastel demain soir à minuit, résumé-je. Si à Locronan cela se précise que c’est bien cet emplacement-là.
— Exact.
— Nous faudra-t-il observer les étoiles aussi ? Je veux dire les mêmes ? Comme ce soir avec la ceinture d'Orion et Polaris ?
— Je ne pense pas. Je ne suis sûre de rien.
— Bon, plus rien ne nous retient ici. Fonçons à Locronan. Nous dormirons ensuite dans un F1 sur la route et reprendrons le périple demain.
— Parfait.

Je roule à travers la nuit jusqu’à notre prochaine destination imprévue. Quelle n’est pas ma surprise lorsque nous y parvenons. Il s’agit tout simplement d’un petit village aux allures médiévales.
Le village a conservé une place centrale pavée ornée d’un puits, d’une vaste église et de maisons renaissance en granite. Une boutique nommée « La maison du poète » m’attire et je me fais la promesse de venir la visiter un jour prochain.
Nous ne nous attardons pas dans ce lieu pittoresque et authentique, car Tante Bleuenn me guide à travers celui-ci, en voiture et non à pieds car les véhicules y sont admis en son centre le soir et la nuit, afin de rejoindre le nemeton, qu’elle nomme « les 12 menhirs », mais où elle m’explique qu’il ont été remplacés par douze calvaires.
Encore une fois, je n’y comprends rien.

─ Écoute, ici à Locronan, il s’agit d’un des lieux druidiques les plus importants. Les celtes y ont créé un parcours sacré appelé « nemeton », c’est un mot gaulois qui signifie «  le sanctuaire », dont les différents arrêts symbolisent les douze mois de l’année. Les douze mois lunaires du calendrier druidique plus précisément. Ce village tient son nom de l’arrivée d’un ermite irlandais, Ronan, au cinquième ou sixième siècle, je ne me souviens plus très bien. Mais il m’est plus d’une fois apparu lors de mes recherches. Même Soazig pense, comme moi, qu’il s’agit d’un arrêt à faire lorsque nous sommes en proie au doute. Nous n’avons qu’à nous diriger vers l’emplacement du mois actuel pour y voir plus clair.