Il est doux de s'appuyer parfois, quel que soit celui qui s'appuie. Pourquoi le vieil Achab ne s'est-il pas plus souvent appuyé ?
La pluie battante douchait impitoyablement la rue, le vent violent soufflait par intermittence, en longues bourrasques, qui rabattaient les trombes d'eau latéralement. Les quelques rôdeurs qui trainaient leurs pieds contre le goudron détrempé dégoulinaient de flotte, leurs vêtements alourdis pesaient sur leurs épaules tombantes, dans un tableau plus pathétique qu'horrifique. Mais ni la pluie, ni le froid, n'avaient prise sur eux. Ils marchaient sans but précis le long de la rue, au milieu de la chaussée, ombres anonymes oscillant légèrement à chaque bourrasque.
Une silhouette parmi eux se détachait de l'ensemble.
Elle était pareillement trempée, les cheveux dégoulinants, mais elle était alourdie par plusieurs sacs, et elle marchait à pas décidés.
Elle tenait un sabre à la main.Un mort-vivant se retourna paresseusement dans sa direction, et la lame vola soudain. Une tête roula sur le goudron.
La longue silhouette armée ne s'arrêta pas, continuant de marcher droit devant. D'autres morts convergèrent vers elle, et, méthodiquement, le sabre dessina des arabesques dans le rideau de pluie, sa lame faisant jaillir des éclaboussures de gouttelettes folles.Au fur et à mesure de cet étrange ballet à la fois aérien et aquatique, les morts tombaient, les uns après les autres.
L'eau dévalant la rue pentue charria un sang noirâtre.Lorsque les rôdeurs furent tous au sol, et la vivante seule debout, elle bifurqua en direction d'une maison, dont elle poussa la porte d'entrée.
Elle referma derrière elle, après s'être assurée qu'aucun autre mort ne l'avait aperçue, et donna deux tours de verrou. Après quoi, elle essuya longuement la lame de son arme dans la manche de son blouson, et la remit au fourreau.
Puis elle s'ébroua vigoureusement, secouant son abondante chevelure détrempée, comme un chien mouillé, faisant gicler de l'eau en tous sens sur le papier-peint.Il y avait un grand miroir le long du couloir. Il lui avait rendu son reflet ces deux derniers jours, à chaque sortie et chaque retour.
La première fois, elle n'avait pas compris qu'il s'agissait de sa propre réflexion, et, dans l'obscurité, le brusque mouvement à la périphérie de son champ de vision l'avait fait bondir, son sabre jaillissant immédiatement hors du fourreau, pointé devant elle... en direction du miroir inoffensif, et de sa propre image.
Elle s'était sentie stupide. Trop de nervosité, tout ça...Une fois de plus, son reflet attira son regard au passage, et elle s'arrêta une seconde pour se dévisager. Sa figure était sale, ses joues et son front striés de rouge sombre, là où elle s'était frottée un peu plus tôt ce jour-là, sans se rendre compte que ses mains étaient pleines de sang. L'eau de pluie, en diluant légèrement le sang séché, l'avait fait couler, lui créant un masque mortuaire des plus sinistres, un maquillage grotesque de film d'épouvante.
Au milieu de ça, ses yeux clairs encadrés de ses habituelles cernes, lui faisaient un regard d'hallucinée.
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Un très beau désastre - Tome Trois - The Walking Dead
Fanfic« Tu perds ton temps, ici, avec moi. En me suivant vers la mer, dans un voyage qui n'est pas le tien, tu perds ton temps, Merle. » Merle/OC, Saison 2 revisitée. (Suite de "La tempête qui vient")