CHAPITRE 20 : des trucs en tête.

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Ange admirait les poissons multicolores qui nageaient avec grâce derrière la vitre. Ses yeux étaient rivés sur ce monde sous-marin, désormais familier. Les plantes aquatiques ondulaient au gré des courants artificiels, les coraux offraient un éventail de couleurs vives. L'endroit était silencieux et désert à cette heure-ci, lui offrait un véritable havre de paix. L'eau se reflétait sur les parois des murs, lui donnait l'illusion d'être dans une grotte marine. Le blond s'était assis sur un banc et observait l'élégance des méduses rosées. Bien que, d'après l'écriteau, elles n'aient ni cœur ni cerveau, il leur trouvait une certaine beauté.

Il ne savait pas vraiment ce qu'il faisait là, à traîner et repousser le moment où il devrait rentrer chez lui, mais il ne parvenait pas à se lever. Parfois, ses yeux bleus s'égaraient au bout du couloir, mais il demeurait désert. Plus le temps passait et plus sa gorge se nouait, jusqu'à ce qu'il se rende à l'évidence. Il avait choisi cette place stratégique dans l'espoir de croiser Marin. Or, le soigneur animalier aurait dû finir depuis une demi-heure et passer la porte du pavillon polaire. Ange aurait aimé le croiser par hasard.

L'étudiant passa une main dans ses cheveux et retint de justesse un rire nerveux. Il devait vraiment être désespéré pour imiter Capucine dans ses plans foireux. Il n'avait plus revu le châtain depuis trois jours, n'avait aucune nouvelle. Il savait simplement que son arrêt de travail s'arrêtait aujourd'hui, mais il ne l'avait pas croisé durant sa pause déjeuner.

Ange posa une main sur son torse et passa lentement son index sur le tissu de sa polaire, sous lequel il savait que sa cicatrice se cachait. Une fois encore, il consulta son téléphone. Il n'avait reçu aucun message de sa part. Où était Marin en ce moment ? Que faisait-il ? À quoi pensait-il ? Ces questions le hantaient. Il avait du mal à l'admettre, mais Marin lui manquait.

Ses doigts jouaient nerveusement avec un cordon de son sweat-shirt. Il y avait une façon très simple de trouver des réponses, mais pour cela, il devait faire le premier pas. Pourtant, il hésitait, comme si se lancer équivaudrait à s'engager dans un tourbillon incontrôlable. Ange ferma les yeux lorsque les larmes montèrent par surprise. Pourquoi fallait-il que les sentiments s'en mêlent ? Tout était bien plus simple lorsqu'il ne voyait en Marin qu'un ami. Son cœur était lucide, alors que son esprit essayait de le raisonner. Une relation ne mènerait à rien, il ne lui restait que six mois à passer à Brest. Une éternité loin de sa famille, une belle parenthèse dans sa vie.

Ange ouvrit brusquement les paupières et se leva. Cette parenthèse était bien trop courte. Il traversa l'aquarium jusqu'au pavillon tropical et descendit au bassin des requins. Il leva les yeux jusqu'à l'ascenseur en verre et constata, sans réelle surprise, que Marin y avait trouvé refuge. Il le vit baisser le regard vers lui en voyant du mouvement au coin de l'œil et lui fit un signe. Le châtain le rejoignit et le salua d'un sourire léger, avant de se planter devant la grande vitre pour continuer à admirer ses requins, qui nageaient paisiblement.

Enfin.

Enfin, Ange venait vers lui, après trois jours sans nouvelles. Marin avait voulu lui laisser le temps nécessaire pour réfléchir, pour se retrouver, et s'était promis de lui laisser de l'espace. Au fond, il avait espéré le voir craquer.

— Salut, murmura l'étudiant, comme s'il avait peur de briser sa tranquillité.

— Ça va ? questionna Marin en baissant le regard vers lui.

Ange hocha simplement la tête. Il était conscient de ne pas avoir bonne mine, avec ses cernes et ses yeux brillants de fatigue.

— Et toi ? Ça va mieux, ton œil ?

— Oui, c'est fini. Il est complètement guéri.

Après un long regard échangé, ils reportèrent leur attention sur les squales qui nageaient au-dessus de leur tête. Ange inspira profondément, en silence. Sa gorge n'était plus aussi douloureuse, son cœur était plus léger. Il avait l'impression de sentir l'aura de Marin à quelques centimètres de lui. Sa présence irradiait, le rassurait. C'était peut-être sa taille, qui lui donnait une sensation sécurisante ? Ses bras étaient une forteresse contre le monde.

Entre ciel et merOù les histoires vivent. Découvrez maintenant