Ange marchait en silence dans les couloirs de l'aéroport. Il se concentrait sur le bruit de la pluie qui tapait contre les carreaux, afin de faire abstraction des sons parasites. Les voix des autres voyageurs, les roulettes des valises contre le sol, les annonces passées aux hauts parleurs. À ses côtés, Marin ne se montrait pas plus bavard. Ce dernier n'avait pas beaucoup parlé depuis leur réveil, quelque chose semblait le tourmenter.
L'étudiant trouva sa porte d'embarquement et s'assit dans l'espace d'attente. Dans moins de quatre heures, il serait chez lui, avec sa famille. Sa mère lui avait annoncé que Leïla était rentrée la veille et qu'elle l'avait invitée à dîner ce soir. Son cœur s'emballait, paniquait, à chaque fois qu'il y songeait. Que diraient ses parents, eux qui adoraient la jeune femme ? Ils se connaissaient depuis leur plus tendre enfance.
— Tu vas déchirer ton billet, souligna Marin en recouvrant sa main de la sienne.
Ange baissa les yeux sur ses doigts qui tordaient le morceau de papier avec nervosité, et les lia à ceux du soigneur animalier.
— Ça aurait été bien que tu viennes, confia-t-il en laissant les yeux.
Il imaginait avec une facilité déconcertante Marin au milieu de son salon, à partager son quotidien. De façon égoïste, il aurait aimé l'avoir pour Noël, ne pas choisir entre lui et sa famille.
Touché, Marin passa son bras libre autour de ses épaules et l'attira contre lui. Ses nerfs subissaient une rude épreuve depuis la veille. Ange lui apparaissait si fragile. Ses révélations n'avaient fait qu'aiguiser un peu plus son obsession de le protéger. Il ferma les yeux lorsque les haut-parleurs annoncèrent l'ouverture imminente des portes. Il refusait de le laisser partir si loin.
— On se revoit bientôt, lui assura Ange en passant une main dans ses mèches châtaines. Une semaine, ça va passer vite.
— J'aurai enfin de la place dans mon propre lit, plaisanta le plus âgé en le serrant contre lui.
Ange esquissa un sourire et embrassa sa joue avant d'attraper sa petite valise. Son billet d'avion et sa carte d'identité étaient déjà prêts.
— Envoie-moi un message quand tu atterris.
— Promis.
Il dévisagea Marin, qui semblait sur le point de lui dire quelque chose. Une étrange lueur brillait au fond de son iris, comme de la crainte.
— Passe de bonnes fêtes, lui souhaita Ange. À la semaine prochaine.
— Toi aussi. Fais attention.
Ange hocha la tête et rejoignit la file de passagers qui attendaient de faire contrôler leurs billets. Il se retourna et son cœur se serra lorsqu'il vit le soigneur animalier passer un index sur son cache-œil dans un geste nerveux. De sa place, il le voyait se mordre la lèvre. Et puis, il leva son iris dans sa direction et leur regard se croisèrent. Marin avança vers lui d'un pas décidé, nerveux. Quelque chose n'allait pas.
— Ange... commença le jeune homme.
Il voulait lui demander de rester, de ne pas partir. Il était loin d'être naïf, Ange souffrait de la distance avec sa famille. Il ne s'épanouissait pas dans ses études, n'avait pas d'attache réelle. Et s'il ne revenait pas à Brest ? Marin en avait cauchemardé toute la nuit, entendait sa voix au téléphone, qui lui annonçait qu'il restait à Veauce.
— Tu n'as pas oublié ton billet de retour ?
L'étudiant fronça les sourcils, parut alarmé quelques instants, avant de fouiller dans la poche de sa valise pour trouver la feuille de papier.
VOUS LISEZ
Entre ciel et mer
De TodoIl y a la vie. Il y a l'espoir. Il y a les secondes chances, qui permettent de vivre pleinement. Et puis, il y a Marin. Marin et son regard aussi étrange que rassurant. Il y a les coups d'amour. Les coups de foudre. Les coups de tonnerre. Il y...