Prologue

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« Je veux pas y retourner, je veux pas Tasha plus jamais! Ça fait trop mal! » dis-je en laissant échapper un sanglot.

Aussitôt, sa main vient couvrir mes lèvres, m'empêchant de faire plus de bruit.

« Chut Carol, tu sais bien ce qu'il se passe si on fait du bruit! » me répond t-elle en chuchotant.

J'essaye d'étouffer mes sanglots, mais j'ai trop mal et des gémissements glissent entre mes lèvres. Doucement, elle me prend dans ses bras et me berce. Je me blottis contre elle. J'ai l'impression d'être protégée quand elle est là. Mais ce n'est qu'une illusion. Je sais que dans peu de temps, la porte s'ouvrira à nouveau. Et qu'ils prendront à nouveau l'une de nous deux. Mon corps entier crie de douleur et je sais que le sien aussi mais elle ne le montre pas. Elle a toujours été forte, même avant tout ça, avant ce qui est devenu notre quotidien.

Déjà un an. Un an s'est écoulé depuis que mon paradis est devenu enfer. Honnêtement, si j'avais été toute seule, ça aurait été moins grave. Seulement voilà, mon ange est ici avec moi et elle souffre. Et cette pensée est encore plus intolérable que n'importe quelle torture. Elle est là et me berce, me laissant étouffer mes pleurs dans le creux de son épaule. Je la serre contre moi. Ses beaux cheveux roux effleurent ma nuque. Elle est si fine. Ceci dit, je ne dois pas être plus grosse qu'elle. La nourriture n'est pas une de leur priorité et selon les jours, on en reçoit ou pas. Au début, c'était l'anarchie. Et puis, on s'est habitué. Je ne ressens meme plus mon ventre qui se tord, la douleur étant insignifiante face à celle de mon corps écorché de blessures.

« Ecoute moi bien » me murmure Natasha « Je te promets, je te promets qu'un jour on sortira d'ici et on s'envolera loin d'ici. Je te promets de ne jamais t'abandonner, de toujours revenir te chercher. Tu es ma Wendy, je suis ton Peter Pan et un jour on s'envolera loin. On a que 16 ans et un jour on s'envolera. Je te le promets. »

Je relève la tête vers elle et lui réponds d'un faible sourire. Je lui fais confiance et je sais qu'elle tiendra sa promesse. Elle se penche vers moi et pose ses lèvres sur les miennes. Je savoure l'instant, priant pour que le temps se fige. Lorsqu'elle s'éloigne, je suis un instant ses lèvres, souhaitant prolonger la sensation. 

« Je t'aime Tasha » lui dis-je d'un air abattu.

« Je t'aime aussi Carol » elle me répond, une main sur ma joue.

Soudain, des bruits se font entendre. Des bruits de pas. Mon corps entier se fige et commence à trembler. Ma respiration se bloque. Mon esprit est vide. Natasha pose une main sur la mienne, m'incitant au calme. La porte s'ouvre dans un fracas assourdissant. Natasha se déplace de façon à former une barrière entre moi et ceux qui nous veulent du mal. Même de dos, je peux voir sa jambe qui flanche et ses blessures. Je me cache derrière son bras, qu'elle place autour de ma taille. Je m'agrippe, même si je sais que c'est en vain. Ils arrivent à deux et attrape Natasha violemment. Ils l'attirent vers la sortie mais je refuse de lâcher. L'un des deux gardes lâche Natasha et me frappe violemment les côtes. Ca fait mal mais je tiens bon. Il m'agrippe la taille et tire dans la direction opposée. Natasha attrape ma main, si bien que l'agent qui la tient doit la soulever pour la tirer.

« NATASHA! NATASHA! REVIENS NON TASHA S'IL TE PLAIT NE ME LAISSE PAS!» je crie quand ils parviennent finalement à nous séparer. Je me débats, crie autant que je peux, donne des coups de pieds dans tous les sens, utilisant le peu d'énergie qu'il me reste pour tenter de m'enfuir.

« Carol, souviens toi! Je t'ai promis et je tiendrais cette promesse d'accord? Souviens toi! Je reviendrais dans peu de temps! » me crie t'elle, alors que l'homme l'emmène loin de moi.

Le garde qui me tenais me jette à terre et je n'ai pas la force de me relever. Mes côtes me déchirent l'intérieur de douleur et une énorme boule d'émotion est coincée dans ma gorge. Je continue d'appeler, pleurant seule sur le sol de la cellule replongée dans le noir. Je continue d'appeler mon ange, espérant à chaque seconde la voir passer cette porte. Peu importe l'état dans lequel elle se trouvera, je serais là pour la réconforter, c'est ce que je me suis promis. « On s'envolera » m'a t'elle promis.

J'ai attendu. Des heures, des jours.

Elle n'est jamais revenue.

Mémoire perdue Où les histoires vivent. Découvrez maintenant