Tu es toute ma vie [Style]

Chap20 : l'amour ça fait mal

Durant les jours qui suivirent, Kyle avait inconsciemment installé une routine.

Se lever, aller dans la salle de bain, prendre la lame de rasoir, regarder le sang couler sans expression, se doucher, s'habiller, partir vers l'arrêt de bus sans dire un mot à sa famille, ignorer Kenny et Cartman, pleurer dans le fond du car, passer ses récréations tout seul sur un banc à se demander pourquoi il était encore là, ne pas écouter en cours, aller chez le conseiller, rentrer chez soi, ignorer sa famille, grignoter quelques biscuits mais rien de plus, retourner dans la salle de bain, retirer ses bandages, reprendre la lame de rasoir, aller se coucher, pleurer, faire ses devoirs en pleine nuit, dormir seulement quelques heures.

Et il recommençait, encore et encore. Ça faisait presque une semaine maintenant que ça durait. Ses amis s'inquiétaient énormément pour lui. Il était tout le temps blanc, les yeux toujours rouges, l'air exténué avec d'énormes cernes sous les yeux. Il ne parlait plus à personne. Les professeurs s'inquiétaient aussi énormément pour lui. Ses notes avaient considérablement chutées en quelques jours seulement, il s'installait au fond de la classe et regardait ailleurs, l'air perdu dans ses pensées. Son frère l'entendait des fois pleurer le soir, et il avait même déjà trouvé dans la poubelle des bandages pleins de sang. Il en faisait des cauchemars, et il était tout le temps perturbé, craignant que son grand frère décide de mettre fin à ses jours. Ça l'inquiétait tellement qu'il ne mangeait plus non plus. Les parents du rouquin avaient même décidé de l'emmener voir un psychologue. Il était sorti de la maison exprès dans la matinée et avait loupé le rendez-vous. Ils ne savaient plus quoi faire pour lui.

Ce lundi avait commencé comme un jour normal. Kyle s'était levé, s'était enfermé dans la salle de bain et avait écoulé un peu de sa souffrance en se faisant du mal. Il avait pris sa douche, s'était habillé et était parti sans dire un mot à personne.

Il venait juste de s'asseoir dans le bus, et comme à son habitude, avait enfoui son visage dans son sac pour que personne ne voit ses larmes rouler. Sauf qu'à l'exception des autres jours, leur conductrice ne démarrait pas le bus, et à la place, se mit à crier.

— ALLEZ ON SE DÉPÊCHE !! ON RENTRE DANS L'BUS ET ON S'ASSEOIT ET ON FERME SA GUEULE !

Kyle leva à peine la tête pour voir Stanley qui marchait dans l'allée du bus. Mais ça, c'était pas son Stanley. C'était pas le Stanley qu'il connaissait. Le brun était totalement vêtu de noir. Kyle se souvint de la période gothique qu'il avait fait quand il était parti au Canada en cinquième. Alors il refaisait une crise ?

Il le regarda s'asseoir dans le fond du bus tout seul, d'un air désemparé. C'était sa faute s'il était comme ça ?

Il resta quelques instants bouche bée à le regarder. Il paraissait si ... Blasé. Comme s'il n'en avait plus rien à faire de la vie. De toute façon, dorénavant la vie c'était de la merde.

Stanley tourna la tête de l'autre côté de l'allée, se sentant observé. Il croisa alors le regard de Kyle. Ça lui fit mal au cœur rien que de le voir, mais surtout dans cet état là. Lui qui avait pleuré entre deux vomissements et déprimé toute la semaine en se disant que Kyle allait beaucoup mieux sans lui, il s'était trompé de façon monumentale. Le juif était peut être même dans un état pire que le sien. Il se demanda comment c'était possible, vu que c'était lui qui avait rompu.

Après tout, ça ne le regardait plus, et il détourna le regard d'un air hautain, malgré son cœur qui se brisait un peu plus à chaque instant. Il hésita un peu et finit par jeter un autre coup d'œil au rouquin, juste pour vérifier s'il le regardait toujours. Et lui qui croyait qu'il ne pouvait pas avoir encore plus mal au cœur. Le juif regardait la fenêtre, mais on pouvait clairement voir les larmes cascader sur son visage.