Deux ans.
Deux ans que je ne le sens plus.
Deux ans qu'il a complètement disparu.
Deux ans que je mens à mes amis, à ma famille. Tout va bien, voilà ce que je leur dis.
Deux ans que je ne sors plus en forêt avec mes proches.
Deux ans que je déprime...
Assis autour de la table du snack, je fixe mon assiette sans grand appétit, l'estomac complètement retourné par l'expérience que nous avons vécu quelques heures plus tôt. Conrad, sa main posée sur ma cuisse me la caresse délicatement du pouce. Je ne sais pas comment j'ai fait pour ne pas vomir mais une chose est sûre, je ne ferais plus jamais ça. Tous les plats biens gras du fast-food vont finir par me rendre malade, Mia qui n'a pas pu sauter à cause de sa crise d'angoisse s'amuse à m'envoyer des bouts de pain dans la figure en riant comme une enfant. Je lui tire la langue avant de reporter mon attention sur mon assiette. Je prends une frite et la mange difficilement, Conrad se tourne vers moi en fronçant les sourcils.
-Tu ne manges pas ?
-J'y arrive pas, j'ai trop mal à l'estomac.
-Tu veux rentrer ?
Il ne me laisse pas le temps de répondre et se penche sur la table pour demande à Davy les clés de sa moto. Je fronce les sourcils et écarquille les yeux, très mauvaise idée. J'appelle Conrad et lui dis que ce n'est pas la peine. Il se rassied à mes côtés, termine rapidement son assiette et me prend par la main pour nous faire sortir du restaurant. Nous nous posons sur un banc, main dans la main, et il m'attire plus près de lui. Son bras entoure ma taille et il s'empresse de plonger sa tête dans mon cou. Je ferme les yeux et savoure cet instant auprès de lui.
- Je ne veux pas que tu partes.
Je serre sa main dans la mienne. S'il s'avait, moi non plus, je n'ai pas la moindre envie de le quitter, lui, ses terres, son territoire, sa meute. Mon estomac noué commence petit à petit à reprendre des forces mais je ne me sens absolument pas capable de retourner dans le restaurant.
-Moi non plus.
Je fixe un point en face de moi, incapable d'en dire plus et tente tant bien que mal de faire disparaître ce pincement qui m'étreint le cœur avec force dès que je pense à notre départ. Je sens son regard sur moi et me tourne pour l'observer. Mes yeux plongent dans les siens, son regard est si intense, si pur qu'il m'en coupe la respiration. Je peux y lire tout l'amour qu'il me porte, tout l'espoir que j'ai réussi à ranimer briller au fond de ses pupilles. Je n'avais jusqu'à présent jamais vu autant d'émotions dans les yeux d'une personne. Je sens un frisson me traverser et je ne peux empêcher l'immense sourire qui vient se placer sur mon visage et mes yeux qui s'emplissent de larmes. L'émotion que je ressens est beaucoup trop forte pour que je ne puisse faire quoi que ce soit d'autre que le prendre dans mes bras. Je le serre aussi fort qu'il m'est possible de le faire. Je l'aime, je l'aime tellement que j'en ai peur. J'ai peur de le décevoir. Que tout ce que nous avons construit jusqu'à présent ne s'effondre comme un château de carte, dès l'instant où je quitterais le territoire de sa meute. Je lui voue une confiance sans limite mais je ne peux empêcher toutes ces sensations de prendre possession de moi. J'ai peur qu'il se remette à douter, mais, avant tout, j'ai peur qu'à mon retour, le rituel ne fonctionne pas comme prévu et qu'Hunter ne revienne pas, qu'il soit définitivement parti et qu'il n'y ait vraiment aucun moyen de revenir en arrière.
-Et si Hunter ne revenait jamais ?
Je reste un instant interdite face à sa question, me demandant presque si je ne l'ai pas imaginée.
-Je ne sais pas. J'ai peur moi aussi mais je sens, j'espère, au fond de moi que ça va marcher.
-Mais ça fait si longtemps que j'attends ce moment. Si longtemps que je prie la lune de me le rendre. Je lui prie de revenir chaque soir mais rien n'a jamais fonctionné...
-Ça va marcher, je te promets de faire mon maximum pour qu'Hunter revienne. Ellyn, même si elle est heureuse de t'avoir rencontré, souffre beaucoup de l'absence de ton loup et elle ressent beaucoup plus que moi tes sentiments, tes peurs, tes angoisses, tes joies. Tout. Elle ressent chacune de tes émotions.
Il relève les yeux vers moi et se penche doucement vers mes lèvres, mais c'est ce moment que choisissent nos amis pour quitter bruyamment le restaurant. Nous nous reculons l'un de l'autre avant de nous lever pour aller les rejoindre. Brent s'approche de moi et me glisse à l'oreille qu'il a payé mon repas. Je le remercie avant de retourner près de Conrad. Je me blottis contre son flanc, son bras autour de ma hanche nous marchons jusqu'à la voiture avant de retourner à la maison de la meute. Assise sur le siège avant, la musique dans les oreilles, la fatigue me prend d'un coup et je sens mes paupières papillonner jusqu'à se fermer entièrement.
De petits baisers sur mon visage me tirent de mon sommeil et Conrad me sourit en voyant que j'ai ouvert les yeux. Ça y est, nous y sommes, c'est notre dernière ligne droite, nos derniers moments avant que je rentre chez moi. Je sors de la voiture et laisse mes amis rentrer au chalet alors que je reste auprès de mon âme-sœur. Notre dernière après-midi avant que je ne parte, avant que nous exécutions le rituel dans quelques jours, et je compte bien en profiter le plus possible, profiter de notre amour, de son corps contre le mien, de nos étreintes infinis. De nous tout simplement.
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Alors, oui, la note d'auteur n'était pas là initialement mais comme le réseau est moins saturé aujourd'hui, j'en profite ! J'espère que ce chapitre vous a plu, ça y est, c'est le grand départ pour Gwenaëlle ! Les amoureux profitent de leurs derniers instant avant la séparation. Je vous souhaite de joyeuses pâques et un bon week-end !
