- Souriiiis !
C'est ce que je suis en train de faire. Je le fais peut-être mal depuis quinze minutes. J'ai besoin d'une pause, juste une petite.
Le flash m'aveugle une nouvelle fois, mes yeux ne peuvent s'empêcher de sécher, ils me font mal.
- En tout cas Marjorie, on tenait absolument à te dire qu'on t'adore, ma soeur et moi !
Je continue de sourire. Elles sont charmantes, très polies, très timides, comme si je leur faisait peur. C'était peut-être le cas, à ma manière.
- Merci d'avoir fait le déplacement, les filles. Rentrez bien.
Elles gloussèrent en écarquillant les yeux. Auraient-elles un jour pensé que je leur dirais ces quelques mots attentionnés ? Vu leurs expressions, je ne pense pas.
Elles se détournèrent lentement, comme si le fait de me quitter était douloureux. Je maintiens mon sourire. Dès qu'elles sont entièrement retournées, je jette un coup d'œil rapide à la queue qui attend derrière les barrières. Les gens patientent, ils sont par centaines, massées entre deux bout de métal hideux, dans une salle d'exposition où la chaleur est de plus en plus insupportable.
Je commence à manquer d'air.
Caroline, à mes côtés, termine avec un jeune couple plutôt à l'aise, qui n'hésitent pas à la toucher et à lui faire des compliments sur sa coiffure. Je sais qu'elle déteste ça, je le vois, à sa façon de se tenir, raide. Dans un geste mécanique, elle ramène sa longue tresse tombante sur ses reins devant elle, telle une princesse du Nord. Je sens dans la foule comme un élan de béatitude, ils l'ont déjà vu faire pourtant.
Sauf que cette fois c'est pour de vrai. En direct. Devant eux.
- Rentrez bien, dit-elle également avec son inimitable accent du sud renfrogné.
Le couple opte pour la même réaction que les deux personnes avec moi : surpris et heureux. Ils se retournent cependant plus vite et quittent rapidement la petite estrade.
Je lève une main en l'air pour faire signe aux agents du staff que je vais boire un coup. Caroline se racle la gorge.
- Il ne nous reste que trente minutes, fit-elle en s'approchant, si tu fais une pause maintenant, tu retarderas le moment où nous allons partir.
Je sais qu'elle n'a pas envie d'être là. Elle se trouve dans cette convention par ma faute. Je lui souris et fait signe aux agents de nous envoyer des fans.
- Reste avec moi, ça ira plus vite si nous leurs parlons à deux.
Elle soupire de soulagement, comme si elle attendait mon ordre depuis le début. Ce n'était pas moi qui avait décidé de nous séparer mais les organisateurs de la convention. Ils avaient prétexté que nous avions une communauté chacune. Ils avaient peut-être raison, mais Caroline ne semblait pas s'en préoccuper.
Elle voulait rester avec moi.
La demi-heure passa donc plus vite, les échanges étaient plus naturels, plus détendus, je me suis mise à rire de temps en temps, Caroline m'accompagnait volontiers. Nous étions meilleures amies, après tout.
Un coup de sifflet a retenti et les barrières centrales se sont fermées, le bruit décupla car la scène principale accueillait les grosses têtes d'affiches.
Les 1 million ou plus, comme dit Caroline.
De notre côté, l'effervescence s'est évaporée d'un seul coup. Dès que les fans se sont reculés et se sont dispersés dans l'immense foule au centre, je me suis sentie vide.
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Double Tap [TERMINÉE]
Teen FictionMarjorie aime Instagram. Tout le monde aime Instagram, non ? Mais ce que Marjorie aime encore plus, c'est la popularité. Influencer des milliers de personnes, ça permet de faire gonfler l'ego et de se sentir important. Ça permet de rencontrer des ge...